Du début de la IIIème République aux années 70, les scandales médiatiques impliquant des hommes politiques sont peu nombreux, ils portent essentiellement sur des cas d'escroquerie à l'épargne (ex : le scandale de Panama), ils n'impliquent que secondairement des hommes politiques, et ceux-ci sont rarement condamnés.
A partir des années 80, non seulement les « affaires » dans la presse se multiplient, mais elles changent de nature. Ce sont pour l'essentiel des « affaires politico-financières », cad des cas « d'enrichissement personnel » (ex : affaire Jacques Médecin à Nice, « affaire Carignon », « affaire Longuet ») ou de « financement occulte des activités politiques et partisanes » (ex : « affaire Urba » sur le financement occulte du PS, le scandale de la MNEF, affaire Elf).
Mais il s'agit aussi de « faits divers politiques » (ex : affaire « Greenpeace », affaire « Carrefour du Développement », scandale du sang contaminé, de l'amiante, de la vache folle), = des affaires qui constituent un enjeu politique du fait de la notoriété des protagonistes politiques, des services de l'Etat engagés, ou du lien entre le secteur de l'affaire avec l'Etat.
Cette montée des affaires est-elle due à l'émergence du journalisme d'investigation dans le champ médiatique ? L'apparition de journalistes d'investigation a-t-elle provoqué la découverte et la médiatisation d'affaires qui auparavant restaient dissimulées parce que la presse ne les découvrait pas ? Ou en réalité, la montée des affaires et du journalisme d'investigation n'a-t-elle pas été rendue possible par la rencontre des transformations
- du champ politique, qui l'ont rendu plus propice aux affaires
- du champ judiciaire, qui ont permis la sortie de ces affaires
- du champ médiatique, qui ont permis au public d'être au courant de ces affaires ?
De plus la médiatisation d'un scandale est-elle uniquement le fruit du travail d'enquête, comme tend à le présenter le champ médiatique ? Ou n'est-elle pas plutôt le résultat de l'utilisation comme ressource de la médiatisation des affaires par les différents acteurs des scandales ?
[...] Le recrutement n'est donc plus soumis au contrôle du pouvoir politique. Ce nouveau mode de recrutement a aussi des effets sur l'origine sociologique des magistrats, issus de manière croissante des classes moyennes salariés et de moins en moins des classes supérieures. On a donc une relative démocratisation du recrutement et un relâchement de la proximité sociale unissant les magistrats et les notables politiques et sociaux locaux. (Philippe Garraud) Ce nouveau mode de recrutement La mise en place d'une véritable formation professionnelle = La création de l'ENM et son transfert à Bordeaux en 72 permettent la mise en place d'une véritable formation professionnelle des magistrats, qui se substitue à l'apprentissage sur le tas qui prévalait avant. [...]
[...] Les premiers journalistes d'investigation, ds les années 60 et 70, occupent une position homologue aux magistrats qui à partir des années 70 vont être les acteurs de l'autonomisation du champ judiciaire à l'égard du politique. Ils sont particulièrement disposés à avoir une attitude critique par rapport au pouvoir, et plus généralement un humeur anti-institutionnelle. Nombre d'entre eux ont un passé politique de gauche ou ont été politisés très jeunes, et ont été déçus par la politique, et plus particulièrement par la gauche au pouvoir. Beaucoup ont suivi des études supérieures à l'université ou dans des grandes écoles, rarement dans des écoles professionnelles. [...]
[...] Les affaires, pcq'on croit qu'elles provoquent une augmentation des ventes, deviennent un enjeu commercial majeur. Ex : l'affaire du sang contaminé a marqué l'extension de ce traitement commercial de l'information au secteur de l'information médicale, à la faveur d'une épidémie dont les caractéristiques favorisaient un traitement commercial de l'info. C'est ainsi qu'à partir des années 80, le modèle du journalisme d'investigation, après avoir fait ses débuts à partir des années 60 dans le Canard Enchaîné, est repris par les journaux nationaux d'information générale et politique. [...]
[...] C'est seulement quand le scandale fut constitué médiatiquement, qu'il suscite l'indignation et s'imposa à l'opinion publique. (Patrick Champagne, Dominique Marchetti) La médiatisation de l'affaire peut également constituer une ressource pour les magistrats, dans leur lutte contre le pouvoir politique et leur hiérarchie qui parfois cherchent à peser sur eux pour que les dossiers soient enterrés. L'intrusion des journalistes dans le champ judiciaire est généralement ressenti par les magistrats comme une contrainte à gérer par la mise en place de stratégies médiatiques, destinées à préserver leur indépendance par rapport à la presse. [...]
[...] Sachant que, on l'a vu précédemment, les fuites ont lieu également entre agences d'exécution. Ces fuites peuvent provenir : - de l'intérieur même du groupe intéressé à la déviance, où une compétition interne naît et sépare entre les bénéficiaires satisfaits et insatisfaits (ex : dans l'affaire Médecin, les révélations à TF1 d'une ancienne associée de J. Médecin, Claudette Pézenas). On l'a vu, cette forme de divulgation de l'affaire intervient d'autant plus que les déviances prennent de l'ampleur et accentuent les tensions au sein du groupe déviant - des marges du groupe déviant : la complexité de l'organisation bureaucratie est facteur de transparence (contrairement à ce qu'on croit souvent) = l'importance des circuits administratifs et l'abondance des documents font qu'une violation massive de normes peu difficilement passer inaperçue. [...]
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