Le thème d'une Constitution pour l'Union Européenne a – dans le passé récent de la construction européenne – été longtemps considéré comme un tabou, qui n'a été brisé qu'assez tard dans les sphères politiques. En effet, Joschka Fischer est en général cité comme l'un des premiers à avoir repris cette idée, en mai 2000. La traduction officielle de cette préoccupation est intervenue au sommet de Laeken, puisque la déclaration finale reprend le terme même « Constitution ». En décembre 2000, le Conseil européen de Nice a décidé de prévoir une nouvelle révision des traités en 2004, année de l'élargissement. Une Déclaration annexée au Traité de Nice prévoyait un débat sur l'avenir de l'Union européenne autour de quatre sujets principaux: la simplification des traités, la délimitation plus précise des compétences entre les États et l'Union européenne, le statut de la Charte des droits fondamentaux et le rôle des Parlements nationaux, thèmes qui devaient être traités lors d'une Conférence intergouvernementale par la suite. Cette réflexion sur l'avenir de l'Union européenne a alors engendré la convocation d'une Convention rassemblant les principales parties prenantes au débat. Alors que son mandat ne lui imposait que « d'examiner les questions essentielles que soulève le développement futur de l'Union et de rechercher les différentes réponses possibles », la Convention a choisi d'interpréter sa mission dans un sens plus large, de rédaction d'un texte le plus cohérent possible, texte qui est devenu un « traité instituant une Constitution pour l'Europe ».
Les échecs des référendums français et néerlandais les 29 mai et 1er juin derniers ont mis en lumière certaines opinions défavorables des citoyens européens concernant l'Union Européenne. En effet, loin de se cantonner à une discussion sur les réformes envisagées par le projet de constitution – mais en laissant ici de côté l'utilisation des référendums pour des sujets de politique nationale –, les débats référendaires ont remis sur le tapis bien des aspects de la construction européenne que l'on croyait acquis, qu'il s'agisse de l'élargissement ou de l'idée même d'un marché intégré. Suite à cela, le Conseil européen de juin 2005 a montré l'incapacité pour les États européens de s'entendre sur une lecture commune de la situation, il a été décidé de laisser à chaque pays le soin de décider s'il entend continuer le processus de ratification.
L'avenir constitutionnel paraît alors tout à fait incertain. C'est pour cette raison que le Conseil européen de juin 2005 a déclaré l'ouverture d'une période de réflexion commune. « Cette période de réflexion sera mise à profit pour permettre un large débat dans chacun de nos pays associant tant les citoyens, la société civile, les partenaires sociaux, les parlements nationaux, que les partis politiques. Ce débat mobilisateur, qui est déjà en cours dans bon nombre d'États membres, doit être intensifié et élargi. Les institutions européennes devront également y apporter leur contribution; un rôle particulier revient dans ce contexte à la Commission. » Il fixe également un rendez-vous au premier semestre 2006 « afin de procéder à une appréciation d'ensemble des débats nationaux et de convenir de la suite du processus ».
Il est vrai que le Premier ministre belge Guy Verhofstadt avait observé que la pause de réflexion paraissait plutôt une sieste. Mais il semble que depuis quelques temps, notamment depuis l'arrivée au pouvoir d'Angela Merkel en Allemagne et surtout le début de la présidence autrichienne, les choses bougent et les prises de position se multiplient. Si ces interventions et les initiatives prisent à l'heure actuelle concerne plutôt l'avenir du texte en cours de ratification au sein de l'Union Européenne, il convient de s'attacher à une question plus large, concernant le concept plus général de constitution commune au sein de l'Union. Ainsi, on peut se demander comment sensibiliser les Européens à la nécessité d'une constitution commune. Il s'agit alors d'étudier, dans un premier temps, la nécessité d'une telle constitution et l'opinion des citoyens européens sur cette question, pour, dans un second temps, envisager les méthodes et les solutions de sensibilisation des citoyens européens.
[...] Peut-il en être autrement? Bibliographie Ouvrages Augeri, P. & Magnillat, M.P.: Enjeux et rouages de l'Europe actuelle Culture et citoyenneté européennes. Paris, Les éditions Foucher, FEDE Bossuat, Gérard: Les fondateurs de l'Europe unie. Paris, Belin COMECE : À la hauteur de ses responsabilités mondiales et de ses citoyens Défis pour une Europe unie. Louvain-la-Neuve, Bruyant- Academia Dehousse, Renaud: La fin de l'Europe. Paris, Flammarion Dehove, Mario (dir.): Le nouvel état de l'Europe Les idées-forces pour comprendre les nouveaux enjeux de l'Union. [...]
[...] C'est pourquoi, que l'on parle de ce texte en particulier, ou d'un texte constitutionnel en général auquel on peut éventuellement donner un autre nom pour éviter les polémiques invoquant le caractère forcément national et étatique d'une constitution il semble qu'un texte d'une portée de cette importance serait, sinon une nécessité, un réel bénéfice pour l'Union Européenne Le paradoxe de l'opinion des citoyens européens Dans un travail sur une constitution commune au sein de l'Union Européenne et sur le lien avec les citoyens, il convient d'évoquer le dernier eurobaromètre de l'Union[5]. Celui-ci témoigne d'un certain paradoxe qui n'en est peut-être pas un dans l'état actuel de l'opinion des citoyens européens. En effet, malgré les échecs des référendums français et néerlandais concernant la ratification du traité instituant une constitution pour l'Europe, l'idée même d'une Constitution européenne recueille toujours un large soutien. Ainsi des citoyens européens soutiennent le concept d'une constitution pour l'Union européenne, et s'y opposent. [...]
[...] Tout projet quant à l'avenir de l'Europe doit, en effet, être assis sur une vision claire des besoins et des attentes des citoyens. Ce Plan D s'inscrit dans la lignée du plan de communication de la Commission, du livre blanc sur la transparence et s'articule avec le prochain livre blanc sur la stratégie de communication et la démocratie. Ces initiatives constituent des éléments d'une stratégie plus globale visant à relancer la démocratie européenne et à contribuer à l'émergence d'une sphère publique européenne, au sein de laquelle les citoyens recevraient les informations et outils dont ils ont besoin pour participer activement au processus décisionnel et pour s'approprier le projet européen Cela renvoie donc aux problèmes, évoqués plus haut, de la critique régulière de déficit démocratique et de transparence au sein de l'Union européenne. [...]
[...] Dans ce cadre, pour ne prendre qu'un exemple de réception dans un État membre mais pour lequel il faudra également, dans les mois à venir, observer la mise en place de stratégies conséquentes on peut citer les mots de Catherine Colonna, ministre délégué aux affaires européennes: Mais il ne suffit pas d'être clair sur ce que nous voulons faire. Encore faut-il savoir l'expliquer. En 2006, le gouvernement veillera à mieux associer le Parlement et les Français à la construction européenne, comme ceux-ci le souhaitent et comme l'a demandé le président de la République. [...]
[...] Conclusion La question de savoir comment sensibiliser les citoyens européens à la nécessité d'une constitution commune suscite donc un débat beaucoup plus large concernant notamment les questions de sentiment d'appartenance des citoyens à l'Union ainsi que de démocratie et de transparence au sein de l'Union. Je ne me suis donc pas attachée, ici, uniquement au cas du texte du traité instituant une Constitution pour l'Europe actuellement en cours de ratification au sein des États membres, mais à celui, plus large, d'une constitution, quelle qu'elle soit, au concept même de constitution et non à son contenu. [...]
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