« Toute règle est contrainte, elle gêne, irrite ou lèse. Aussi est-il dans la nature des choses que toutes les règles soient un jour violées ». Ce constat de Philippe Ardant délimite l'article 16 de la Déclaration des Droits de l'Homme, préambule de la Constitution française de 1791, qui stipule que « toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de constitution », et où la notion de constitution se définit comme « la loi fondamentale de l'Etat, dont l'objet spécifique est l'organisation des pouvoirs publics et la détermination de leurs rapports », en symbolisant la « coupure épistémologique » mentionné par Gaston Bachelard, processus de transition d'une structure à une autre et dont l'objet est invariable, c'est à dire où le concept constitutionnel s'ancre autour de celui de l'individu comme fondement d'une certaine forme de société.
De ce fait, la notion de constitution réglemente l'organisation des sociétés démocratiques, elle fonde le pacte national égalitaire incarné par la figure citoyenne comme auteur et sujet de la loi, mais se heurte aujourd'hui à ses propres limites dénoncées par le retour du communautarisme et l'inversion de son processus originel.
Du symbole démocratique issu des origines, en passant par les différentes formes que peut adopter la constitution, l'histoire de cette notion fondatrice transite de la protection nécessaire à la contestation communautaire sur une échelle politique et sociale de plus de deux cents ans en se posant comme l'instrument organisateur du fonctionnement du pouvoir et des relations entre gouvernants et gouvernés.
[...] On trouve dans les textes de Montesquieu et notamment dans De l'Esprit des Lois une forme d'aspiration à ce que la constitution représente dans son ensemble, c'est à dire une loi suprême et non-arbitraire, qui s'associe à une forme de régime politique particulier que Montesquieu distingue de deux autres, à savoir les monarchies et l'honneur, et le despotisme et la peur. C'est pourquoi seule la démocratie et ses valeurs politiques permet l'instauration de la liberté individuelle et de l'égalité de tous, en se fondant sur un Etat de Droit dont la seule issue serait de se bâtir sur la loi des lois De plus, Montesquieu lie intimement la liberté politique du citoyen et le sentiment de sécurité qui se dégage du régime dans lequel il évolue, sécurité qui ne peut être garanti que par la pluralité des institutions démocratiques, et par la séparation des pouvoirs. [...]
[...] La constitution qui jadis s'opposait au communautarisme dirigeant en prônant l'unité nationale semble se trouver depuis le référendum européen dans une impasse, à cet égard elle se heurte à son propre fonctionnement, l'engouement révolutionnaire des premiers systèmes égalitaires est soumis à la contestation sociale et à l'inversion de son mode opératoire, au lieu de construire l'unité elle attise la césure, au lieu de transiter par la rupture elle se fonde sur une peur unitaire, et donc sur un élan communautaire qui vient embrigader ses aspirations fondamentales. La question européenne et la question irakienne démontrent les limites du fondement constitutionnel soumis non pas à l'évolution lente et modérée de la coutume, mais au contraire au choc de la transition et au poids de la rupture, inversant ainsi une logique fondée sur la légitimité d'une institution représentante de l'ensemble individuel en faisant de l'individu n'ont plus le sujet et l'auteur de la loi, mais sa victime. [...]
[...] La Déclaration des Droits de l'Homme figure ainsi en préambule de la constitution de 1791 qui fonde l'organisation des pouvoirs publics et la détermination de leurs rapports, puisant dans les modèles américains et anglais, qui pour l'un se dote d'une constitution écrite et pour l'autre se détermine toujours par une constitution coutumière. In Antigone, Jean Anouilh, Librio Poche, collection Théâtre Paris, où l'auteur met en abîme la pièce de Sophocle au regard de l'Etât Français qui se positionne dans une conception du pouvoir unique, verticale et totalitaire In Œdipe à Colonne, Sophocle, Du Felin Editions Paris 5 In De L'Esprit des Lois, Montesquieu, Flammarion Paris Deux formes de constitution, deux enjeux et une limite contemporaine A. [...]
[...] S'inspirant directement du mode de fonctionnement anglais et de penseurs tels que Bentham qui prêche une conception méta-éthique de la société en promulguant la notion d'utilitarisme, Montesquieu voit dans le régime de l'Angleterre une conceptualisation de l'objet principale qu'est la liberté civile qui arrive à se prémunir de l'arbitraire par son dispositif légal, car reposant sur une constitution Coutumière. Ainsi la Révolution Française s'appuie sur le modèle anglais et sur les hypothèses de penseurs comme Rousseau, Montesquieu et Voltaire, qui voient une société laïque démunit de toute aspiration divine et dont les représentants sont élus par les individus, afin qu'elle puisse exister pour et par le peuple. [...]
[...] La limitation des pouvoirs La constitution est l'incarnation de l'Etat au même titre que l'hymne, la monnaie ou le drapeau, elle relève de l'identité nationale en se démarquant des anciens régimes à travers une rupture qu'elle illustre par la limitation des pouvoirs, en plaçant l'individu sur le devant de la scène étatique. De part ses origines, la constitution est un pacte fondateur qui tire sa légitimité grâce au contrat qu'elle passe avec les citoyens, et dont on retrouve les premières sources dans les écrits de Locke, Hobbes et Rousseau, qui postulent pour une société dont l'individu serait le centre, rompant ainsi avec le pouvoir unique et divin de sociétés arbitraires où l'individu n'a de réalité que par des épiphénomènes isolés. [...]
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