Nombre de biographies concernant le grand Chancelier du Reich ont déjà été publiées, notamment depuis 1998, année du centenaire de sa mort. On connaît déjà tout, ou on croit tout connaître de la vie de celui qui passe pour avoir unifié l'Allemagne. Sandrine Kott, elle-même note que l'on a déjà tout dit du personnage. C'est pourquoi le souci de l'auteur a plus été de d'expliquer le mythe dont Bismarck a fait et fait encore l'objet et d'analyser quelques axes dominants de la politique du personnage. C'est d'ailleurs sur ce plan que sont construits tous les ouvrages de la collection Facettes. L'objectif n'est pas alors de raconter la vie du personnage étudié selon un point de vue plus ou moins partial mais plutôt de recenser les interprétations variées de son action qui ont pu être faites à l'occasion de travaux antérieurs. Ce choix permet de dégager directement les ambiguïtés du personnage et de l'étudier dans le cadre de quelques problématiques principales.
[...] Il revendiquera cette origine sociale tout au long de sa vie. Son comportement a-t-il toutefois été celui que l'on aurait pu attendre d'un Junker ? Tout d'abord, son physique renvoie assez facilement au stéréotype du seigneur local : grand, fort, gros mangeur, portant toujours son uniforme de cuirassier à partir de 1866, amateur de chasse et bon tireur (voire duelliste). Néanmoins, certains aspects de sa personnalité peuvent démentir ce portrait légèrement caricatural : le chancelier peut en effet se montrer très sensible, fidèle en amitié, amateur de musique. [...]
[...] De plus, la politique sociale de la République se réfère à l'action de Bismarck : le Ministère du Travail de Weimar se pose en héritier des mesures sociales de 1884. Enfin, Stresemann justifie sa politique extérieure en faisant référence au souci cher à Bismarck d'équilibrer les puissances. A l'opposé, les anti- républicains utilisent ce dernier afin de dénoncer les ennemis de l'intérieur et une République qu'ils jugent artificielle ; ce sont souvent des nostalgiques de la grandeur passée et d'un chef incontesté. Ce chef est pendant un moment incarné par Hindenburg. Ce dernier a en effet combattu à Sadowa et reste profondément monarchiste. [...]
[...] Plus que la personne de Bismarck, c'est ici sa place dans la culture allemande et dans le sentiment national qui nous intéresse. Cette étude ne se base pas sur de nouvelles découvertes mais entreprend une sorte de relecture, d'analyse de tout ce qui a pu être écrit dans un souci de synthèse, ce qui est particulièrement utile lorsque l'on considère la quantité de biographies contradictoires qui ont pu être écrites à son sujet. On peut cependant noter que l'auteur a eu beaucoup tendance à évincer les convictions du personnage (politiques ou religieuses) pour privilégier une vision opportuniste de son parcours et de sa politique. [...]
[...] Elle s'inscrit dans la tradition militariste prussienne, Frédéric le Grand restant un des modèles principaux du chancelier. De même, l'annexion de l'Alsace-Lorraine se justifie dans cette optique par des raisons diplomatiques et non pas culturelles, les Vosges constituant une position particulièrement stratégique. En politique, lorsqu'il met les catholiques et les socialistes au ban de la société, c'est, selon l'auteur, en vue d'affaiblir ses opposants au Reichstag (que ce soient les sociaux- démocrates ou les catholiques du Zentrum). Bismarck mène une politique de germanisation afin de protéger le Reich contre les ennemis de l'intérieur (qu'ils craint plus que tout, ne croyant pas à la force du sentiment national), par exemple en Pologne, en incitant à la colonisation. [...]
[...] On peut d'ailleurs se demander si il n'a pas utilisé le sentiment national allemand à des fins semblables. Croyait-il réellement à la Nation Allemande ou s'est-il servi du nationalisme afin de pérenniser son ouvrage et l'équilibre européen ? Son nationalisme apparent cache souvent, selon l'auteur, la volonté de satisfaire les intérêts de la Prusse plus que de l'Allemagne. Sa politique ne prend pas vraiment compte des identités culturelles propres à chacune des communautés qui composent la nation allemande. Il ne conçoit d'ailleurs qu'une Allemagne dominée par la Prusse et utilise souvent l'argument national afin de renforcer la Prusse aux dépens de l'Autriche. [...]
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