Il faut essayer de mener une sociologie des acteurs administratifs de façon à dépasser la double approche juridique et politique de l'administration qui n'est pas totalement satisfaisante lorsque l'on étudie les prises de décision. Par acteurs administratifs, j'entends surtout ici ce qu'on appelle la haute administration ou également le milieu décisionnel central. L'expression est de C. Grémion.
D'une perspective juridique à une réalité pratique
Par approche juridique et politique, il faut considérer une double conception instrumentale du travail de l'administration. Tout d'abord, l'administration est présentée comme subordonnée juridiquement puisque son action est encadrée par des règles. Elle produit du droit mais de manière dérivée puisque cette compétence lui est octroyée par les autorités politiques (...)
[...] Cela peut marcher mais on peut constater aussi que les arbitrages dictés par des considérations d'ordre politique sont très nombreux et mettent en cause l'idée trop simple selon laquelle ce sont les hauts fonctionnaires qui nous gouvernent. J'ajoute enfin que bien qu'influents et compétents, les fonctionnaires dépendent largement des politiques pour leurs déroulements de carrière : un fonctionnaire qui jouerait trop visiblement au politique ou qui chercherait par trop à s'y substituer court le risque de voir sa carrière remise en cause. A l'inverse, une carrière de fonctionnaire fidèle sera facilitée. [...]
[...] Bodiguel et de J-L. Quermonne, ce profil du fonctionnaire influent et politique se retrouverait principalement parmi les membres des grands corps qui auraient eu une ou plusieurs expériences dans les cabinets ministériels Des différences de contextes nationaux Ce que je viens de dire du cas français doit être mis en perspective avec d'autres configurations nationales. En Italie par exemple, l'administration d'Etat est certes autonome sur un plan professionnel mais elle ne joue presque aucun rôle dans la définition des politiques publiques qui relèvent très largement du travail de commissions parlementaires thématiques. [...]
[...] La compétence, quant à elle, permet d'exercer une influence directe sur les décisions : les hauts fonctionnaires maîtrisent les données techniques des dossiers, ils exercent un quasi monopole sur les fonctions d'expertise et ce quasi monopole est en soi une source de pouvoir. Même si ces ressources sont à la base des concurrences entre administrations, elles permettent aussi à celles-ci de fonctionner comme une force politique autonome, ce que J. Chevallier appelle la techno-bureaucratie. L'administration dispose donc en théorie d'une forte capacité d'influence mais celle-ci est variable selon le type de relations qui existe entre fonctionnaires et élus. Ce qui prime c'est la proximité entre les deux groupes. [...]
[...] Il faut essayer de mener une sociologie des acteurs administratifs de façon à dépasser la double approche juridique et politique de l'administration qui n'est pas totalement satisfaisante lorsque l'on étudie les prises de décision. Par acteurs administratifs, j'entends surtout ici ce qu'on appelle la haute administration ou également le milieu décisionnel central. L'expression est de C. Grémion. D'une perspective juridique à une réalité pratique Par approche juridique et politique, il faut considérer une double conception instrumentale du travail de l'administration. Tout d'abord, l'administration est présentée comme subordonnée juridiquement puisque son action est encadrée par des règles. [...]
[...] Ce qui semble déterminant sur un plan général c'est d'avoir une double légitimité administrative et politique. Plus précisément les hauts fonctionnaires dont on peut dire qu'ils exercent effectivement une influence directe sur la production des décisions publiques cumulent des ressources bureaucratiques passage par une grande école, appartenance à un grand corps technique ou administratif, carrière dans la fonction publique marquée par le passage dans plusieurs administrations différentes et attestant donc d'une expérience généraliste et des ressources de nature para-politique proximité attestée avec un leader politique sans avoir sa carte, appartenance même symbolique au syndicat de son administration ou à la section d'un parti politique, appartenance à des associations liées à des formations politiques, participation à des groupes de réflexion réunissant politiques et fonctionnaires On est en réalité pas très éloigné là de la figure du fonctionnaire militant mais avec un militantisme discret, peu affiché mais tout de même suffisamment pour que l'on sache que le haut fonctionnaire en question est plutôt de gauche ou plutôt de droite. [...]
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