Ce que les dirigeants perçoivent comme une menace dans l'abstention est liée à leur légitimité propre à exercer le pouvoir politique : lorsqu'un individu est élu parfois que par la moitié des électeurs potentiels, peut-on toujours dire qu'il est le « représentant du peuple » ? A l'heure où l'on parle d'un « déficit démocratique » national et à plus forte raison, européen, les élections remplissent-elles toujours leur fonction d'expression de la volonté populaire ? Dans le cas contraire, quel serait alors leur véritable objet ?
[...] Le suffrage universel permet-il de représenter réellement le citoyen ? Introduction De la rencontre de Yalta en 1945 à l'ouverture du bloc soviétique dans les années 90, les principes d'élections libres et de suffrage universel n'eurent de cesse d ‘être présentés comme les garants de la démocratie et du libéralisme politique. C'est également dans cette optique que furent menés les combats fondamentaux de l'histoire politique française : que l'on pense à la Révolution de 1789, de 1848, ou à la Commune de 1871, le suffrage universel dans chaque cas, a représenté l'une des toutes premières, sinon la première des revendications des insurgés. [...]
[...] La volonté politique est en effet apparemment proportionnelle à l'enjeu conféré aux élections. Celui-ci dépend de deux facteurs : l'espace géographique considéré ainsi que le pouvoir reconnu au(x) dirigeant(s) élu(s). On pourrait alors dire que la volonté politique renvoie à la question de la visibilité de l'action politique. Ainsi, en moyenne, celle-ci est inversement proportionnelle à la taille de la zone où agira le dirigeant (exception faite des présidentielles, où le pouvoir présidentiel reste identifié). A l'échelle européenne, le Parlement européen, éloigné des citoyens, géographiquement ainsi qu'en terme de pouvoir (mal repéré), souffre ainsi d'une profonde abstention lors des élections européennes. [...]
[...] Mais dès lors, comment sortir de l'impasse ? Faut-il pour autant conclure que les élections politiques ne servent plus à rien ? Incapables d'unifier le territoire, éloignant les citoyens du monde politique et condamnant, par l'enjeu qu'elles représentent, les dirigeants à la prudence, voire à la réserve, les élections au suffrage universel sont-elles cependant elles- mêmes les causes de la désaffection des urnes ? Les enjeux du suffrage universel Dans son expression même, l'objectif du suffrage universel es t problématique. [...]
[...] Enfin, le suffrage universel est un moyen de contrôle social. Si le vote permet d'établir des lois conformes aux aspirations des citoyens, il est alors d'autant plus facile de les y soumettre ; et ce, en vertu d'un constat évident : il est assurément moins opprimant de se soumettre à une loi que l'on s'ait soi-même prescrite que d'accepter l'autorité d'une règle extérieure. Certains, tels Rousseau ou Emmanuel Kant considéreront même cette loi comme condition de la liberté véritable Les objets du suffrage universel Le vote peut avoir deux objets : les lois ou les dirigeants. [...]
[...] C mais des conséquences à long terme l'attitude des individus envers la sphère politique, en favorisant notamment la proximité certes intellectuelle- entre eux et le monde politique. A cet égard, l'on assiste à une sorte de sacralisation des élections qui par là, constituent plus qu'une croyance, un véritable rituel. C'est dans cette optique que certains sociologues ont pu voir dans le suffrage universel, un facteur de réactivation du lien social, c'est-à-dire un outil de socialisation. En effet, le rendez-vous dominical aux urnes permet à l'électeur de se sentir membre à part entière, acteur de la société dans laquelle il évolue. [...]
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