L'entreprise nationalisée Elf fut créée par le général de Gaulle en 1963 « pour assurer l'indépendance pétrolière de la France » et qui a vécu, grandi et prospéré sur sa relation particulière et incestueuse avec l'Afrique. En créant Elf à côté de Total les gaullistes voulaient un véritable bras séculier d'Etat, en particulier en Afrique, une sorte d'officine de renseignements dans les pays pétroliers. Dès sa création, le général de Gaulle nomma le fondateur de la DGSS (Direction générale des services spéciaux) et ancien ministre de la Défense, Pierre Guillaumat, comme premier directeur du groupe pétrolier qui allait devenir Elf-Aquitaine. Aujourd'hui, Elf, bien que privatisée, reste le premier service français de renseignements et d'action en Afrique.
Elf fournit une couverture et des fonds au président pour des opérations politiques et militaires dans ses prés carrés africains. Avec la présidence de Georges Pompidou (1969-1974) puis de Valéry Giscard D'Estaing (1974-1981), conservateur non-gaulliste, Elf s'autonomisa progressivement par rapport à l'Elysée. Les cadres d'Elf considéraient les barons gaullistes comme seules autorités légitimes et attendaient leur retour au pouvoir. Ils financèrent des machinations pour affaiblir l'autorité de Giscard.
Évoquant l'odeur du pétrole, la Françafrique ou encore les dessous sales de la République, elles inspirent invariablement des fantasmes de complots de richesses aussi subites que suspectes. Puis, la justice s'en mêlant, Elf est devenu une "Affaire", touchant les plus hautes sphères de l'État. Mais, aussi et surtout, elle est devenue l'affaire de quelques hommes tombés des ors de la République dans la boue des tribunaux et des tribunes médiatiques : Loïk Le Floch-Prigent, ancien p.-d.g. d'Elf, et Roland Dumas, président du Conseil Constitutionnel.
L'entreprise d'extraction et de distribution pétrolière Elf-Aquitaine a été impliquée dans de nombreuses affaires médiatiques comme par exemple l'affaire des avions renifleurs au début des années 1980 ou le naufrage de l'Erika en 1999.
Ce que l'on nomme l'« affaire Elf » est une vaste affaire politico-financière qui a éclaté en 1994, suite à une enquête de la commission des opérations boursières (aujourd'hui AMF) sur le financement de l'entreprise textile Bidermann par Elf entre 1989 et 1993. L'instruction du juge Eva Joly va rapidement mettre à jour un vaste réseau de corruption. L'entreprise, basée en France, est devenue au fil des fusions un géant du pétrole et aurait bénéficié de la bienveillance de l'exécutif français qui considère l'approvisionnement en pétrole comme un domaine stratégique.
Les volets sont si nombreux dans l'affaire ELF que je n'en choisirai que quelques uns. Nous nous focaliserons sur les personnages clé de l'affaire, à savoir, Loïck Le Floch-Prigent, André Tarallo, Alfred Sirven, Phillipe Jafré, Roland Dumas et Christine Devier Joncourt. Je ne parlerai pas du divorce entre Le Floch et Fatima Belaïd ou l'affaire de la construction d'une raffinerie à Leuna en ex-Allemagne de l'Est et du rachat du réseau pétrolier Minol et le financement par du CDU ou Parti Démocrate Chrétien du chancelier Helmut Kohl.
Mais alors comment ELF est devenu une affaire internationale ? Et surtout, que peut–on en déduire quant à la corruption en France particulièrement ?
Nous nous intéresserons dans un premier temps à expliquer clairement les principales causes de l'affaire ELF pour dans une deuxième partie s'intéresser à la corruption en France.
[...] Mais alors comment ELF est devenu une affaire internationale ? Et surtout, que peut en déduire quant à la corruption en France particulièrement ? Nous nous intéresserons dans un premier temps à expliquer clairement les principales causes de l'affaire ELF pour dans une deuxième partie s'intéresser à la corruption en France. I. Affaire ELF : histoire A. Au départ : Volet Bidermann suivi du volet africain B. A.Sirven, R.Dumas et C.devier Joncours et les frégates de Taïwan C. Les condamnations des principaux prévenus II. La corruption en France A. [...]
[...] Alfred Sirven, en temps qu'ancien conseiller à la présidence d'Elf, avait proposé la médiation du groupe pétrolier. Dans ce cas, le client est l'entreprise Thomson qui n'arrive pas à conclure un marché de vente de frégates militaires à Taiwan. Mais ce dossier rencontre des difficultés de routine car la France n'a jamais reconnu la Chine nationaliste et l'opposition diplomatique de la Chine à la militarisation de Taiwan est toujours virulente. D'autant que plusieurs marchés sont conclus avec la France depuis plusieurs années. Thomson veut lever le veto chinois. [...]
[...] L'ouvrage de L. Le Floch-Prigent peut aussi se lire comme un livre consacré à l'histoire de la V ème République française. Parce qu'il en révèle des fonctionnements confidentiels. À ce titre, il prouve combien un haut responsable blessé peut rompre les règles non-dites quand il estime avoir été trahi et ne plus rien avoir à perdre. Ce livre présente ainsi à la marge une intéressante analyse sociologique des élites, entre ceux qui appartiennent aux grands corps de la République et ceux qui n'en sont pas, comme L. [...]
[...] Bongo, même si je reconnais que j'aurais dû le tenir mieux informé concède l'ancien cadre. Loïk Le Floch-Prigent est PDG d'Elf de 1989 à 1993, mis en examen 33 fois, l'ancien super-patron est soupçonné d'avoir supervisé les détournements. Devant les juges il nie tout et assure n'avoir rien touché. S'il est vrai qu'aucun compte étranger à son nom n'a jamais été découvert, l'enquête démontre qu'il a néanmoins bénéficié de sommes puisées dans les comptes suisses de Sirven. Le Floch entend démontrer que ces virements ont eu lieu à son insu. [...]
[...] Sirven reconnaît avoir embauché C.Devier Joncourt sans en informer son patron. Mais il s'énerve un peu que Le Floch puisse affirmer n'avoir jamais su qu'elle travaillait pour Elf. Christine Deviers-Joncour travaillait pour Elf à travers moi martèle-t-il. Elle me donnait des informations en marge . Elle avait un meilleur accès que moi à Roland Dumas . Sirven se souvient d'une poignée d'épisodes, déjà évoqués en première instance. Un voyage en Chine, un voyage au Qatar, au Cameroun. Roland Dumas est invité à réagir. [...]
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