Le système totalitaire, Une société sans classes, Chapitre premier, Hannah Arendt, homme de masse, mise en place des régimes totalitaires
En rédigeant son ouvrage Les origines du totalitarisme (1951), qui comprend trois tomes ( Sur l'antisémitisme, L'impérialisme, et Le Système totalitaire) Hannah Arendt se donne comme objectif d'analyser la naissance des deux régimes stalinien et nazi : ce terrain d'analyse politique était alors encore vierge, peu d'auteurs s'étant déjà penchés sur le sujet. Dans cet extrait, Arendt se penche sur le paramètre des masses, qui est selon elle le terreau sur lequel a pu croître le phénomène totalitaire, qui fonde sur elles son apparition, mais aussi son organisation.
Elle part de l'idée selon laquelle les masses sont l'interlocuteur politique principal des mouvements totalitaires : contrairement à ce qu'ont pensé nombre d'observateurs, la relation qui les lie n'est pas unilatérale (seule soumission des masses au mouvement totalitaire), mais donne naissance à une forme complexe de réciprocité ; les masses, en étant la cible privilégiée des mouvements totalitaires, adhèrent bientôt à ces mouvements et tolèrent passivement les crimes commis. Dès lors, le problème principal est de savoir comment ces masses ont-elles pu adhérer aux mouvements totalitaires. Arendt définit d'abord précisément les masses, puis « la psychologie de l'homme de masse », et enfin en quoi ces caractères ont favorisé la montée et la concrétisation des mouvements totalitaires.
[...] Les mouvements totalitaires ont pour but d'embrigader leurs membres et de leurs faire perdre toute notion d'individualisme. L'identité individualiste doit disparaitre. La psychologie de l'homme de masse européen (qu'est ce qui constitue cette psychologie - Une atomisation de la société et une individualisation extrême permirent aux mouvements de masses de se développer. Les deux principales caractéristiques de l'homme de masses sont donc un isolement presque total et un manque de rapports sociaux normaux. - Les individus formant les masses se jugent uniformément en termes d'échec individuel et on observe un repli sur soi de chaque individu. [...]
[...] Les problèmes quotidiens ne semblaient pas les intéresser, elles se repliaient sur des problèmes d'ordre idéologique formation d'une mentalité qui pensait en siècle et en continents (Cecil Rhodes) II) Les conditions spécifiques d'une masse atomisée et individualisée ont permis aux régimes totalitaires de naitre Les masses comme tremplin pour la mise en place des régimes totalitaires En mettant en mouvement les masses, les leaders totalitaires ont mis fin à deux grandes illusions concernant la démocratie - Dans un système démocratique, l'idéal réside dans le fait que chaque citoyen est détenteur du pouvoir et chaque citoyen est donc tenu de participer à la vie politique en adhérant par exemple à un parti politique. Les mouvements totalitaires ont démontré le contraire. En effet, en prenant appui sur les masses politiquement neutres et inactives, ils ont prouvé que ces dernières représentaient la majorité de la population et que par conséquent, le régime démocratique ne fonctionnait que selon des principes reconnus par une minorité de la population. - La seconde illusion voulait que les masses ne représentaient aucune espèce d'importance au sein d'un Etat démocratique et ne détenaient aucun pouvoir réel. [...]
[...] En effet, le programme politique du parti bolchevik était plus important à la base que le programme du petit parti nazi. Sa stratégie consista a faire constamment changer la ligne directrice du parti communiste en vidant ainsi la doctrine marxiste de tout son contenu. - Cela montre que les mouvements totalitaires sont aussi caractérisés par leur aspiration au mouvement perpétuel et leur vocation à toujours viser leur objectif sans jamais l'atteindre. Selon leurs idéologies, les mouvements totalitaires sont censés parvenir à un idéal utopique, mais cet accomplissement reste éternellement futur. [...]
[...] Le recrutement des masses aisées pour les dirigeants totalitaires - Les leaders totalitaires recrutaient leurs adhérents et leur soutien dans les masses, auparavant politiquement neutres. Les mouvements totalitaires se plaçaient donc en dehors de la sphère politique normale constituée par les partis politiques et ils étaient à même de mettre en place des méthodes de propagande nouvelles en restant totalement indifférent aux opposants politiques. Il n'existait aucune compétition politique sincère avec les autres partis. - Les masses étaient hostiles à tous les autres partis donc elles étaient naturellement poussées vers les partis totalitaires qui eux aussi ignoraient et méprisaient la logique des partis politiques normaux. [...]
[...] - Lorsque Staline voulut préparer le pays au régime totalitaire, il entama une déstructuration de la société, une liquidation des classes en commençant par les classes possédantes (classe moyenne dans les villes et les paysans dans les campagnes) puis la classe ouvrière, la bureaucratie et enfin les hauts fonctionnaires de la police par le biais de famines provoquées et de déportations extrêmement nombreuses (millions de morts et d'esclaves déportés). On peut toujours éliminer une classe en assassinant un nombre suffisant de ses membres Ainsi, les individus rescapés comprenaient peu à peu que leur vie et celle de leur entourage dépendait entièrement des humeurs du régime devant lequel ils étaient seuls et ne pouvaient demander de l'aide aux personnes autour. - Il faut savoir qu'aucune de ces classes sociales ne présentaient d'opposition au régime en place. Il n'y avait plus d'opposition en URSS depuis les années 1930. [...]
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