« Agence publique historiquement pro-OGM. Fuite organisée d'un rapport soi-disant secret (…) Coup bas des lobbies biotechnologiques visant à affaiblir M. Borloo » Ces mots très violents de Greenpeace faisant suite de la publication d'un rapport tenu jusque-là secret de l'AFFSA sur le maïs MON 810 révèle les difficultés actuelles des procédures d'expertises qui font face à un nombre croissant de controverses. Manque d'indépendance, manque de transparence, instrumentalisation politique : les critiques de Greenpeace sont vives et nous rappellent celles des années 90. Comme si, finalement, rien n'avait été entrepris.
Pourtant, il semble que des progrès notables aient été réalisés, progrès faisant d'ailleurs consensus : création d'agences indépendantes, rédaction de chartes déontologiques, ouverture progressive à la société civile, etc. Mais comment définir l'expertise ? Pour reprendre les mots de Philippe Roquelpo, l'expertise ne peut se définir comme une simple expression de connaissances.
Il s'agit d'une production de connaissance en vue d'une action. Mais cette définition, loin d'épuiser le sujet, ne fait que poser le problème des conditions de production de cette connaissance. Ainsi, la situation de l'expertise semble donc paradoxale, celle-ci étant balancée entre progrès réels et crise perpétuelle ce qui doit donc nous pousser à nous interroger sur la nature de cette crise : est-elle réellement unique ? Arrive-t-elle à son terme ? Quelle est sa gravité ?
[...] Face à cette question de l'évaluation, se pose celle de la responsabilité de l'expert. Le problème qui se pose alors est issu de deux constats : en premier lieu celui d'une exigence de plus en plus accrue de la part de la société de trouver des responsables, voire des coupables, et en second lieu le lien direct existant entre responsabilité et sanction. On voit donc clairement une difficulté émerger : si l'expertise déjà peu reconnue dans la carrière d'un chercheur, doit désormais impliquer des responsabilités et donc de potentielles sanctions, le chercheur n'a plus aucun intérêt à se tourner vers l'expertise et nous risquons alors de devoir faire face à une véritable pénurie d'experts au moment même où nous faisons de plus en plus appel à eux. [...]
[...] On voit bien là l'impact des médias sur l'évolution des pratiques de l'expertise et du PDP. En effet nombre de décisions sur des problèmes environnementaux ont un tel poids économique qu'il est inenvisageable qu'un pouvoir politique quel qu'il soit puisse toujours prendre les décisions qui s'imposent. Le pouvoir des gouvernants est nécessairement limité, et ce par les conditions mêmes de leur accès au pouvoir. Ainsi, s'ils prétendent prendre des décisions qui dépassent la légitimité que la population leur donne, ils sont remplacés. [...]
[...] A ce modèle ancien tend à se substituer un modèle d'expertise collective, contradictoire, transparente répondant à la nécessité de la mise en place d'une culture de la précaution. Réactivité du système et fonction de vigilance Cette culture de la précaution doit en premier lieu permettre une grande réactivité du système Ainsi la loi de 1998 dévolue à un système d'agences la fonction de vigilance/ de veille, qui repose sur le réseau des professionnels. Ce mécanisme permet l'émergence rapide des alertes et réduit ainsi considérablement le temps nécessaire à la mise en place de réponses adéquates par les autorités. [...]
[...] Il s'agirait plutôt de protéger l'expert vis-à-vis de sa tutelle car il sera une denrée de plus en plus rare, l'hôpital public ou l'université ne voyant pas toujours d'un bon œil ses salariés s'occuper d'autre chose. En effet l'expertise est une activité très peu reconnue dans le monde scientifique. Dans leur carrière, les chercheurs ne sont pas évalués sur leurs travaux d'expertise mais quasiment exclusivement sur leurs publications dans le domaine de la recherche. De fait, les membres des comités d'experts sont de plus en plus des chercheurs seniors. [...]
[...] Cette disposition permet non de supprimer l'existence d'intérêts des experts mais de les donner à voir et donc faire peser cet élément lors de la décision politique. Les procédures d'expertises doivent être institutionnalisées mais ne sont pas destinées à converger sur un consensus. Au contraire, elles doivent rendre compte de la complexité de la situation ce qui permettra la mise en place légitime de procédures visant à mettre un terme à la crise, et notamment ac le PDP. Un degré d'incertitude révélée par l'expertise permettant une action légitime Ainsi l'évolution de l'interprétation du PDP implique désormais d'agir d'une manière d'autant plus étendue que l'incertitude est grande. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture