Aujourd'hui, la Turquie apparaît au cœur d'un débat passionné quant à son intégration à l'Union Européenne. Les arguments souvent évoqués sont ceux concernant les droits de l'homme, la reconnaissance du génocide arménien, ou encore la peur d'une supposée « menace islamiste ». Néanmoins, il est rarement fait état de la réalité du régime politique turc, assez méconnu par ailleurs. La Turquie est pourtant une République laïque parlementaire. Les institutions turques actuelles ont été mises en place par la Constitution du 7 novembre 1982, qui fait suite au coup d'état militaire du 12 septembre 1980. Cet événement définit les équilibres politiques actuels, c'est-à-dire, l'organisation du pouvoir, la forme qu'il prend et les rapports entre les institutions. Durant les 2 ans qui suivirent le coup d'état, un état de siége avait été instauré, l'Assemblée Nationale renvoyée, les syndicats et les associations idéologiques interdits. La Constitution de 1982 met pourtant en place une République parlementaire monocamérale basée sur la séparation des pouvoirs et la souveraineté du Parlement et acceptant le multipartisme.
Pour autant, la République turque date de bien plus longtemps. La Turquie telle qu'on la connaît aujourd'hui (géographiquement et politiquement), existe depuis le 20 octobre 1923, date de sa proclamation. La guerre d'Indépendance qui dura de 1919 à 1922 a permis le démantèlement de l'empire Ottoman, l'abolition de la monarchie constitutionnelle (le 1ér novembre 1922) et la formation de la Turquie. Mustafa Kemal, premier artisan de cette guerre d'indépendance devint le premier président du pays. Ce dernier, au pouvoir jusqu'en 1938, a beaucoup œuvré dans le sens d'une modernisation et d'une occidentalisation du pays. La laïcité (c'est-à-dire, l'absence de toute référence religieuse dans la Constitution) qu'il avait imposée en 1928, n'a jamais été remise en cause.
L'histoire de la jeune République turque reste alors jalonnée de violences intercommunautaires, de crises politiques et économiques.
De graves troubles identitaires marquent l'histoire du pays. En effet, Mustafa Kemal a construit la Turquie sur la base d'une identité nationale turque, faisant table rase d'un passé immédiat, et donc d'une négation de ses réalités (pluralités culturelles) et de ses racines. Ainsi, le régime politique turc se construit à la fois sur cette idée nationale et grâce à une présence forte d'institutions sécuritaires comme l'armée et la police. C'est cette présence forte d'organes militaires imbriqués dans le pouvoir politique qui permet de dire que la Turquie est une République sécuritaire comportant aussi des éléments démocratiques.
Ainsi, dans quelle mesure la place de l'armée dans les institutions empêche-t-elle de qualifier le régime politique turc de démocratie ?
Si, d'une part, les caractéristiques de la République parlementaire de Turquie semblent en partie gêner le respect de certaines libertés fondamentales, d'autre part, la réalité de cette République sécuritaire, qui caractérise le régime en dernier ressort, limite l'installation d'une vraie démocratie.
[...] Dès lors, aucune majorité stable ne sort des urnes et les coalitions formées ne tiennent pas, entraînant une forte instabilité gouvernementale. Enfin, les partis politiques se présentent souvent comme des organisations clientélistes, résistant mal à la corruption et aux pratiques illégales, sans légitimité populaire forte. Bien que la République turque montre des éléments de démocratie au travers d'élections législatives libres, ou d'une grande liberté de la presse, le fonctionnement réel des institutions semble difficile. La souveraineté du Parlement est en effet limitée. [...]
[...] Elle le définit en opposition à la conception allemande (par le sang), et met en avant l'adhésion à un projet politique et à une culture commune. Cependant, cette même conception permet d'exclure du champ politique des courants de pensée pourtant légitimes car ne correspondant pas à l'idée nationale turque. Ainsi, on peut comprendre pourquoi la Turquie qui abrite différentes minorités ethniques ou religieuses a du mal à régler les conflits identitaires. Les difficultés de la République turque à gérer les problèmes identitaires Une République basée sur l'idée nationale permet de légitimer l'interdiction de partis politiques par le biais de la Cour Constitutionnelle. [...]
[...] L'histoire de la jeune République turque reste alors jalonnée de violences intercommunautaires, de crises politiques et économiques. De graves troubles identitaires marquent l'histoire du pays. En effet, Mustafa Kemal a construit la Turquie sur la base d'une identité nationale turque, faisant table rase d'un passé immédiat, et donc d'une négation de ses réalités (pluralités culturelles) et de ses racines. Ainsi, le régime politique turc se construit à la fois sur cette idée nationale et grâce à une présence forte d'institutions sécuritaires comme l'armée et la police. [...]
[...] On peut notamment mesurer son influence à travers la lutte lancée contre les islamistes qui est passée par une résolution du conseil en février 1997 sur la réforme de l'éducation. Aussi, la levée des immunités des parlementaires kurdes après la guérilla du PKK en 1994 pour permettre leur condamnation est une décision du conseil. D'autre part, son pouvoir est tel qu'il influe directement sur le maintien ou non des gouvernements en place. En 1997, le gouvernement de coalition du parti islamiste sorti vainqueur des élections : le Refah dirigé par Erbakan en a fait l'expérience. Cette coalition devint rapidement la bête noire des militaires. [...]
[...] D'autre part, la République turque est fortement nationaliste, ce qui est également un frein à une pratique politique paisible. Une République basée sur le nationalisme La République de Turquie s'est construite à travers l'idée du nationalisme turc sous l'impulsion de Mustafa Kemal dans les années 20. Aujourd'hui encore, ce trait est présent dans les institutions. On peut donc parler de République unitaire La difficulté à régler des problèmes identitaires est une conséquence de cette conception unitaire de la République. L'ombre de Mustafa Kemal et l'idée de République unitaire Afin de construire une nation turque après le démantèlement de l'Empire Ottoman, Mustafa Kemal s'est servi du concept de nationalisme pour tenter d'unifier le pays autour de valeurs communes. [...]
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