Célèbre pour ses romans (il rentre à l'Académie Française en 1933 et obtient le prix Nobel de littérature en 1952), Mauriac commence sa carrière de journaliste dans les années 1930, au Figaro. Admirateur de Maurice Barres et de Marc Sanghier, le fondateur du Sillon, il appartient néanmoins à ce milieu catholique et conservateur qui regarde le fait politique avec distance et méfiance. Ce n'est qu'après la guerre d'Espagne, la deuxième Guerre Mondiale, et surtout les débuts douloureux de la décolonisation que Mauriac fait le choix de s'engager politiquement.
L'engagement, c'est donc l'acte d'entrer sur la scène politique, l'attitude de l'intellectuel qui par la prise de conscience de son appartenance au monde et de sa capacité à influencer le cours des évènements renonce à une position de simple spectateur, et met sa pensée au service d'une cause, d'une idéologie ou de valeurs. Il existe bien entendu divers degrés d'engagement, et il semble juste alors de parler d'engagement militant quand l'intellectuel inscrit ses prises de position au sein d'une association, d'un syndicat, ou d'un parti. L'ambigüité, ici, tient dans le fait que cet engagement, pris au nom d'une plus grande efficacité, peut se traduire par une perte de liberté de penser, et d'agir.
Tout intellectuel qui cherche à s'engager se pose un jour le dilemme de peser plus sur le monde, tout en gardant son autonomie. Engagement, militantisme, la nuance est centrale. Comment définir la nature et le sens de l'engagement de Mauriac ? En fait, si au départ une exigence morale va le pousser vers le journalisme politique pour témoigner de l'histoire, et influencer ses lecteurs, il refusera, en fin de compte, l'option du militantisme pour préserver l'indépendance de sa plume.
Deux axes me paraissent essentiels : l'engagement de Mauriac comme un engagement moral au service d'une idée de l'homme, et le refus de militantisme pour que l'engagement personnel reste toujours fidèle à lui-même.
[...] Mais lui-même hésite franchir le pas d'un engagement militant. Il affirme ainsi que sa raison d'être, c'est de ne pas être situé Pour lui, les Blocs Notes sont avant tout le prisme d'un homme qui doute, d'un homme qui s'interroge sans esprit partisan. Tout au plus reste-t-il fidèle à lui-même en changeant de journal du Figaro à l'Express, quand les divergences avec la direction du premier se font trop sensibles, alors que Mauriac critique la France sur la question de la décolonisation. [...]
[...] Mauriac était donc réticent devant les possibilités que lui offrait l'engagement militant. Et s'il s'est engagé concrètement en faveur de causes, c'est toujours quand il était convaincu du bien fondé moral de son action. Aux portes du militantisme Il a notamment beaucoup contribué, dans la presse, sur le général de De Gaulle, à diffuser le mythe de l'homme providentiel, sauveur de la nation. Il lui restera d'ailleurs toujours fidèle, peut-être parce qu'il retrouvait en cet homme la grandeur morale et la figure d'une autorité paternelle retrouvée. [...]
[...] Mauriac, l'engagement non militant : Une écriture de combat Célèbre pour ses romans (il rentre à l'Académie Française en 1933 et obtient le prix Nobel de littérature en 1952), Mauriac commence sa carrière de journaliste dans les années 1930, au Figaro. Admirateur de Maurice Barres et de Marc Sanghier, le fondateur du Sillon, il appartient néanmoins à ce milieu catholique et conservateur qui regarde le fait politique avec distance et méfiance. Ce n'est qu'après la guerre d'Espagne, la deuxième Guerre Mondiale, et surtout les débuts douloureux de la décolonisation que Mauriac fait le choix de s'engager politiquement. [...]
[...] Mauriac fait ainsi véritablement corps avec l'actualité. Il le fait pour l'Histoire, mais aussi pour ses lecteurs, au jour le jour, et c'est pour cette double intention qu'on peut parler d'une écriture de combat. Ce double aspect de l'écriture est essentiel. Mauriac dérange les puissants par ses prises de position, par ses critiques acerbes et polémiques, il cherche d'abord et avant tout à toucher ses lecteurs, et partager dans les mots sa colère et son indignation. Dans une conférence en 1946, il explique ainsi : notre mission n'est pas de vaincre, mais de convaincre, d'éclairer nos lecteurs, de les aider à se reconnaître dans les ténèbres Ce qu'il veut c'est donner à ses lecteurs une grille de lecture du quotidien dans laquelle ils puissent se retrouver, c'est participer à l'émergence d'une culture et d'une conscience critique. [...]
[...] C'est sa conception de l'engagement intellectuel qu'il résume en quelques mots. C'est-à-dire un sentiment de responsabilité ; une exigence de liberté ; et puis la volonté de laisser une image très intègre de lui-même, comme un modèle pour les générations à venir ; pour que le symbole de son engagement moral, au service de la vérité et de la justice, rayonne encore après sa mort. Pour conclure, avec le recul que l'histoire nous laisse, son jugement, plus de 30 ans après la mort de Mauriac, on ne peut pas dire que sa conception de l'engagement non-militant ait réellement triomphé. [...]
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