L'idée d'une rémunération au mérite est inspirée du secteur privé, où elle vise à motiver les salariés au travail. De nombreux écrits ont été réalisés sur la motivation au travail, ainsi on peut argumenter en faveur de la rémunération au mérite en avançant la théorie des attentes, initiée dans les années 60 avec les travaux de Vroom et de Porter et Lawler. Ceux-ci expliquent la motivation en fonction d'un axe du temps. Cette motivation est déterminée d'une part par le passé : c'est-à-dire l'engagement que l'on a pris auprès d'un employeur à faire un travail, mais aussi en fonction du futur, autrement dit, des retombées que peut apporter ce travail s'il est bien fait, et notamment les retombées financières. D'où l'entrée en jeu de la rémunération au mérite. Une rémunération conditionnelle basée sur un niveau de résultat incite l'individu à améliorer son travail. Jusque là, la logique paraît assez simple, et donc techniquement applicable au secteur public, mais des difficultés apparaissent lorsqu'il s'agit d'évaluer la performance. En effet, si l'évaluation quantitative, commerciale est aisée dans les services marchands, elle l'est beaucoup moins lorsqu'il s'agit de services non marchands et de services publics en général où le profit n'est pas le moteur de l'activité. Il s'agit donc de mettre en place un système d'évaluation du mérite basé sur d'autres critères que la rentabilité, comme la qualité ou la rapidité.
Ces questions sont aujourd'hui au centre du débat sur la modernisation de l'Etat et des services publics. Avec la mise en œuvre de la LOLF, on tente d'introduire de nouveaux outils inspirés par le mouvement appelé « Nouveau Management Public », dont l'idée générale est de développer des méthodes de gestion et de management comme on en trouve depuis longtemps dans le secteur privé, mais sans forcément les transposer telles quelles. La LOLF consacre l'idée d'une rémunération au mérite qui se traduirait par une modulation du régime indemnitaire flexible et réversible. Avec la circulaire du premier ministre datant du 25 juin 2003 sur « Les stratégies ministérielles de réforme », le principe de rémunération au mérite a été adopté pour les emplois à la discrétion du gouvernement. Ainsi, depuis dix ans, les textes énoncent la nécessité de mieux prendre en compte dans la rémunération les responsabilités exercées et les résultats obtenus par les fonctionnaires. Reste le problème de l'individualisation de la rémunération au mérite, qui apparaît comme contraire au caractère impersonnel de la gestion administrative des agents publics.
Il convient de noter que le terme de mérite n'apparaît nulle part dans les textes relatifs au droit de la fonction publique, il est seulement fait référence à la « valeur professionnelle ». Dans son rapport d'avril 2004 sur la Gestion des Régimes Indemnitaires et la Modulation des Primes, le Comité d'Enquête sur le Coût et le Rendement des Services Publics définit le mérite comme la prise en compte des notions de valeur professionnelle et de performance selon l'engagement professionnel et ses résultats. Il convient de souligner que si ce rapport utilise bien le terme de rémunération au mérite, cette expression demeure toujours entre guillemets, ce qui traduit la frilosité générale à l'idée d'introduire une telle notion dans le vocabulaire courant de la fonction publique.
En outre, le rapport aborde la rémunération au mérite de façon très large, en incluant le système d'avancement. Le Comité donne ainsi l'exemple du MINEFI, où la démarche a d'abord porté sur la rénovation de la notation et de l'évaluation, et c'est l'avancement qui va permettre d'accroître la rémunération. Nous n'aborderons pas ici la question de l'avancement, car elle nous paraît être distincte de celle de la rémunération au mérite au sens strict, autrement dit l'incitation directe à la performance par des instruments purement financiers.
Au-delà des questions de régularité des indemnités se pose celle, plus générale du caractère incitatif de l'ensemble du système de rémunération public. Peut-on tenir compte de la performance individuelle alors que les fonctionnaires remplissent des missions d'intérêt général ? Quels critères d'évaluation convient-il alors de retenir ?
Nous traiterons dans un premier temps des expériences qui sont menées en matière de rémunération au mérite, en soulignant que la traduction du mérite par le régime indemnitaire est actuellement insuffisante, d'où l'élaboration de nouveau modèles de prise en compte du mérite. Enfin, il s'agira d'analyser les obstacles à la généralisation de la rémunération au mérite, qu'ils se situent au niveau même de son instauration, ou dans son application pratique.
[...] (Comme au Canada, une prime annuelle attribuée à l'agent en fonction de sa performance, notée sur une échelle de 1 à 3 (très satisfaisant, satisfaisant, non satisfaisant). Un agent noté très satisfaisant reçoit ainsi une prime de 10% de son salaire annuel de base, tandis qu'un agent noté non satisfaisant ne perçoit aucune prime. Rq : ici rémunération au mérite = rémunération à la performance Quelque soit le pays les questions concernant la prise en compte du mérite relève toujours des modalités d'évaluation : comment et à quel moment évaluer. Comment évaluer ? [...]
[...] Article 2 La prime forfaitaire est attribuée à raison de la fonction exercée. Article 3 La prime modulable est attribuée en fonction de la contribution du magistrat au bon fonctionnement de l'institution judiciaire. Le syndicat de la magistrature et un magistrat à titre individuel ont contesté le décret, affirmant qu'une telle prime était contraire au principe d'indépendance des magistrats, qui figure à l'article 64 de la constitution. Le CE a rejeté ce décret ; pour lui, la création d'une prime modulable, destinée à tenir compte de la quantité et la qualité du travail fourni par un magistrat, ne porte, par elle-même, aucune atteinte l'indépendance des magistrats dans l'exercice de leurs fonctions. [...]
[...] Ensuite, il y a aussi un coefficient individuel, qui doit traduire la manière de servir de l'agent, appréciée au terme d'une évaluation. Ces deux coefficients sont fixés par le ministre concerné et dans une fourchette de 0 à 3. Enfin, l'article 7 du décret prévoit que «pour les personnes occupant un emploi de directeur d'administration centrale, l'IFR peut permettre, à titre expérimentale en 2004 et 2005, la prise en compte des résultats atteints. Cette refonte du régime indemnitaire vise à accroître la transparence et la rationalisation des régimes indemnitaires, et ouvre la voie à une diffusion de la rémunération au mérite. [...]
[...] Toutefois, les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux magistrats exerçant à la Cour de cassation, à l'exception de ceux exerçant les fonctions de premier président d'une cour d'appel, de président du tribunal de grande instance de Paris et de procureur de la République près ce tribunal. Cette indemnité comprend : Une prime forfaitaire ; Une prime modulable ; Une prime pour travaux supplémentaires. Certaines catégories de magistrats auxquels le présent décret est applicable peuvent en outre percevoir une prime complémentaire à raison d'attributions spécifiques qui leur sont confiées. Article 2 La prime forfaitaire est attribuée à raison de la fonction exercée. Article 3 La prime modulable est attribuée en fonction de la contribution du magistrat au bon fonctionnement de l'institution judiciaire. [...]
[...] De plus, selon la CGT cette prise en compte du mérite dans la rémunération en opposition avec le principe d'égalité de traitement des fonctionnaires qui figurent dans le statut général des fonctionnaires. L'égalité de traitement entre les agents est une garantie d'indépendance dans la mesure où le fonctionnaire peut s'opposer à une décision de sa hiérarchie s'il l'estime contraire à l'intérêt général mais le fonctionnaire ne pourra plus le faire si la personne qui juge pour établir la rémunération au mérite est son supérieur. [...]
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