Jusqu'à l'adoption de la Constitution de la Ve République, la tradition française légicentriste condamnait tout contrôle de la loi, comprise comme « expression de la volonté générale » et votée par le Parlement, représentant de la Nation qui par conséquent ne peut mal faire. Mais aux vues des échecs successifs des IIIe et IVe républiques et de la souveraineté parlementaire, ainsi qu'à l'évidence de ses dérives totalitaires en Allemagne notamment, il est apparu nécessaire aux constituants de 1958 d'instaurer un « organe régulateur de l'activité des pouvoirs publics » (Michel Debré) qui contribue à la mise en place d'un parlementarisme rationalisé en maintenant le Parlement dans le respect de la Constitution.
Ainsi, la naissance du Conseil constitutionnel conditionne la consécration future de l'Etat de droit qui, par la définition d'une hiérarchie des normes, requiert le contrôle de la conformité des lois ordinaires de rang inférieur à celles de rang supérieur, les lois constitutionnelles, norme suprême. Les réformes du début des années 70, que Louis Favoreu qualifie de « révolution juridique et politique », ont profondément modifié la nature du Conseil constitutionnel, au même titre que la pratique, pour en faire à la fois un organe garant des droits et libertés individuelles et l'un des recours offert à l'opposition pour se faire entendre.
Dès lors, parce qu'il fait parti du processus législatif qui fait intervenir des acteurs politiques et partisans mais qu'il s'attache à étudier la constitutionnalité des lois, il apparaît une certaine ambiguïté sur l'action du Conseil constitutionnel : est-il plutôt un acteur juridique ou bien un acteur politique ?
Le rôle du Conseil constitutionnel tel qu'il est défini dans le titre VII du texte de 1958 est celui d'une instance dont la compétence est de juger de la conformité des lois à la Constitution, compétence juridique. Cependant, parce qu'il a le pouvoir d'annuler une loi, il pourrait apparaître comme une instance qui joue un rôle politique.
[...] Ainsi, le Conseil constitutionnel est à la fois acteur juridique et politique, ce dernier dérivant de la pratique et du fait jurisprudentiel. Cependant, l'autodiscipline et la retenue dont font preuve les juges constitutionnels permettent à l'instance de ne pas s'immiscer dans un domaine qui n'est pas de leur compétence, à savoir la mise en place de lois pour leur efficacité selon des choix politiques. De plus, malgré les renversements de majorités et de programmes législatifs qu'a connu notre régime, il ne s'en est pas suivi de revirements jurisprudentiels, ce qui témoigné à la fois de l'indépendance de l'instance, de sa continuité et ainsi donc de sa cohérence et de son autorité. [...]
[...] Ils sont ainsi à l'abri des querelles partisanes. - les membres du Conseil sont également tenus à certaines obligations, comme celle de ne prendre aucune position publique sur les questions ayant fait ou susceptibles de faire l'objet de décisions de la part du Conseil - enfin, pour assurer pleinement son indépendance, le Conseil statue lui- même en cas de manquement de l'un de ses membres aux obligations de réserve. Les membres n'ayant pas respecté ces obligations sont alors tenus de démissionner. [...]
[...] Enfin, il a souvent été reproché au contrôle de constitutionnalité français sa particularité : il se fait uniquement a priori, avant que la loi ne soit promulguée. Par conséquent, les juges doivent délibérer dans un délai d'un mois, dans un contexte d'effervescence parlementaire qui pour certains n'est pas approprié à une étude véritablement objective et détachée de toutes tensions politiques. Cependant, ces arguments avancés ne correspondent pas à la réalité, et les modalités d'action et de nomination du Conseil ne sont pas la cause de sa politisation. Un véritable acteur politique Le Conseil constitutionnel ne joue en fait un véritable rôle politique que d'une ampleur relative. [...]
[...] Cependant, le juge est alors amené à se positionner dans le débat politique dans lequel il peut jouer un rôle en sanctionnant ou non la loi, selon que son interprétation de la Constitution soit large ou bien au contraire restreinte. La jurisprudence du Conseil par ailleurs, influence le pouvoir exécutif qui modifie sa façon de réglementer en fonction des précédents juridiques, mais également le pouvoir législatif, puisque le fait jurisprudentiel peut devenir parfois une menace ou un argument pour soutenir une thèse. La jurisprudence est alors utilisée à des fins politiques. Mais le principal rôle politique du Conseil est celui qu'il a quand il tranche des intérêts de nature partisane. C'est le cas notamment du contentieux électoral. [...]
[...] Le Conseil est véritablement devenu acteur avec la décision du Conseil de 1971 et la révision de 1974. - tout d'abord, l'élargissement considérable du bloc de constitutionnalité en 1971 à la Déclaration des Droits de l'Homme ainsi qu'au préambule de la Constitution de 1946 et aux droits fondamentaux de la République (et plus tard la Charte de l'environnement) a transformé le rôle juridique du Conseil, qui devient alors garant, au-delà de l'équilibre des pouvoirs inscrit dans la Constitution, des droits et libertés individuelles. [...]
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