Une semaine après les attentats commis le 11 septembre 2001 contre le World Trade Center, le fondateur de l'Institut Arabe Américain (AAI), James Zogby comptait “ plus de deux cents agressions ” perpétuées à l'encontre des musulmans et des arabes américains. Ces faits ont suscité des interrogations sur l'identité des arabes vivant aux Etats-Unis et plus particulièrement sur leurs modes de mobilisation politique. Présente depuis plus d'un siècle sur le territoire américain, cette minorité qui représente, selon l'AAI, “ trois millions et de demi de personnes ” a longtemps étonné par son apathie politique.
L'immigration des arabes vers les Etats-Unis a débuté il y a plus d'un siècle à partir des années 1860. On peut diviser leur arrivée en deux grandes vagues d'immigration, la première a eu lieu entre 1860 et les années 1920 tandis que la seconde s'étend de 1945 à aujourd'hui. Chacune de ces deux vagues d'immigration a ses spécificités propres. Celles-ci sont importantes à souligner car elles auront des conséquences sur l'intégration et les formes de mobilisation politique des arabes américains. Les premiers émigrants arabes venaient de la “ Grande Syrie ” qui était une province de l'empire Ottoman. La “ Grande Syrie ” correspondait à une région qui recouvre l'actuel Liban, la Palestine et la Syrie.
Ces immigrants fuyaient les persécutions ainsi que la guerre civile. “ Ils émigrèrent car leurs terres étaient entre les mains d'un système féodal jusqu'à la guerre civile qui éclata en 1860 entre les Syriens chrétiens et les Palestiniens musulmans. Les paysans perdirent rapidement leurs propriétés et devinrent des serfs. Les Syriens chrétiens et les Palestiniens musulmans cherchèrent refuge ailleurs ”. L'écrasante majorité de ces immigrants étaient des chrétiens maronites originaires du Liban qui fuyaient à cause de l'oppression du régime Ottoman qui n'accordait pas les mêmes droits aux chrétiens et aux musulmans. En effet, “l'empire n'accordait pas le même statut à tous ses sujets. Les chrétiens étaient victimes de nombreuses restrictions et souffraient de persécutions ” .
Il y a aussi les facteurs économiques qui ont poussé de nombreux immigrants au départ. “ L'ouverture du Canal de Suez qui régulait le trafic entre la Syrie et l'Egypte rendit le transport de marchandises si simple et rapide que la soie japonaise devint une redoutable concurrence pour la soie libanaise ” . Pour ces émigrants issus d'un milieu rural et généralement peu instruits, l'Amérique de la fin du 19e siècle et du début du 20e siècle symbolisait parfaitement “ l'espoir d'une vie meilleure ” et la possibilité d'une réussite professionnelle et matérielle. “ Beaucoup d'arabes vinrent dans la région de Détroit pour travailler dans l'usine Ford qui payait ses ouvriers cinq dollars par jour et engageait tous ceux qui pouvaient supporter la chaleur et les conditions de travail épouvantables. La plupart des gens en provenance du Proche-Orient ne connaissaient pas l'anglais. Ils considéraient donc cela comme un bon salaire ” .
Pour résumer les grandes caractéristiques de cette première vague d'immigration arabe, vers les Etats-Unis, on peut dire que celle-ci est essentiellement composée de chrétiens maronites venant d'un milieu rural et généralement peu instruit. S'ils connaissent quelques difficultés dès leur arrivée sur le territoire américain, ils adoptent très vite les normes et les valeurs de la société d'accueil. Enfin, il est important de souligner qu'ils sont dans la très grande majorité des cas faiblement politisés car issue pour la plupart de milieux modestes et d'une région du monde sans tradition de démocratie (empire Ottoman).
Après la Seconde guerre mondiale, l'immigration arabe se caractérise par une plus grande diversité des origines nationales et des pratiques religieuses. Si la première vague comptait “une écrasante majorité de chrétiens (90 à 95%), les musulmans et les druzes ne représentant qu'une petite minorité (5 à 10%) ” , la seconde vague est totalement différente puisqu'“ elle comporte 60% de musulmans originaires de la Palestine, de l'Egypte, du Yémen, de l'Irak, de la Syrie et du Liban ” . Les raisons de cet afflux sont très diverses. Ainsi les conflits israélo-arabes ont toujours provoqué des départs massifs de populations.
Les guerres de 1948 et de 1967 perdues par les arabes ont poussé de nombreux Palestiniens à émigrer. Contrairement à la première vague, “ces immigrants étaient plus aisés et occupaient souvent des professions à haute qualification : professeurs, enseignants, ingénieurs et docteurs ” . Il y avait aussi parmi ces nouveaux arrivants de nombreux étudiants attirés par les universités américaines qui favorisaient le “ brain-drain ” c'est à dire la venue de futurs travailleurs hautement qualifiés. Enfin, cette seconde vague se caractérise par sa plus grande volonté à garder son identité culturelle d'origine. Les nouveaux arrivants chrétiens et musulmans défendaient fortement le nationalisme arabe et “ gardaient des contacts avec leur mère patrie ” .
[...] Entretien avec Y.Haddad, US Info, vol.2, mars 1997. Y.Haddad, Muslim Communities in North America, op.cit., p232. Cité par S. Oueslati, Le lobby arabe américain EurOrient, p102. S. Oueslati, Le lobby arabe américain op. cit., p102. M. Suleiman, Arabs in America, Building a New Future, op. cit., p9. [...]
[...] The early Arab Immigrant Experience”, Carbondale et Edwardsville, Southern Illinois University Press SULEIMAN (Mickael), Arabs in America, Building a New Future, Philadelphia, Temple University Press P. Jarreau, Menaces, injures contre les Arabes Américains et cocktail molotov sur les mosquées Le Monde sept P. Jarreau, Menaces, injures contre les Arabes Américains et cocktail molotov sur les mosquées Art.Cit. Y. Haddad, Muslim communities in North America, Albany, Paperback State University Press p 231. M. Suleiman, Arabs in America, Building a New Future, Philadelphia, Temple University Press p 2. [...]
[...] En 1998, la revue New Statesman n'hésita pas à faire sa couverture avec le titre provocateur Why Americans hate Arabs ? Comme le souligne Kathleen Christinson, la communauté arabe américaine reste aujourd'hui la seule que l'on peut dénigrer en totale impunité ( ) aucun autre groupe ethnique n'accepterait de telles diffamations, ni les Italiens, ni les Juifs, ni les Noirs, ni les Irlandais Le racisme anti-arabe aux Etats-Unis Parallèlement à la dégradation de l'image de l'arabe et du musulman dans les représentations populaires, les violences physiques commises à leur encontre se sont multipliées. [...]
[...] N. Khoury, The Arab Lobby : Problems and prospects The Middle East Journal, vol.41, p381. Y. Haddad, The Muslims of America, New York, Oxford University Press p219. Y. Haddad, ibid, p219. S. Oueslati, Le lobby arabe américain Art. cit., p110-111. G. [...]
[...] On peut diviser leur arrivée en deux grandes vagues d'immigration, la première a eu lieu entre 1860 et les années 1920 tandis que la seconde s'étend de 1945 à aujourd'hui. Chacune de ces deux vagues d'immigration a ses spécificités propres. Celles-ci sont importantes à souligner car elles auront des conséquences sur l'intégration et les formes de mobilisation politique des arabes américains. Les premiers émigrants arabes venaient de la Grande Syrie qui était une province de l'empire Ottoman. La Grande Syrie correspondait à une région qui recouvre l'actuel Liban, la Palestine et la Syrie. Ces immigrants fuyaient les persécutions ainsi que la guerre civile. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture