La volonté exprimée par le conseil de l'UE de réformer la législation en vigueur concernant les substances chimiques aboutit en 2001 à la présentation d'un projet de règlement européen baptisé REACH (registration, evaluation, autorization of chemicals). L'enjeu de se projet est de taille puisqu'il vise à protéger et améliorer la santé publique, à éviter la contamination de l'environnement par des substances chimiques persistantes, bioaccumulables, et toxiques, tout en maintenant l'industrie chimique à un niveau d'exploitation élevé. Il faut savoir qu'aujourd'hui encore, 2000 à 3000 substances sont mises sur le marché chaque année en Europe, sans aucun contrôle.
Nous avons donc deux acteurs principaux qui s'affrontent : l'industrie chimique (qui représente 31% de la chimie mondiale, soit un excédent commercial de 41 milliards d'euros chaque année, et 5 millions d'emplois en UE, qui compte plusieurs multinationales influentes ainsi que quelques 36000 PME), et les associations de défense de l'environnement, de la santé publique, les ONG et les syndicats qui se battent pour voir reculer le nombre de cancers, de maladies respiratoires liées aux substances chimiques. Ce bras de fer que se livrent les deux parties concernées est arbitré par les différentes institutions européennes chargées d'élaborer, d'amender puis de ratifier le projet de règlement. Nous allons voir en quoi les discussions sur le projet REACH sont révélatrices du dysfonctionnement des institutions européennes.
[...] III- Le gros éléphant (les institutions européennes) accouchera-t-il d'une petite souris (un projet REACH dénaturé)? Le mécontentement général Selon G. Sacconi, le rapporteur de la commission de l'environnement, dans le projet qui va être présenté au parlement le 15 novembre "l'objectif de protection de l'environnement et de la santé publique a été sauvé". Cet avis n'est pas partagé par les verts ni par les organisations écologiques qui accusent la commission d'avoir cédé au lobbying de l'industrie et des Etats-Unis. Selon WWF, qui a réalisé une étude révélant la présence de substances chimiques potentiellement dangereuses dans des échantillons sanguins prélevés sur trois générations d'Européens, REACH a un énorme potentiel mais est encore trop faible. [...]
[...] Slogan : Messieurs, jusqu'où êtes-vous prêts à aller pour satisfaire l'industrie chimique? La dénaturation du projet de règlement Les pressions des lobbies sont telles que les institutions européennes en viennent à modifier le projet de règlement à travers les nombreux amendements déposés par les différentes commissions impliquées dont les deux plus importantes sont les commissions de l'industrie et du marché intérieur, et la commission de l'environnement, l'une plaidant pour des allègements importants en faveur des entreprises et l'autre pour rappeler les exigences sanitaires et environnementales. [...]
[...] Les ONG contestent cet argument en affirmant, qu'au contraire, cette réforme de la législation offre aux entreprises en aval la possibilité de gagner la confiance des consommateurs, et citent en exemple Ikea et Samsung qui se sont engagés à bannir progressivement les substances chimiques dangereuses de l'ensemble de leurs produits. D'autres entreprises telles qu'Unilever ou mark & spencer y voient la possibilité de devenir plus compétitives. Les lobbies insistent également sur le fait que l'application de REACH aurait d'inévitables conséquences protectionnistes. [...]
[...] Ils soulignent encore les effets "corporatistes" de cette directive, qui risque de fortement pénaliser les PME et conduire à de nombreux dépôts de bilan. Le directeur de l'institut Hayek conclut à un suicide économique collectif. Les différentes parties intervenant dans le débat s'opposent également dans l'estimation des coûts: Pour la commission, l'impact total serait de 2,3 milliards sur 11ans, selon une étude commandée au cabinet KPMG : financement qui pourra être absorbé par les industries chimiques. Une autre étude, commandée aux chercheurs de Sheffield University démontre que REACH pourrait faire économiser 3,5 milliards d'Euros sur 10 ans au système de Sécurité Sociale de l'UE. [...]
[...] Possibilité pour les entreprises de se regrouper en consortiums, partage des données et des coûts. Un allègement des informations à fournir à la future agence des produits chimiques pour les substances produites de 1 à 10 tonnes. Ces informations ne concernent plus que 20000 substances (pour 30000 dans la première proposition de la commission). Sur ces informations, l'agence pourra effectuer des contrôles et pourra annuler les enregistrements en cas de non respect des règles. En ce qui concerne les substances produites entre 10 et 100 tonnes par an, il est prévu de prolonger la période de pré enregistrement de 18 mois, période pendant laquelle les experts définiront les tests et informations à fournir. [...]
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