« Nous cesserons dès à présent d'être des Britanniques, des Français ou des Allemands. (…) Nous devons défaire le dernier ressort de l'égoïsme national !» Ces mots de Victor Hugo montrent que certains n'hésitent pas à critiquer le concept d'Etat-nation, soit qu'il ne leur convient pas, soit qu'il ne constitue pas en lui-même une fin, mais simplement une étape. Cette dénonciation de l'Etat-nation peut cependant surprendre car elle a lieu au moment même où il connaît sinon son apogée du moins un vif succès à travers le monde occidental. Quelles sont donc les résistances à l'Etat-nation qui engendrent ces critiques ?
Cet Etat d'un type nouveau, dont les principaux représentants sont la France, l'Italie et l'Allemagne à partir de 1870 propose de faire coïncider Nation et Etat. Mais le problème de l'Etat-nation réside dans les différences d'appréciation masquées par cette définition catégorique. Car si l'Etat est une entité politique éminemment concrète dans l'Europe du XIXème siècle, la nation est un concept plus abstrait, sujet à controverses. C'est cette juxtaposition de deux termes faisant l'objet l'un d'une définition objective et l'autre d'une définition mêlant critères objectifs et subjectifs qui fait de l'Etat-nation un idéal critiquable. En effet, l'Etat-nation n'est pas un concept dénué d'ambiguïté, et l'on peut se demander où s'arrête l'oppression des nations dans un Etat multinational et où commencent les politiques d'unification destinées à renforcer l'unique nation présente au sein d'un Etat-nation.
Si le modèle de l'Etat-nation n'est pas accepté de façon unanime, quelles sont les diverses remises en cause de celui-ci ? Le terme de résistances interroge à la fois les motifs de cette volonté de ne pas faire coïncider nation et Etat, les formes qu'elle prend -c'est-à-dire quels sont les divers contre-modèles proposés mais aussi les techniques et réseaux employés-, ainsi que les acteurs qui s'impliquent dans ces résistances. Sont-elles le fait d'Etats qui par leur non conformité au modèle de l'Etat-nation constituent des résistances ? Sont-elles le fait d'autres forces à vocation plus ou moins universelles comme celles de l'Eglises et du socialisme ? Sont-elles présentes à l'intérieur même des Etats-nations par le biais de mouvements qui remettent en cause sa légitimité ?
La question soulevée par ces résistances est celle de la modernité de ces oppositions. Se résument-elles à des survivances d'archaïsmes face à la modernité de l'Etat-nation ou sont-elles une autre forme de modernité fondée sur une idéologie autre ? Si certaines formes de résistance relèvent bel et bien d'un conservatisme en rupture avec les évolutions politiques que l'on observe en Europe (I.) , d'autres sont au contraire l'affirmation d'une modernité concurrente à celle de l'Etat-nation (II.). Enfin, les Etats-nations eux-mêmes sont à l'origine d'une remise en cause du principe de l'Etat-nation (III.).
[...] Pour toutes ces raisons, l'Eglise se place dans l'opposition aux Etats- nations. Les Empires et l'Eglise catholique se trouvent donc attaqués par la modernité politique que représente l'Etat-nation. Face à cette menace, ils tentent d'imposer le statu quo et deviennent des résistances archaïques. Mais quels sont les moyens qu'ils emploient pour contrer la montée des nationalités? L'Eglise catholique ne dispose plus de l'influence qu'elle détenait au siècle précédent quand la quasi-totalité des Etats Européens était dirigée par des monarques catholiques. [...]
[...] Dans les pays européens, la vie culturelle s'adapte à cette nouvelle réalité avec la création d'associations en faveur du colonialisme comme le Royal Colonial Institute au Royaume-Uni en 1882, l'organisation d'expositions coloniales en 1924 à Londres, en 1931 à Paris. Au fil de leurs conquêtes, le statut des pays européens évolue. D'Etats-nations, ils deviennent des métropoles d'empires coloniaux. Si l'Allemagne a participé elle aussi à l'aventure coloniale européenne, elle ne l'a fait que tardivement et n'a pas obtenu un vaste empire colonial. Cependant, une autre forme d'impérialisme apparaît en Allemagne. Il s'agit du pangermanisme qui voit officiellement le jour en 1891 avec la création de la Ligue pangermaniste. [...]
[...] La question soulevée par ces résistances est celle de la modernité de ces oppositions. Se résument-elles à des survivances d'archaïsmes face à la modernité de l'Etat-nation ou sont-elles une autre forme de modernité fondée sur une idéologie autre ? Si certaines formes de résistance relèvent bel et bien d'un conservatisme en rupture avec les évolutions politiques que l'on observe en Europe , d'autres sont au contraire l'affirmation d'une modernité concurrente à celle de l'Etat-nation (II.). Enfin, les Etats-nations eux-mêmes sont à l'origine d'une remise en cause du principe de l'Etat-nation (III.). [...]
[...] De son côté, la Transleithanie procède à une magyarisation grâce notamment à la loi Trefort de 1879 qui impose l'étude du Hongrois dans toutes les écoles primaires. Les moyens autoritaristes utilisés par les monarchies et l'Eglise dans la résistance à l'Etat-nation font donc partie des réponses traditionnelles faites aux soulèvements. On observe néanmoins que ces réactions n'éradiquent pas totalement les aspirations nationales qui persistent. Si les moyens mis en œuvre pour lutter contre la montée de l'Etat- nation par l'Eglise sont réels, ils sont pour le moins faibles, et ce pour deux raisons. [...]
[...] Quelles sont donc les résistances à l'Etat- nation qui engendrent ces critiques ? Cet Etat d'un type nouveau, dont les principaux représentants sont la France, l'Italie et l'Allemagne à partir de 1870 propose de faire coïncider Nation et Etat. Mais le problème de l'Etat-nation réside dans les différences d'appréciation masquées par cette définition catégorique. Car si l'Etat est une entité politique éminemment concrète dans l'Europe du XIXème siècle, la nation est un concept plus abstrait, sujet à controverses. C'est cette juxtaposition de deux termes faisant l'objet l'un d'une définition objective et l'autre d'une définition mêlant critères objectifs et subjectifs qui fait de l'Etat-nation un idéal critiquable. [...]
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