"La violence est par nature instrumentale ; comme tous les instruments, elle doit toujours être dirigée et justifiée par les fins qu'elle entend servir". Cette définition de la violence de Hannah Arendt , si elle est loin d'exprimer toutes les dimensions et degrés de violence qui peuvent exister, a cependant le mérite d'isoler la violence comme un phénomène explicitement visible et observable, nous permettant d'éviter toute confusion terminologique entre la violence et le pouvoir, la puissance ou même la force. La violence instrumentale est corrélée par ailleurs à une exigence d'organisation, voire d'institutionnalisation, comme l'a souligné Charles Tilly. (...)
[...] Car en effet, il ne pourrait y avoir de compatibilité entre la violence, qui ne repose que sur les instruments qu'elle met à son service et qui se déploie donc indépendamment de l'opinion de ceux sur qui elle s'exerce, et le pouvoir, qui repose intrinsèquement sur l'identification de la collectivité à ce pouvoir, le soutien et l'opinion du plus grand nombre. Le règne de la violence pure s'installe donc quand le pouvoir commence à se dissoudre. Dans le domaine politique, un pouvoir qui se sent affaibli est tenté de compenser cette perte de pouvoir par un accroissement de la violence. En prenant l'exemple de la Terreur, Hannah Arendt dit : La terreur atteint son point culminant lorsque l'Etat policier commence à dévorer ses propres enfants, lorsque le bourreau d'hier devient la victime du jour. [...]
[...] A l'inverse, les officiers nazis entendent à répétition tu tueras si bien que leur conscience élimine toute forme de culpabilité ou de reconnaissance du crime. Les nazis ont ainsi été éduqué (au sens du terme latin ex ducere : conduire hors de soi) à ne plus réfléchir, à séparer leur conscience de leurs actions et donc à intégrer dans leur comportement une forme de violence mécanique. Cela peut nous faire penser au sous-titre quelque peu cynique du film de Stanley Kubrick, Docteur Folamour ou comment j'ai appris à ne plus m'en faire et à aimer la bombe. [...]
[...] Il y a ainsi une relation particulière entre la violence et la sacralité (du pouvoir), la première étant un moyen au service de la deuxième. b. La violence physique au service du pouvoir sacralisé La violence sera analysée ici comme le moyen utilisé pour rendre justice : autrement dit, la violence se manifeste comme un instrument, utilisé en politique, pour expier la transgression des lois établies par le pouvoir. Elle devient alors une façon pour ce pouvoir de réaffirmer son autorité et sa domination sur les individus constituant la communauté, et par la même occasion, de défendre la sacralité des lois en vigueur. [...]
[...] Enfin, nous parlerons de la violence comme moyen justifié non pas pour ceux qui détiennent le pouvoir politique, mais pour ceux qui se retournent contre le pouvoir a. Codification des comportements légitimement violents dans la sphère politique Avec la création du pouvoir souverain qui sort les hommes de l'Etat de nature chez Hobbes, l'individu s'attend à ce que l'Etat soit en mesure de le protéger contre les autres. Avec la création de l'Etat, il existe désormais des valeurs de bien et de mal, de juste et d'injuste : les sujets sont proscrits de décider eux-mêmes de ces valeurs, et doivent donc tenir pour bon et juste ce qui est ordonné par l'Etat et comme mauvais et injuste ce qui est interdit. [...]
[...] XIV Ce qu'il convient au prince de faire en matière d'armée. George Sorel, Réflexions sur la violence Hannah Arendt, La nature du totalitarisme, Paris, Payot p123. [...]
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