La question du lien entre violence et politique a été et est l'objet de nombreux jugements de valeur. A priori, aujourd'hui, dans les démocraties pluralistes, les condamnations de la violence et surtout de la violence politique sont unanimes. Il ne faut pourtant pas oublier que l'éloge de la violence a également été faite : culte de la force, éloge du patriotisme, légitimations de la violence révolutionnaire (anarchistes et néo-léninistes), apologies sartriennes de la violence des colonisés ou encore violence des « peuples supérieurs » (nationalismes chauvins, néo-nazismes), les exemples de valorisation de violence pour le pouvoir ou de violence au sein du pouvoir ne manquent pas.
Puisque qu'elle se consacre à une réflexion sur l'ordre juste, sur le critère qui permet de distinguer une domination pure et simple de la contrainte légitime, la philosophie politique est toute entière traversée par les rapports entre violence et politique : par les définitions de ces deux notions, ce qui les unie et ce qui les oppose.
La plupart des acceptions et des descriptions de la violence renvoient à la qualité et à l'intensité d'une force, qualité et force repérables à partir de son usage illégitime. La force est une présence irréductible dans les relations humaines, mais on parle de violence à partir du moment où on trouve une intensité de cette force en plus d'un caractère illégitime. La violence est donc pensée comme un excès. On parle de violence pour des comportements jugés illégitimes par opposition à un lexique euphémisant - coercition, contrainte, force – pour ce qui semble légitime. Quant à la politique elle peut se définir comme un art de gouverner les sociétés humaines, d'établir la justice et la paix entre les individus et les groupes qui les composent. Toute cohabitation étant forcément conflictuelle, la politique consiste donc essentiellement dans la gestion de ces inévitables conflits.
[...] Dans cette version, la violence peut détruire le pouvoir et est impuissante à le créer. C'est quand le pouvoir commence à se perdre que le règne de la violence s'instaure. La violence est alors perçue comme une menace à la société libre, à la cité empêchant l'accomplissement de l'être humain, comme une négation de l'homme. La politique peut donc être comprise comme un pari de règlement pacifique des conflits par l'argumentation, la discussion, la délibération et non par la violence ou la menace de violence. [...]
[...] La politique peut être comprise comme borne de la violence en ce qu'elle repose sur le recul de la violence individuelle. Bibliographie Jean-Marie DONEGANI, Marc SADOUIN, Ce que la politique dit de la violence, in Raisons politiques février 2003, p. 3-18. Michel BERTRAND, Natacha BERTAND, Violences et pouvoirs politiques, recueil de textes, Presses universitaires du Mirail Article Politique sur www.irnc.org/nonviolence/lexique/3.politique/items/8.htm Philippe BRAUD, La violence politique dans les démocraties occidentales François Dieu, Eléments pour une approche sociopolitique de la violence policière, in Déviance et société vol p. [...]
[...] C'est ainsi que selon Aristote, la politique est nature et la violence est contre nature. La violence est donc apolitique dans la mesure où elle oblige les hommes à se comporter d'une manière incompatible avec l'être politique qu'ils sont. Elle est impensable à partir du moment où on a posé la naturalité du politique comme détermination de l'humanité de l'homme. En droit naturel moderne, parce que l'homme est raisonnable, il va établir un ordre politique (qui n'a rien de naturel) qui implique la non-violence. [...]
[...] Stigmatiser toute violence résiste mal à l'épreuve de certaines situations politiques concrètes. La Guerre du Golfe (janvier 1991) par exemple a fait renaître les justifications du recours à la force. De même, le traitement des prisonniers dans les camps de Bosnie (été 1992) a conduit à une critique de l'inaction militaire. La question que pose cet exposé est donc le lien entre violence et politique. Il s'agit de se défaire des habits de moraliste pour essayer d'élucider la place exacte de la violence dans la politique et notamment dans le fonctionnement d'une démocratie pluraliste. [...]
[...] La violence est l'acte qui vient contrarier la nature politique de l'homme. En cela, l'individu ou le groupe qui l'exerce met en péril la société parce qu'ils sapent le sentiment de coappartenance sans lequel la communauté humaine ne peut subsister. Qu'on la place hors de la cité (droit naturel classique) ou avant l'association (droit naturel moderne), la violence est toujours l'envers du politique. Qu'il s'agisse du critère de la légitimité ou du critère de la naturalité du pouvoir, elle est toujours considérée comme chassée grâce à l'ordre politique. [...]
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