"Je partirai quand vos amis ne racketteront plus. Je partirai quand vos amis n'assassineront plus dans les fêtes de village, quand vos amis ne poseront plus de bombes qui déconstruisent l'avenir." Ces mots sont de Bernard Bonnet, le successeur de Claude Erignac au poste de préfet de Corse. Il s'adressait en 1998 aux représentants de la coalition indépendantiste Corsica Nazione à l'Assemblée de Corse.
Quelques années plus tard, il est condamné dans l'affaire des paillotes, où il est accusé d'avoir ordonné de mettre le feu à deux restaurants de plage construits illégalement sur le domaine public. Mais, selon Jacques Vergès, le célèbre avocat, l'opération paillote n'aurait été "qu'une manipulation barbouzarde visant à éliminer un préfet de Corse qui devenait gênant pour un gouvernement qui s'apprêtait à dialoguer avec les clandestins."
Au final, cette affaire manque de limpidité, et elle traduit bien certains aspects spécifiques à la «question corse» (une contestation diffuse et qui se veut insaisissable par une administration assez passive, ou encore la Corse comme lieu de passions et de violence exacerbées) qui rejoignent les clichés véhiculés par Mérimée, dans sa nouvelle "Colomba", par exemple, ou plus récemment par Pétillon dans "L'Enquête corse".
La "question corse" à proprement parler apparaît dans les années 1960-1970, avec l'émergence de véritables mouvements de violence nationaliste à prétention séparatiste.
Cette question corse, elle se pose comme un défi à l'Etat. Alors comment l'Etat français la traite-t-il ?
[...] L'enjeu concerne à présent les usages qui pourraient être faits des nouvelles institutions promises et accordées à la Corse. Pour Jean-Louis Briquet, qui est chercheur au CERI de Sciences Po, risque est que, prises en charge par des milieux affairistes et satisfaisant les exigences d'une nouvelle oligarchie locale modernisée ces institutions ne puissent être en mesure de servir à l'expression politique de la société civile insulaire et la mobilisation démocratique dont certaines de ses composantes pourraient être porteuses.» En d'autres termes, est-ce que le «problème» corse ne résidait pas plutôt dans le système nobiliaire et clanique que dans les contestations identitaires, parties de catégories de la population plus humbles ? [...]
[...] La question corse partirai quand vos amis ne racketteront plus. Je partirai quand vos amis n'assassineront plus dans les fêtes de village, quand vos amis ne poseront plus de bombes qui déconstruisent l'avenir.» Ces mots sont de Bernard Bonnet, le successeur de Claude Erignac au poste de préfet de Corse. Il s'adressait en 1998 aux représentants de la coalition indépendantiste Corsica Nazione à l'Assemblée de Corse. Quelques années plus tard, il est condamné dans l'affaire des paillotes, où il est accusé d'avoir ordonné de mettre le feu à deux restaurants de plage construits illégalement sur le domaine public. [...]
[...] Aux origines de la question corse A. Une géographie contraignante D'abord, la Corse souffre d'une géographie contraignante. C'est un peu, comme on la décrit souvent, «une montagne dans la mer». Malgré ses 1000 kilomètres de côtes, elle n'a que peu d'abris naturels, et la montagne couvre la majeure partie de l'île. Par ailleurs, les espaces remarquables sont protégés, et l'urbanisation est tenue de se faire dans la continuité des constructions déjà existantes, ce qui a pour conséquence de «geler» l'essentiel des terres sur lesquelles il serait possible de construire. [...]
[...] Dans ce contexte, l'accès aux ressources sociales dépend de l'insertion dans les réseaux du pouvoir politico- administratif local, infiltré par le système notabiliaire et clanique. II. L'affirmation politique de la contestation Les insatisfactions, les tensions et les revendications qui ne manquaient pas de naître dans un tel contexte ont été en large partie prises en charge par les mouvements régionalistes, autonomistes puis, plus tard, nationalistes. A. L'émergence de la contestation identitaire . La contestation identitaire, qui apparaît dans le milieu des années soixante, propose des modèles d'interprétation de la situation corse qui prévalent encore aujourd'hui. [...]
[...] L'État est présenté comme le responsable de la colonisation de l'île. Ces mouvements s'imposent rapidement comme les représentants légitimes des forces vives insulaires : notamment les exclus du système notabiliaire. Ils s'attaquent au pouvoir des clans et entament leur monopole sur les réseaux de la négociation publique. B . Face au système notabiliaire conservateur Dès le début, les notables combattent la contestation identitaire et cherchent à la disqualifier, pour préserver leur influence. A la différence de ce qui est advenu dans d'autres régions françaises où la revendication régionaliste a été aussi très active (en Bretagne ou dans le Sud de la France par exemple), les acteurs de la contestation en corse n'ont pas été associés au système politique officiel. [...]
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