Dans un article publié au tournant des années 80 et intitulé « l'art d'ignorer les pauvres », John Kenneth Galbraith, l'économiste canadien et ancien conseiller économique des présidents américains Roosevelt ou J.F. Kennedy, souligne que le défaut de liberté imposé aux riches, par la fiscalité, est « bien peu de choses » eu égard aux gains de liberté accordé aux pauvres dès lors que la société leur accorde un revenu. Combattre la pauvreté, c'est combattre un problème alors posé dans des termes nouveaux à l'entrée dans les années 90 : l'exclusion sociale.
Une telle vision des choses, dans un contexte de remise en cause des Etats-Providence sous le double effet d'une crise de légitimité et d'une crise économique, renouvelle quelque peu les perspectives de traitement social, politique, et économique, de l'exclusion. En effet, la problématique de l'exclusion sociale, apparue à la fin des années 80 avec la montée du chômage de masse et la création de diverses formes de précarité sociale liée, au sein des sociétés développées, est vraiment symptomatique d'une défiance envers l'Etat, pourtant acteur prépondérant de la protection sociale. Si la lutte contre l'exclusion sociale est bien du ressort des politiques sociales de l'Etat ainsi que des systèmes institutionnels de sécurité sociale, protégeant contre les risques maladie, chômage ou vieillesse, il s'agit aussi dans le même temps de politiques plus variées comme la politique de l'emploi, les politiques transversales de la ville ou les politiques d'immigration. En somme, la protection sociale est-elle réellement le premier acteur de la lutte contre l'exclusion ?
[...] Dans le cas français, force est de constater que l'aggravation de l'exclusion sociale chez certaines franges de la population a été l'occasion d'enrichir la mosaïque institutionnelle de la sécurité sociale, née des ordonnances de Pierre Laroque en 1945, de nouveaux mécanismes de solidarité nationale, au fonctionnement non redistributif, dont le financement peut être assuré par la fiscalité, et qui ont justement pour but d'intégrer à la société des populations marginalisées. Le Revenu Minimum d'Insertion, créé sous l'impulsion de Michel Rocard en 1988, est le principal exemple et outil de ces nouveaux dispositifs d'assistance inventés par les ingénieurs économiques et sociaux des Etats-Providence. Conçu comme un remède à la disqualification sociale, le R.M.I. [...]
[...] Dans un sens restreint, la protection sociale demeure l'outil principal de lutte contre l'exclusion, apparue dans les années 80 comme la forme principale de pauvreté économique et sociale dans les pays riches Toutefois, une diversification des politiques sociales est apparue nécessaire pour contrer de manière plus efficace l'exclusion sociale dont est victime une part non négligeable de citoyens, que ce soit en matière d'éducation, de santé, d'emploi, de logement, ou d'égalité des chances, comme en témoigne le cas d'espèce français (II). I. Les formes traditionnelles de lutte contre l'exclusion sociale : l'organisation et le renouvellement des Etats- Providence modernes face à l'exclusion. A. Définition de l'exclusion sociale. B. Extension de la notion d'exclusion sociale avec la crise du travail salarié. [...]
[...] Les politiques sociales sectorielles et l'enjeu d'une ouverture à la capitalisation. Tout d'abord, on peut souligner la fécondité avec laquelle les divers systèmes de protection sociale ont pu s'organiser puis se renouveler pour faire face à l'émergence d'une nouvelle dynamique de la pauvreté : l'exclusion sociale. Pour ce faire, nous pouvons commencer par définir l'exclusion sociale avant d'en préciser les contours et différentes manifestations. Ensuite nous verrons quelles sont les principales stratégies choisies par les Etats- Providence pour contrer ce phénomène. [...]
[...] Parmi cette population, le risque d'une désaffiliation sociale est grand. Du fait de l'opacité du système d'assurances sociales (plus de 100 régimes assurantiels publics en France), un abandon des prestations sociales de la part des ayants droit sociaux peut avoir lieu. Pour reprendre les termes de Robert Castel, une véritable insécurité sociale est donc née, paradoxalement, aux mêmes moments qu'était organisée une protection sociale ciblée contre les risques. La réception des minima sociaux, se faisant de plus en plus sous condition de ressources, peut aussi se décrire chez certains individus peu adaptés à l'assistance en une véritable disqualification sociale selon les termes du sociologue Serge Paugam. [...]
[...] D'autant plus difficiles à contrer qu'elles sont variées, les sources de fragilisation sociale (licenciement, accident biographique comme un deuil, un divorce ) sont donc compensées chez les populations les plus pauvres par l'existence a minima d'un seuil unique permettant de subvenir à ses besoins primaires tout en activant un processus d'intégration sociale. Les travaux d'utilité collective qui sont plus ou moins l'origine expérimentale du R.M.I. ont par exemple démontré leur intérêt pour certains individus désocialisés par une inconnaissance fondamentale de l'intérêt individuel du travail. Cette idée d'assistance sous condition d'un témoignage de bonne volonté est donc reprise par le R.M.I. nouvellement créé. De surcroît, pour souligner l'apport du R.M.I., des théories psychologiques comme la fameuse pyramide des besoins d'Abraham Maslow montrent bien que les besoins humains sont hiérarchisés. [...]
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