Comment l’utopie écologique redéfinit elle la notion de liberté ?

Résumé du document

« Le Prométhée définitivement enchaîné, auquel la science confère des forces jamais encore connues et l'économie son impulsion effrénée, réclame une éthique qui, par des entraves librement consenties, empêche le pouvoir de l'Homme de devenir une malédiction pour lui. »

A l'aube du 21ème siècle, des défis majeurs sont posés aux sociétés humaines. Les questions relatives à la disparition des énergies fossiles, au réchauffement climatique et à tous les effets qu'ils entraînent occupent désormais tous les esprits. Les problèmes rencontrés concernent l'ensemble de la planète et la nécessité d'une action collective pourrait déboucher sur une réussite cosmopolite. Car la résolution de ces défis ne pourra se faire que de façon multilatérale. D'où l'importance du dialogue entre Etats, de la circulation de l'information et du partage des technologies. Une citation de Charles Elton, biologiste anglais, explicite bien le sujet : « Il est certes important de gérer l'avenir de la planète, mais plutôt qu'à une partie d'échecs, c'est à la conduite d'un navire que cette tâche devrait être comparée » . Car la partie d'échec qui se joue actuellement à plusieurs degrés, au niveau individuel, interétatique et surtout entre l'homme et la nature ne peut que déboucher sur une crise planétaire ahurissante.

En effet, un récent rapport du PNUD est extrêmement alarmiste quant à l'évolution humaine (voir annexe). Les limites de la planète sont désormais connues. Malgré le développement d'énergies alternatives, une grande partie du système économique mondial risque d'être bouleversée par la hausse des prix des matières premières (pétrole, céréales). Même la gestion et le partage du bien vital qu'est l'eau annonce des conflits d'ampleur.
Notre étude ne se veut pas catastrophique, ni pessimiste envers le futur. Le risque d'un avenir désastreux résulterait d'une inertie qui n'est pas imaginable. En effet, la conférence internationale de Bali sur le climat tenue début décembre témoigne d'un intérêt politique pour la question.

Il s'agira donc d'envisager les éventuelles solutions qui s'offrent à nous et de voir quels impacts celles-ci induiraient sur les sociétés occidentales. Notre étude s'intéressera particulièrement à l'œuvre du philosophe allemand Hans Jonas, auteur du célèbre « Le principe responsabilité ». C'est un ouvrage visionnaire complexe qui pose la question de la durabilité du modèle actuel de développement. Cette œuvre contient une importante réflexion philosophique sur l'homme qu'il conviendra de présenter. De plus la question de la technique est abordée. Le progrès technologique humain doit être repensé sur de nouvelles bases. Celui-ci doit aller de paire avec l'impératif premier de l'homme qu'est la préservation. La puissance de la recherche humaine doit être orientée selon un sens éthique.

Extraits

[...] Car l'utopie mondiale de développement que représente le modèle capitaliste occidental est dépassée. Ce modèle n'avait jamais été pensé en terme de durabilité, car la question ne s'était jamais imposée aux circonstances. Pendant plusieurs milliers d'années, l'homme découvrait toujours de nouveaux territoires, de nouvelles richesses matérielles. La productivité paraissait infinie. Cette utopie est désormais contredite par la vitesse de dégradation de notre habitat naturel et les menaces de récession mondiale. C'est ici qu'intervient l'utopie écologique. Contrairement au capitalisme sauvage qui domine, elle reconnaît la dépendance de l'homme à son milieu naturel. [...]

[...] L'une des conséquences de ce conflit interne se retrouve dans la relation de l'homme à la nature. L'homme, par la conscience de son esprit et de ses capacités, se sent supérieur à la nature et affiche un certain mépris de celle-ci qu'il ne considère que comme un instrument au service de sa puissance. Il convient de réconcilier notre Etre avec lui-même : C'est sous cet aspect terriblement pratique que la réconciliation de notre Etre séparé se trouve au centre de notre préoccupation philosophique Car cette opposition nous aveugle quant aux effets de l'action humaine sur l'environnement. [...]

[...] D'où le rôle essentiel que le politique doit jouer, afin d'influencer les mentalités, voire même interdire certains comportements dont les effets négatifs étaient jusqu'ici ignorés. Il est certain que l'utopie écologique n'a pas pour objectif l'imposition d'un Etat autoritaire, qui restreindrait brutalement les individus dans l'exercice de leur liberté. En effet, nous attendons de l'homme qu'il réalise de lui-même les limites qu'il doit se fixer. Il consentirait de lui-même à renoncer à certaines prérogatives dès lors qu'il aurait conscience des catastrophes que l'exercice de celle-ci pourrait provoquer. Bien évidemment, cela suppose que l'Homme soit doté d'une morale et d'un altruisme. [...]

[...] La liberté humaine ne pouvait se limiter à ce qui n'avait été pensé. Evidemment, pour l'époque c'était déjà une grande avancée. Mais les effets pervers ont été que, par la suite, on a érigé ce texte en modèle alors qu'il était incomplet. On prônait le respect des droits et des libertés de l'homme sans réaliser que l'exercice de ces libertés devait être accompagné d'une responsabilité propre à tout être rationnel et informé des conséquences de son agir. Car aujourd'hui, la liberté humaine se menace elle-même. [...]

[...] L'environnementalisme libéral est une blague qui ne fait qu'endormir notre conscience En effet, c'est un projet politique qui se réduit à constituer l'artifice d'une nature reconstituée, avec la création de parcs naturels, la sauvegarde d'espèces rares Le problème c'est que cette vision de l'écologie ne remet pas en cause le capitalisme sauvage destructeur et les configurations sociales qui le servent. Il y a ensuite l'écologie réformiste étatique. Elle entend redonner plus de sens à l'Etat dans la défense de l'environnement par une étatisation générale de la société. L'interventionnisme de l'Etat doit se situer à tous les niveaux, à commencer par l'économie. La gestion des ressources, du salariat et du marché a vocation à être nationalisée. [...]