La notion même de renseignement recouvre de nombreuses et multiformes réalités et englobent de nombreuses catégories et distinctions, et la définition du renseignement militaire se construit au fil de ces catégories. Premièrement, l'on peut distinguer le renseignement général (politique, social, économique…) d'un renseignement plus particulier, dit « renseignement de défense », qui vise spécifiquement la sécurité, l'évaluation et la gestion des crises, et qui peut motiver des prises de décisions militaires, et en dernière instance servir matériellement à la conduite d'opérations militaires.
L'analyse du renseignement militaire en Europe de nos jours doit suivre les différentes lignes directrices, qui permettent d'établir un panorama de la communauté du renseignement militaire en Europe, mais aussi d'appréhender les nombreux défis et problématiques qui se posent à cette communauté, en termes d'évolution de la notion en elle-même, en termes de capacités, en termes de coopération mais aussi de compétitions internes comme externe à l'Europe entre les différents services, ainsi que d'entrevoir une perspective nouvelle, mais encore très théorique, dans la communauté du renseignement : celle d'une création de nouvelles structures au niveau de l'Union Européenne.
[...] Il existe cependant dans certains domaines des initiatives et dynamiques de coopérations. Dans l'imagerie satellitaire de renseignement militaire, la coopération s'est relativement développée, avec les accords Hélios-Sar Lupe entre la France et l'Allemagne (Juin 2000, Sommet de Mayence) qui organise un système complémentaire d'imagerie spatiale optique (Hélios) et radar (Sar Lupe), permettant à l'Europe de combler son retard dans la captation radar haute résolution (HR). En Janvier 2001 au Sommet de Turin est scellée la coopération franco-italienne du projet Pléiades Cosmo-Skymed, mettant en place un système multi capteurs optiques et radar, à objectif dual civil et militaire, sur la période 2003-2006. [...]
[...] Le renseignement militaire en Europe de nos jours est donc encore à l'heure des défis. En ce qui concerne les forces nationales strictes, de nombreux pays présentent d'excellents savoirs faire dans certains domaines mais souvent d'une envergure largement distancée par les capacités d'Israël et des Etats-Unis. De plus, avec l'évolution et le décloisonnement de la notion, l'Europe est confrontée à une nécessité de réformer son renseignement militaire, dans le sens du développement global des systèmes de captation et de logiques de transversalité et de coopération. [...]
[...] L'Angleterre coordonne l'ensemble de ses organes de renseignements dans le Joint Intelligence Committee, une structure qui assure la centralisation du renseignement, et qui est donné comme modèle pour une intégration réussie d'une communauté nationale du renseignement, notamment pour les pays où le renseignement reste fragmenté et parfois mal coordonné, à l'exemple de la France.[1] Allemagne : le renseignement militaire est scindé entre l'Amt für Nachrichtenwesen der Bundeswehr (office de renseignement des armées, ANBw), et l'Amt für Fernmeldewesen der Bundeswehr (AFBw), qui se concentre sur la collecte de renseignement électroniques militaires. On estime à 1000 le nombre de personnes travaillant pour ces deux entités de renseignement militaire de la Bundeswehr. [...]
[...] Cependant ce renseignement militaire pur n'a qu'un intérêt éphémère puisque très concentré sur les lieux et moments de crises, et l'INTDIV est une unité de seulement 30 rapporteurs nationaux. La Force de Réaction Rapide (FRR) mise en place à Nice en 2000 disposera cependant bientôt de capacités d'imagerie aérienne militaire, avec la France et la Grande Bretagne mettant à sa disposition leurs avions E-3 AWACS. L'UE a également hérité, lors de la dissolution de l'UEO (Union de l'Europe Occidentale, fondée en 1954) dans les structures de l'Union lors du Traité de Nice, du Centre d'Observation Satellitaire de Torrejon en Espagne. [...]
[...] Le renseignement militaire strict se retrouve essentiellement sous la responsabilité de l'Etat-major des Armées (EMACON). En Italie la communauté du renseignement est scindée entre renseignement interne (SISD, Servizio per le Informazioni et la Sicurezza Democratica), et le renseignement externe, dans lequel est inclus le renseignement militaire (SISMI, Servizio per le Informazioni et la Sicurezza Militari). Le paysage du renseignement militaire en Europe est donc relativement éclaté, il reste aussi fondamentalement une mosaïque d'agences nationales juxtaposées, aux capacités souvent différenciées, et souvent significativement distancées par la communauté du renseignement militaire Américaine, où la seule Defense Intelligence Agency, dont estime le chiffre du personnel à 7000 agents, représente presque autant que la DIS Britannique, la DRM française et l'ANBw-AFBw allemande réunies. [...]
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