Étymologie de révolte : du bas latin revolutio, qui signifie « retour au point de départ ». Dans la doxa, une révolution est un changement brusque et décisif dans l'ordre social, intellectuel, ou encore esthétique : on peut avoir une révolution de n'importe quel ordre. On parle ainsi de révolution des mœurs. Hannah Arendt, dans son Essai sur la révolution, qualifie la révolution de « rupture inaugurale », de « fondation de la liberté ». Au sens politique, il s'agit pour elle d'un passage en général brusque et violent, d'un type de régime politique à un ordre. Cependant, le « Printemps arabe » entraîne une nécessaire clarification épistémologique : en effet, une révolte n'est pas en révolution. En Algérie, par exemple, on a pu observer en 2012 des émeutes, comme le souligne Miloud Chenafi, mais ces révoltes n'étaient pas politiques, et étaient portées par des revendications économiques. Ce qui sépare la révolte de la révolution, c'est que cette dernière est la seule à instaurer un ordre nouveau de manière irréversible. Cela soulève un premier paradoxe, puisque l'étymologie même de révolution susnommée est en opposition avec sa signification politique. On peut alors légitimement se demander si la violence qui accompagne de manière générale les révoltes (cf les révoltes de la faim en Afrique Noire) est elle-même féconde, ou si elle est inévitable pour qu'une révolution soit effective, comme le soulignait Karl Marx. On peut au contraire, à l'instar de Kant, penser la révolution comme créatrice d'anarchie, car négatrice de justice effective. C'est là un des enjeux dans la distinction et la hiérarchie entre révolution et révolte qui se pose. Dans l'expression marxiste, on retrouve le présupposé selon lequel la révolte violente est la base de la révolution. Pourtant, on peut parler de révolution des mœurs (par exemple avec l'abolition de la peine de mort en 1984), sans qu'il y ait de violence évidente.
[...] Dans l'expression marxiste, on retrouve le présupposé selon lequel la révolte violente est la base de la révolution. Pourtant, on peut parler de révolution des mœurs (par exemple avec l'abolition de la peine de mort en 1984), sans qu'il y ait de violence évidente. En Arabe, il existe un seul mot pour révolte et révolution : Thawra. Cette unité épistémologique est-elle justifiée, notamment au vu des récents bouleversements dans les pays arabes ? Comme on l'a vu, une révolution change l'ordre établi de manière radicale, et souvent violent comme le souligne Arendt. [...]
[...] Le gouvernement essaie par des effets d'annonce tels que la hausse des salaires ou la libération de protestataires de calmer ces mouvements de révoltés le 24 mars, mais ne parvient pas à enrayer la contestation populaire. On voit donc l'importance de la question de la répression dans la relation entre révolte et révolution ; elle semble pouvoir empêcher une révolution de se terminer. Cette interprétation peut se trouver renforcée par l'infographie de Reuters, qui montre en Syrie les foyers de la répression. [...]
[...] Mais il n'y a pas qu'à cause de la répression qu'une révolte n'est pas une révolution, d'autres facteurs exogènes, ou historiques, peut venir s'y ajouter. En effet, l'Algérie a vu des révoltes éclater en son sein, mais ces révoltes n'ont pas abouti. Comme le souligne Miloud Chennoufi, on a cru en janvier 2011 à la globalisation d'une révolte, et à la création d'un mouvement révolutionnaire. Mais ces révoltes éparses n'étaient selon lui pas politiques, juste en réaction par rapport aux prix. [...]
[...] Une révolte entraîne-t-elle forcément une révolution ? Existe-t-il une relation d'exclusivité entre ces deux notions ? Nous verrons dans une première partie que non, une révolte n'entraîne pas toujours une révolution, prenant ainsi le contrepied du postulat marxiste. Néanmoins, il faudra souligner dans une deuxième partie que la révolte peut être une condition de la révolution La Syrie est d'une brûlante actualité, car la révolte populaire (ou les révoltes, si l'on tient compte des particularismes régionaux syriens) est encore en cours. [...]
[...] Le régime promit une ouverture politique par des élections libres notamment. On voit donc qu'une révolte, qu'elle soit réprimée en Syrie, ou étouffée en Algérie et au Maroc comme le souligne C.Makarian dans sa chronique de L'Express, ne réussit pas toujours sa conversion en révolution. Au Yémen, comme le montre la chronologie du corpus documentaire, les révoltes débutées le 29 décembre 2010 ont permis la fin de Saleh, qui a passé pacifiquement le pouvoir, une première dans ce printemps arabe, un dirigeant essaie d'accompagner le processus démocratique, comme le souligne G.Malbrunot dans Le Figaro en février 2012. [...]
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