Bertrand Badie, né en 1950, est un politologue français, spécialiste des relations internationales. Il est professeur à l'IEP de Paris et enseignant-chercheur associé au Centre d'Etudes et de Recherches Internationales(CERI).
Le discours sur les droits de l'Homme rassure ceux qui y voient pour l'ordre international les chances d'un nouvel humanisme et inquiète ceux qui perçoivent à l'horizon l'arrivée de nouveaux missionnaires. En effet, la diplomatie (puissance, intérêt et sécurité nationale) n'aime pas beaucoup, en principe, les droits de l'Homme (droit, personne et contrôle du souverain).
Mais aujourd'hui, les droits de l'Homme s'imposent de plus en plus sur la scène internationale. Les Etats ne peuvent plus ne rien faire face à un génocide, l'oppression d'une minorité ou un massacre. « Les droits de l'Homme aujourd'hui s'attaquent à la souveraineté des Etats, alors qu'hier ils tendaient au contraire à l'exalter ». La souveraineté des Etats est peut-être en passe d'être « dédivinisée » sur la scène internationale.
[...] Wilson, il s'agit d'imposer, à la fin de la Première Guerre mondiale, le modèle américain de démocratie dont il croyait les Etats-Unis dépositaires de la seule marque légitime, mais surtout de construire l'humanisation de la vie internationale sur le seul principe du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes. Ces valeurs préfigurent la pratique de l'ingérence. W. Wilson, fidèle à ses principes, n'est pas un véritable conquérant ; il ne domine que pour mieux évangéliser. Le principe du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, pierre angulaire de son œuvre, est clairement affirmé dans les Quatorze Points. L'idée de l'Etat nation reste néanmoins la donnée incontournable de la vie internationale. [...]
[...] Il est en outre excessif car c'est l'idée même de coexistence internationale qui se retrouve remise en cause. Trois principes doivent donc guider la mise en place d'une sanction : Une sanction sert à punir pour contraindre à l'abandon d'une loi ou d'un régime (ex : apartheid), pour obliger à respecter une convention ou une résolution pour faire sens (inefficacité de la sanction lorsqu'elle vise à condamner un système dans son ensemble ; ex : Soudan, Iran, Cuba ou Haïti). [...]
[...] Trop de puissance peut dissuader celui qui en dispose de respecter les droits de l'Homme (ex : la Chine à propos du Tibet, la Russie avec la crise tchétchène). Les Etats-Unis ont pu faire le choix de ne pas ratifier, voire de ne pas signer de nombreux textes internationaux concernant les droits de l'Homme, certains que le coût de cette abstention serait plus faible qu'une adhésion qui pourrait les lier et diminuer leur liberté (ex : conventions sur les armes chimiques, sur les mines ou encore le droit des enfants, du Pacte des Nations unies sur les droits économiques, sociaux et culturels tandis que le Sénat émet quantité de réserves avant de ratifier le pacte sur les droits civils et politiques, refusant en outre le protocole additionnel ouvrant droit à des requêtes individuelles). [...]
[...] Le développement de la pensée humaniste au cours de l'Histoire Les sociétés fermées ne se posent pas la question de l'altérité, de la solidarité et de l'universalité. Au contraire, les sociétés ouvertes sont sensibles aux influences extérieures. Ce sont donc dans des moments d'ouverture et de communication que s'active la construction humaniste. Période de construction de l'Etat en Europe, la puissance devait être maîtrisée à l'intérieur du territoire, alors qu'on lui donnait carte blanche à l'extérieur des frontières. La Renaissance occidentale : étape essentielle de l'invention de la scène internationale, à partir de la fin du XIV° siècle. [...]
[...] La rupture de 1975 est importante : la diplomatie des droits de l'Homme recevait une définition complète et sûre. La déclaration de 1948 ouvrit la voie à une cascade de textes désormais inscrits à tout jamais dans le patrimoine juridique de l'humanité : conventions sur le génocide (1948), sur les réfugiés (1951), sur le droit politique des femmes (1957), sur les discriminations raciales (1966), sur le droit humanitaire (1977), sur les discriminations sexuelles (1979), sur la torture (1987), sur le droit des enfants (1990) auxquelles il faut ajouter le pacte sur les droits civils et politiques et celui sur les droits économiques, sociaux et culturels. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture