« La responsabilité est le prix à payer du pouvoir ». Winston Churchill avait bien compris l'importance et le poids incombés par les plus hautes fonctions de l'Etat. Comment légitimer ses faits et actions sans en assumer les conséquences ?
La responsabilité des membres de l'exécutif doit donc en théorie être fixée en parallèle de leurs fonctions et de leurs attributions. En revanche, alors que ce bon sens voudrait une responsabilité fonction du pouvoir, la pratique semble accorder nombre de privilèges aux gouvernants. On convient à ce titre de s'intéresser à la responsabilité civile des membres de l'exécutif, ainsi qu'à leur responsabilité pénale ou encore politique.
[...] En effet, la mise en œuvre de la responsabilité du gouvernement semble problématique sous la Ve République. Notons tout d'abord que la motion de censure semble plus conforme au principe de mise en cause de la responsabilité du Gouvernement, puisqu'émanant directement des députés d'une part, et puisque les procédures des articles 49§1 et surtout 49§3 visent plutôt à faire adopter un texte de manière plus ou moins forcée. Dans cette optique, on a constaté au cours de la Ve République un affaiblissement de cette prérogative parlementaire : en effet, les conditions à remplir pour renverser un gouvernement par la motion de censure sont nombreuses et complexes. [...]
[...] Dans sa décision du 22 janvier 1999, le CC a précisé que le Président, pour les actes accomplis durant l'exercice de son mandat (et hors le cas de manquements incompatibles avec l'exercice de ses fonctions) bénéficie d'une immunité, et que sa responsabilité pénale ne saurait être mise en cause que devant la Haute Cour de Justice selon les modalités fixées par l'article 68. D'autre part, la Cour de Cassation a accentué la neutralisation de la responsabilité du Président. Ainsi, dans l'arrêt du 10 octobre 2001, en assemblée plénière, la Cour a estimé que, concernant les actes antérieurs ou extérieurs à l'exercice des fonctions présidentielles, le chef de l'Etat bénéficie d'une immunité totale, impliquant l'impossibilité d'être entendu comme témoin assisté, d'être mis en examen, cité ou renvoyé pour une quelconque infraction devant une juridiction pénale de droit commun. [...]
[...] Sous l'Ancien Régime, le monarque de droit divin ne saurait souffrir d'aucune responsabilité, sinon devant Dieu dont il reçoit sa légitimité. C'est à partir de 1792, une fois l'absolutisme dissipé, que la question d'une responsabilité royale surgit. Cette question est ainsi longuement débattue lors du procès (si l'on peut employer ce mot de Louis XVI. Le roi se trouve ainsi responsable devant l'Assemblée constituante. Il s'agit des prémices de la responsabilité politique. En période de crise majeure des institutions monarchiques, l'engagement de cette responsabilité n'a pu conduire qu'à la mort (au sens propre) de l'intéressé. [...]
[...] Enfin, on peut regretter que cette responsabilité politique du Gouvernement ne sache remettre en cause l'action présidentielle, s'inscrivant alors comme un rempart protecteur de la responsabilité du Président. Nous étayerons pleinement cette thèse dans la seconde partie. Il convient maintenant de nous intéresser à la responsabilité pénale des membres du Gouvernement. Une responsabilité pénale enfin déparlementarisée mais entachée de privilèges La responsabilité pénale des membres du Gouvernement est régie par les articles 68-1 et 68-2 du Titre X de la Constitution. [...]
[...] Outre ces cas gravissimes (d'ailleurs sans précédent), l'article 68 se contente d'évoquer les actes accomplis dans l'exercice de ses fonctions Ainsi, sur le plan purement juridique, rien ne s'opposerait à ce que le Président puisse répondre d'actes antérieurs ou extérieurs à sa fonction devant les juridictions pénales ordinaires. Notons d'ailleurs que cette interprétation fut soutenue par Jean Foyer, ancien Garde des Sceaux du général de Gaulle, mais aussi par une grande partie de la doctrine. En outre, ce fut la conception dominante sous les IIIe et IVe Républiques. Ainsi, le Président Poincaré, en 1914, comparut (à titre de témoin seulement) devant la Cour d'Appel de Paris. [...]
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