Terreur, totalitarisme, Hannah Arendt, Allemagne nazie, Platon, régime totalitaire, Dallin et Breslauer, Juan Linz, Mussolini, Raymond Aron, URSS, Pinochet, libre-arbitre, pouvoir légitime, sciences politiques, idéologie totalitaire
C'est la question que se pose Hannah Arendt dans le chapitre "Idéologie et terreur" du système totalitaire. Elle apporte une première définition du totalitarisme : "Une forme de gouvernement dont l'essence est la terreur et dont le principe d'action est le caractère logique de la pensée idéologique", Le système totalitaire. Dans Le Larousse, l'essence est définie comme : "la nature propre à un être, ce qui le constitue fondamentalement". Le concept de totalitarisme désigne l'Allemagne d'Hitler et la période stalinienne en URSS (de 1929, mais on pourrait commencer en 1924 avec la mort de Lénine, à sa mort en 1953). On intègre parfois la Corée du Nord. Cependant, nous verrons qu'il peut y avoir une controverse pour savoir si ce concept englobe l'URSS et l'Allemagne nazie, si c'est un concept unique ou si on devrait parler de totalitarismes. Le concept de terreur suffit-il à forger l'essence du totalitarisme ?
[...] On a donc une contradiction logique avec l'idée que la terreur est à elle seule l'essence du totalitarisme. En effet, cela reviendrait à dire qu'un régime mettant en place la terreur est nécessairement totalitaire, ce qui n'est pas le cas. La mise en place de la terreur est alors une condition, certes nécessaire, mais absolument pas suffisante pour dire d'un régime qu'il est totalitaire. Nous allons donc rechercher les conditions permettant de dire qu'un régime est totalitaire. Pour Raymond Aron par exemple, dans Démocratie et totalitarisme, le régime totalitaire est avant tout un régime de parti monopolistique. [...]
[...] La terreur est alors un élément constitutif de l'essence du totalitarisme, au même que ceux que nous venons d'énoncer. Un totalitarisme ou des totalitarismes ? L'analyse d'Arendt se concentre sur une comparaison entre l'Allemagne nazie pendant les dernières années de la guerre entre 1941 et 1945, et entre l'URSS entre 1934 et 1937, pendant les grandes purges. Pour Raymond Aron, s'il existe bien des similitudes, notamment dans la mise en place de la terreur politique durant ces périodes, les deux régimes diffèrent de manière essentielle. [...]
[...] On peut ajouter une dernière différence, de nature historique : le régime soviétique naît d'une révolution et a pour but de créer une société plus humaine. Au contraire, le nazisme est issu de la volonté de refaire l'unité morale allemande, et d'élargir le territoire alloué à ce peuple, soit en faisant des conquêtes, soit en exterminant ceux qui ne devraient pas occuper ce territoire. Il est alors peut-être plus pertinent de différencier l'Allemagne nazie et l'URSS, et donc de parler de totalitarismes. [...]
[...] Le cercle de fer mis en place par la terreur mène à un isolement de l'homme dans la sphère politique, la désolation. Non seulement l'homme est isolé, il n'a personne pour agir avec lui, mais il est en plus « désolé » c'est-à- dire qu'il « se sent à l'écart de toute société humaine ». Tout libre arbitre est donc rendu impossible, toute forme d'action contraire au principe d'action de l'idéologie est impensable. La terreur permet donc au régime totalitaire d'exister. [...]
[...] La force de l'idéologie est de présenter aux individus une cohérence et une rigueur théorique qui ne peut exister dans la réalité. Le propre du régime totalitaire, c'est de faire exploser la distinction classique entre un régime sans lois soumis à un pouvoir arbitraire et un régime avec des lois soumises à un pouvoir légitime. En effet, le régime totalitaire se donne des lois, mais surtout n'est en rien arbitraire, soumis à la volonté d'un seul homme, dans son principe d'action puisqu'il prétend obéir à une loi supérieure, une force surhumaine qui amène non pas au succès d'un homme ou d'un groupe, mais à la réalisation du genre humain. [...]
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