Le scandale politique peut être substantiellement réduit à la révélation publique d'une entorse aux valeurs de la société, entorse conduite par le personnel politique, une institution ou une agence publiques. Le scandale est révélé par les médias ou au moins amplifié par les médias, bien que l'origine de sa révélation puisse être trouvée dans le camp adverse de l'entité politique mise en accusation. Le scandale met donc en avant trois personnages : celui qui fait l'objet du scandale, le dénonciateur et le public.
Le scandale va à l'encontre de la vision romantique de la politique comme espace pacifique, neutre et juste dans lequel s'organisent les lois qui permettent le bien-vivre ensemble et la valorisation de l'intérêt général. A la place, le scandale dénonce généralement des situations égoïstes au cours desquelles les élus et autres membres du personnel politique ont déjoué la confiance du peuple, à qui ils doivent pourtant leur position hiérarchique. Il y a une rupture du contrat social : le peuple floué, est scandalisé ; la légitimité du personnel politique telle que pensée par Weber est remise en question.
On assiste donc à une double remise en question : le scandale éprouve aussi bien le groupe (remise en question des normes sociales en cours, comment maintenir une cohésion sociale lorsque les règles sociales ne tiennent plus) que l'institution politique à proprement parler (extension du caractère scandaleux de l'individu à l'institution pour laquelle il travaille).
[...] Toutefois on peut accorder aux journalistes le crédit de leur mission d'information neutre et objective, visant à « faire remonter » tout élément susceptible d'intéresser le public et de peser dans le débat public), le temps est capital car il permet au journaliste de réunir suffisamment d'informations pour étayer ses accusations. Le travail d'enquête est primordial (cf. Watergate, un an après le cambriolage) Le scandale devient risqué pour l'accusateur si celui-ci ne dénonce pas le scandale dans les règles inhérentes à la société dans laquelle il évolue. [...]
[...] And so scandal ultimately begets a politics of trust and mistrust – with the consequences we are enduring now 2 Amy Binder, « Book review : Political Scandal : power and visibility in the media age by John B. Thompson, Polity Press », in Social Forces, Vol 80 N°4, MUSE PROJECT ». La confusion de l'homme politique, son caractère, sa personnalité, sa popularité avec ses fonctions politiques, brouille par là même la confiance de l'électeur à son élu et de l'électeur à l'institution pour laquelle il vote. [...]
[...] En ce qui concerne précisément ce dernier, Gamson montre que si dans un premier temps ce sont les pratiques sexuelles de Dick Morris avec une prostituée qui font les choux gras de la presse, bientôt ce sont les révélations des confidences concernant l'Etat et faites à cette même prostituée qui posent problème : Morris aurait fait lire à Sherry Rowlands un discours d'Hillary Rodham Clinton avant que celui-ci ne soit prononcé, de même qu'il lui a annoncé certains aspects confidentiels (comme la découverte de la vie sur Mars faite par un satellite américain) avant que ce ne soit annnoncé par la presse. La couverture médiatique qui a suivi ces révélations délaisse alors la transgression sexuelle pour s'arrêter sur la « trahison de la confiance présidentielle ». La relation extra-maritale, objet de transgression sociale, passe au second plan. Désormais Morris est présenté comme un mercenaire, sans foi ni loi, parfaitement déloyal qui porte préjudice à la campagne présidentielle que mène Clinton pour un second mandat. [...]
[...] On assiste donc à une double remise en question : le scandale éprouve aussi bien le groupe (remise en question des normes sociales en cours, comment maintenir une cohésion sociale lorsque les règles sociales ne tiennent plus) que l'institution politique à proprement parler (extension du caractère scandaleux de l'individu à l'institution pour laquelle il travaille). Le scandale politique : un procédé de maintien du groupe. Le scandale revêt une multiplicité de formes en ce qu'il compt une série de règles et de normes sociales. Il peut à la fois être : une affaire de moeurs (cf. la femme du premier ministre d'Irlande du Nord, Mrs Robinson, a pris un amant d'une vingtaine d'année / cf. [...]
[...] En somme il y a disjonction de deux parties qui se disaient une. L'affaire est une discorde civile qui achève de diviser le groupe qu'il s'agira de réussir à unifier après avoir châtié l'accusé ou l'accusateur. Le scandale institue donc l'appartenance au groupe, les frontières de ce groupe et met en avant ses hiérarchies internes : à la fois processus de régulation statutaire (le jugement sur l'honneur du personnel politique engendre une compétition sociale et implique une sélection des leaders les plus à mêmes de respecter les règles du groupe), contrôle social (la hantise du scandale et de l'opprobe publique engendrée tend à instituer une sorte d'autocontrôle de l'homme politique – on trouve la meilleure illustration de cet autocontrôle dans la fiction : les deux premiers épisodes de la première saison de The West Wing montrent le Dir' com adjoint du président des Etats-Unis obligé de rompre sa relation romantique avec une call girl pour ne pas jeter le discrédit sur le gouvernement – on reviendra dans la seconde partie de cette fiche sur l'extension de l'opprobe à l'institution que le personnage politique représente), et fonction d'exclusion à usage externe (ne peut se livrer au scandale et à ses commérages ceux qui sont concernés : dans le cadre du Monicagate, n'étaient habilité à s'exprimer que le peuple américain), le scandale est conçu comme un maintien du groupe. [...]
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