La réflexion institutionnelle du général de Gaulle dans le « Discours de Bayeux » du 16 juin 1946 et les structures principales de la constitution de 1958

Résumé du document

Sortant du silence qu'il avait observé depuis le 20 janvier, le général de Gaulle expose le 16 juin, à Bayeux, quelle structure il faut, selon lui, donner aux institutions de la République pour que celles-ci répondent aux besoins de l'État.

La fondation en 1958 de la Ve République a alors promu le discours de Bayeux à une célébrité exceptionnelle ; il n'a pas cessé depuis d'être cité comme référence dans toute étude sur les origines de la Ve République. On peut même noter que certains spécialistes eux-mêmes évoquent ce discours en tant que « Constitution » de Bayeux. On peut alors se demander s'il s'agit du résultat d'un effet de grossissement rétrospectif à la lumière de 1958 et 1962 ou s'il s'agit véritablement d'un acte fondateur.
Pour répondre à cette question, on essaiera dans un premier temps de replacer le discours de Bayeux dans son contexte d'énonciation avant d'étudier sa portée dans les institutions de la Ve République.

Extraits

[...] C'est le moment que choisit de Gaulle, espérant influencer ses travaux, pour exposer ses idées constitutionnelles jusque-là assez imprécises dans un discours de référence. En effet, demeuré silencieux depuis son départ, de Gaulle peut alors escompter, dans ce contexte d'incertitude politique et de vide constitutionnel, être en mesure de se faire entendre des partis comme du pays. C'est ce qu'il va faire à Bayeux le 16 juin, deuxième anniversaire de son premier discours à Bayeux. En faisant écho ainsi à la période la Libération où il était alors vu comme l'homme présidentiel, de Gaulle espère marquer les esprits. B. [...]

[...] La réflexion institutionnelle du général de Gaulle dans le Discours de Bayeux du 16 juin 1946 et les structures principales de la constitution de 1958 Le discours de Bayeux en son temps A. Les conditions d'énonciation 1. Un lieu 2. Un moment B. Le discours dans le débat constitutionnel de la République 1. Une ignorance politique 2. Une opposition doctrinale 3. L'accueil du discours dans l'opinion II/ Le discours de Bayeux annonce 1958 A. Le pouvoir exécutif, un pouvoir d'action 1. [...]

[...] L'article 49 règlemente ainsi minutieusement les procédés de contrôle. Les partis canalisés, le Parlement maîtrisé, l'Exécutif libéré et restauré, tel est bien l'objectif recherché en 1946 et réalisé en 1958. C. Les absents du discours Cependant, Bayeux ne fait ni explicitement référence au principe de l'élection présidentielle au suffrage universel ni au référendum qui sont pourtant des éléments importants de la pratique politique de la République. On peut supposer que cela s'explique par l'inachèvement de son schéma institutionnel, ou par un souci tactique de ne pas brusquer l'opinion Le suffrage universel direct Le discours de Bayeux pose en effet d'évidentes limites à l'autorité du Chef de l'Etat, tant au niveau de la source de légitimation de son autorité que dans les moyens d'expression de cette autorité. [...]

[...] C'est pourquoi les rédacteurs de 1958, dans l'esprit de Bayeux, optent pour un bicaméralisme inégalitaire : le sénat ne doit en aucun cas être perturbateur. C'est ainsi qu'ils vont permettre à la seconde assemblée d'examiner publiquement ce que la première a pris en considération (article de formuler des amendements (article de proposer des projets (article 39) mais ils donneront le dernier mot à l'Assemblée nationale (article 45 et 47). Par ailleurs, le domaine de la loi est soigneusement délimité : l'ensemble de la procédure législative est enserré dans un carcan particulièrement contraignant. [...]

[...] Mais ce qui fait débat dans cette phrase c'est l'annonce de l'article 20 qu'elle contient. Cependant, avec le discours d'Epinal, on comprend qu'il considère plutôt le président de la République comme véritable chef du gouvernement. > Il appartient alors aux rédacteurs de la Constitution de 1958 de compléter l'arsenal gouvernemental par des mécanismes juridiques destinés à faciliter l'exercice de l'activité gouvernementale selon les objectifs assignés à Bayeux. C'est ainsi que le Premier ministre devient le véritable directeur du travail législatif. [...]