Né en 1892 près de Zagreb, Josip Broz –il deviendra Tito en 1934- est croate par son père et slovène par sa mère. Apprenti forgeron à 15 ans, métallurgiste syndiqué à 18, sous-officier dans l'armée impériale, il se bat en 1914 contre les Serbes. L'année suivante, il est sur le front russe, où il est fait prisonnier. Cela lui permet d'assister en direct à la révolution russe. De retour à Zagreb en 1920, il alterne militantisme au PC illégal et séjours en prison. En 1935, Tito est à Moscou, au Komintern. Dimitrov le nomme en 1939 secrétaire général du PC yougoslave. Il ne rencontrera Staline pour la première fois qu'en septembre 1944. Après l'attaque nazie contre l'URSS, deux mois après l'invasion de la Yougoslavie, le Parti communiste yougoslave se lance dans un double combat : contre les Allemands, auxquels les partisans infligent de durs revers, et contre le mouvement rival des tchetniks serbes de Draza Mihajlovic, représentant du gouvernement royal exilé à Londres. 1943 est l'année charnière : Tito reçoit l'appui de Churchill, Staline et Roosevelt réunis à Téhéran. Il prend tout naturellement la direction du gouvernement de la Yougoslavie, libérée en mars 1945. Il en est président en 1953, tout en restant chef du parti, deux fonctions qui lui seront reconnues à vie dans les années 1970. Tito a donc mêlé sa vie à celle de la Yougoslavie pendant plus de trente ans. Ainsi, le terme de titisme est apparu pour identifier sa politique. Toutefois, cette expression a tout d'abord été utilisée par Staline pour qualifier les « révisionnistes ». On peut donc s'interroger sur la réalité du titisme, tant sur le plan doctrinaire que pragmatique. On s'attachera dans une première partie à clarifier les conditions d'émergence du titisme, révélatrices de sa nature même. On explicitera ensuite la volonté doctrinaire du titisme qui est sa force, puis la réalité pragmatique d'une politique qui pêchera justement par ses faiblesses.
[...] En 1935, Tito est à Moscou, au Komintern. Dimitrov le nomme en 1939 secrétaire général du PC yougoslave. Il ne rencontrera Staline pour la première fois qu'en septembre 1944. Après l'attaque nazie contre l'URSS, deux mois après l'invasion de la Yougoslavie, le Parti communiste yougoslave se lance dans un double combat : contre les Allemands, auxquels les partisans infligent de durs revers, et contre le mouvement rival des tchetniks serbes de Draza Mihajlovic, représentant du gouvernement royal exilé à Londres est l'année charnière : Tito reçoit l'appui de Churchill, Staline et Roosevelt réunis à Téhéran. [...]
[...] L'"unité et fraternité" des peuples yougoslaves, principal acquis de la Révolution de Tito devient alors un dogme auquel il était interdit de toucher. Aucune réforme ne sera possible sur les rapports entre les nationalités. Avec le recul du temps, il apparaît clairement que la période 1945-65 a été la seul période relativement calme dans les relations entre les diverses nations de l'Etat yougoslave. Il est vrai qu'il s'agit d'un calme forcé dans le cadre d'un régime aux méthodes staliniennes, mais le relâchement de la pression du régime se traduit par la suite par le réveil des conflits entre nations. [...]
[...] Il suppose la combinaison d'un modèle intérieur officiellement "socialiste autogestionnaire" et extérieur "non aligné", mais assorti ou corrigé par le maintien d'un léninisme très ferme. Vaccinée contre le dogmatisme en 1948, la Yougoslavie n'élaborera jamais un modèle En effet, la rupture de 1948 a représenté un défi. Or l'identité communiste en Yougoslavie ne s'est jamais remise de l'inconfort existentiel, transposé en instabilité idéologique dans cette idéocratie, créée par cette rupture. Cette différenciation idéologique plus que pratique, avec l'URSS, cette posture "anti-impérialiste" et anti-occidentale, politique plus qu'économique, exprime une certaine vérité du titisme. [...]
[...] La nécessité d'une relégitimation dans le cadre de la référence communiste aboutira à l'invention de la Yougoslavie autogestionnaire de 1950, qui sera l'identité officielle de la Yougoslavie titiste aux yeux de l'histoire. Tito crée ainsi la première brèche dans le monolithisme du mouvement communiste. Après avoir digéré le choc de leur excommunication, les dirigeants yougoslaves sont amenés à réfléchir sur le communisme inspiré par Moscou qu'ils ont pratiqué jusque là. Ils vont justifier leur politique sur le plan idéologique en dénonçant les erreurs de la pratique stalinienne. Marx n'a-t-il pas prédit le dépérissement de l'Etat ? [...]
[...] Tito et ses collaborateurs ne se laissent pas impressionner par cette excommunication. Alors que Staline mène la dispute sur le plan des rapports entre partis, ils la mettent systématiquement sur celui des relations internationales. A la discipline communiste, ils opposent la souveraineté nationale. Pour Staline l'exclusion de la clique titiste permettra de mettre de l'ordre dans les rangs ailleurs, mais, loin de faire tomber son chef, elle en fera le phare d'un révisionnisme inquiétant. Pour l'Occident, la Yougoslavie est un cas aberrant, une anomalie. [...]
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