« De la nature de l'esprit humain et qu'il est plus aisé à connaître que le corps » ainsi s'ouvrent les Méditations métaphysiques cartésiennes. Depuis lors, il est d'un commun usage de dissocier le corps, aux sens trompeurs de l'esprit, seul capable de réflexion, et donc, par extension, de politique. De la même façon que Descartes, Rousseau disqualifie d'entrée de jeu les inégalités physiques (naturelles donc inéluctables, ne pouvant être sujet de politiques) pour se consacrer aux seules inégalités morales sur lesquelles il est possible de réfléchir et d'agir. Santé et politique seraient donc deux univers cloisonnés, indépendants l'un de l'autre. Un bref aperçu de l'histoire de l'hôpital ou plus généralement des institutions sanitaires abonde également en ce sens : hygiène et santé sont longtemps restées le fait d'initiatives exclusivement privées. Mais ce constat ne semble pas d'une telle évidence pour tous, l'affaire du sang contaminé en est malheureusement un bon exemple. Au lendemain du scandale, une journaliste du Monde titrait « Où sont les responsables ? Qui doit payer ? » Interpellant ainsi les institutions sanitaires, juridiques mais surtout politiques. Si le politique essaye donc vainement d'éluder les questions de santé (I), il ne peut pas indéfiniment manquer à ses obligations (II).
[...] Mais il ne peut cependant se soustraire à ses obligations sanitaires : le contrat social, un serment d'Hippocrate 1. La gestion de la santé publique est intrinsèquement politique La sécurité sanitaire : une fonction régalienne par nature La sécurité est au cœur même du contrat lockéen qui marque la naissance de l'Etat. Rosanvallon le rappelle dans La Crise de l'Etat providence : le premier droit de l'individu reconnu comme sujet central du politique, c'est ainsi le droit à la vie. [...]
[...] Le corps médical se sent ainsi seul à lutter sans moyens nécessaires et n'a de cesse d'interpeller l'Etat déserteur : il nourrit même selon Morelle un sentiment de citadelle assiégée Ignorance feinte, intervention tardive, puis délégation à d'autres sous prétexte d'un manque de compétences : L'Etat de fait, employé tous les stratagèmes possibles pour tenter de convaincre l'opinion publique de la séparation quasi- hermétique entre santé et politique et de la légitimité de cette séparation. Cependant, il est évident que cette dichotomie est artificielle en de nombreux points. D'une façon plus générale, il ne semble tout simplement pas envisageable qu'un système politique reposant sur la solidarité l'Etat- providence se dédouane si facilement de cette responsabilité. [...]
[...] Une politique à rebours des crises Toutefois, même établie, la politique sanitaire française reste ardue. L'Etat n'y prend que difficilement l'initiative, et axe sur le soin plus que sur la prévention, la politique de santé est toujours post- traumatique : on attend que l'irréparable se produise pour agir En 1849 a lieu une épidémie de choléra meurtrière, elle donne suite à de premières législations sanitaires. En 1918, c'est cette fois une épidémie de grippe espagnole qui décime les populations. Au terme d'un long débat, Clemenceau parvient à faire passer la loi que les hygiénistes avaient toujours appelée de leurs vœux pieux : la création d'un ministère de la santé et d'une réelle administration d'Etat Mais l'épidémie la plus radicale est peut-être celle qui frappe dans les années 1970- 1990, l'épidémie de SIDA, elle entraîne une réforme profonde du dispositif de santé publique. [...]
[...] De la même façon que Descartes, Rousseau disqualifie d'entrée de jeu les inégalités physiques (naturelles donc inéluctables, ne pouvant être sujet de politiques) pour se consacrer aux seules inégalités morales sur lesquelles il est possible de réfléchir et d'agir. Santé et politique seraient donc deux univers cloisonnés, indépendants l'un de l'autre. Un bref aperçu de l'histoire de l'hôpital ou plus généralement des institutions sanitaires abonde également en ce sens : hygiène et santé sont longtemps restées le fait d'initiatives exclusivement privées. Mais ce constat ne semble pas d'une telle évidence pour tous, l'affaire du sang contaminé en est malheureusement un bon exemple. Au lendemain du scandale, une journaliste du Monde titrait Où sont les responsables ? [...]
[...] Mais il n'y a cependant pas de réelle mobilisation des pouvoirs politiques C'est une phase d'indifférence dans un contexte de relative impuissance thérapeutique. La phase de mobilisation n'a lieu qu'à partir de 1985 avec la mise sur marché français des tests de dépistage. Les pouvoirs publics mettent en place des mesures exceptionnelles selon trois grandes directions : Une information préventive pour un public général et les groupes à risque dans un premier temps, des dépistages sous forme de politiques publiques sur la base du volontariat et de l'anonymat dans un second, et enfin des politiques de réduction des risques. [...]
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