Au début des années 1970, si l'Europe est profondément divisée entre le camp occidental et le camp communiste, on ne peut cependant pas parler d'unicité en ce qui concerne les régimes de l'Europe occidentale. En effet, la démocratie libérale et pluraliste n'est pas présente dans tous les pays qui la composent. Les dictatures militaires et policières telles que l'Espagne, le Portugal et la Grèce coexistent avec de véritables régimes parlementaires libéraux comme la France, l'Italie ou encore l'Allemagne. Cependant, le renouvellement des dirigeants, l'alternance des forces au pouvoir n'est pas quelque chose d'habituel et d'évident. Les années 1970 annoncent alors une vague de changement puisqu'elles s'ouvrent avec l'accession des sociaux-démocrates au pouvoir en Allemagne en 1969.
L'alternance, comme l'écrit Jean-Louis Quermonne dans son ouvrage, L'Alternance au pouvoir, « opère un changement de rôle entre les forces politiques situées dans l'opposition, qu'une élection au suffrage universel fait accéder au pouvoir, et d'autres forces politiques qui renoncent provisoirement au pouvoir pour entrer dans l'opposition, » ceci s'effectuant dans le respect du régime en vigueur. Ce phénomène est souvent considéré comme une caractéristique essentielle des démocraties qui fonctionnent. Si elle a longtemps été l'apanage des régimes anglo-saxons tels que celui de la Grande-Bretagne où le bipartisme s'est imposé, l'alternance rythme aujourd'hui la vie politique de la plupart des démocraties de l'Europe occidentale : la France, l'Allemagne, l'Espagne, le Portugal, l'Italie… Ainsi, en 2002, les gaullistes sont revenus au pouvoir en France après avoir passés cinq ans dans l'opposition. De même, en mars 2004, le PSOE a remporté les législatives espagnoles face au PP d'Aznar.
Dès lors, en quoi la démocratie libérale, caractérisée par l'alternance au pouvoir de forces politiques respectant les règles du jeu démocratique, s'est-elle imposée en Europe occidentale depuis les années 1970 ? On se concentrera pour cette étude aux pays appartenant plus particulièrement à l'Europe des Quinze, c'est-à-dire à l'Union Européenne telle qu'elle était en 1995.
[...] Conclusion L'alternance, si elle ne constituait pas un processus politique habituel et normal pour la plupart des pays européens dans les années 1970, semble aujourd'hui s'être banalisée. Cette décennie a en effet vu la fin des dictatures autoritaires méridionales et l'implantation de la démocratie libérale à l'ensemble de l'Europe occidentale. Par la suite, on a pu voir des forces conservatrices succéder à des forces progressistes et des forces progressistes succéder à des forces conservatrices. Des pays ont ainsi pu connaître de nombreuses alternances telle la France où on peut en compter six en l'espace de vingt ans. [...]
[...] La social-démocratie, bien implantée dans le nord de l'Europe, semble alors triompher presque partout. De même, cette nouvelle classe politique au pouvoir semble vouloir répondre aux attentes exprimées par la société à l'occasion du mois de mai de l'année 1968 tout en évitant de provoquer un véritable bouleversement de fond en comble. Cependant, l'alternance, si elle se confirme et commence à s'inscrire dans les habitudes pour un certain nombre de pays, se traduit aussi par la défaite des sociaux-démocrates est une alternance historique pour la Suède puisque le parti d'Olof Palme régnait sans partage sur le pays de Bernadotte depuis 1932. [...]
[...] Dès lors, en quoi la démocratie libérale, caractérisée par l'alternance au pouvoir de forces politiques respectant les règles du jeu démocratique, s'est-elle imposée en Europe occidentale depuis les années 1970 ? On se concentrera pour cette étude aux pays appartenant plus particulièrement à l'Europe des Quinze, c'est-à-dire à l'Union Européenne telle qu'elle était en 1995. Si l'alternance au pouvoir apparaît comme un phénomène nouveau, voire exceptionnel et cependant non généralisé dans les pays d'Europe occidentale au cours des années 1970 Les années 1970 voient la chute des dictatures d'Europe méridionale, l'extension de la démocratie libérale à cette même région Les régimes autoritaires d'Europe méridionale, du fait de la mondialisation, de leur inscription dans le camp occidental et de leur relative ouverture économique apparaissent de plus en plus anachroniques dans une région où semblent s'uniformiser les systèmes politiques. [...]
[...] L'alternance : un changement dans la continuité alors que les Européens doivent réagir face à la crise économique La victime de la crise des années 1970 ne semble pas être la démocratie mais plutôt l'Etat-Providence, fortement implanté en Scandinavie depuis de longues années, et développé par le reste des démocraties libérales européennes plus particulièrement après 1945. La crise de la social-démocratie au nord de l'Europe est incarnée par la critique d'un Etat-Providence jugé trop dispendieux pour une efficacité jugée elle aussi insatisfaisante. Cependant, les partis bourgeois revenus au pouvoir ne remettent pas complètement en cause ce qui a été instauré par leurs prédécesseurs sauf en Grande-Bretagne où l'alternance de 1979, l'effondrement des travaillistes et l'arrivée de Margaret Thatcher au pouvoir se traduit par l'application d'une politique néolibérale radicale. [...]
[...] Toutes ces évolutions ont pour conséquence de favoriser l'émergence de nouvelles forces politiques contestataires ou innovantes. Ainsi, l'extrême droite européenne surfe sur les thèmes traditionnels de l'insécurité et du chômage et obtient des résultats électoraux conséquents depuis les années 1980. En 1986, le Front National entre à l'Assemblée Nationale, avec l'élection d'une vingtaine de députés. Le Parti libéral allemand remporte alors quelques succès ainsi que le parti libéral autrichien (qui enverra plus tard certains de ses membres participer au gouvernement de Wolfgang Schlüssel.) En Italie, les monarchistes et autres néo-fascistes se retrouvent au sein du MSI. [...]
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