Dans un discours de 1959, Jacques Chaban-Delmas, alors Président de l'Assemblée nationale, exposait la théorie suivante : alors que le Président de la République s'occupe de l'avenir de la France, le premier ministre, lui, s'occupe de celui des Français. C'est ici toute la distinction faite entre les deux hommes détenant le pouvoir exécutif sous la Ve République : l'un est, entre autres, détenteur du pouvoir de représentation de l'unité nationale à l'étranger, tandis que l'autre « dirige l'action du gouvernement », selon les articles 20 et 21 de la Constitution de 1958.
Ainsi, à travers l'article 5 définissant les compétences du Président de la République et l'article 19 de la Constitution traitant de la mise en œuvre des actes effectués par le chef de l'Etat, se traduit l'ombre d'un Président de la République omniprésent, indépendant et avec un large domaine de compétences dans la pratique. De plus, cette prééminence va être accrue par la légitimité que va lui apporter l'élection au suffrage universel mise en place en 1962, qui lui permet d'obtenir la même légitimité que le Parlement, détenteur du pouvoir législatif.
[...] De par les articles 20 et 21 de la constitution, ce dernier pouvait alors mettre en place la politique de la majorité parlementaire pourtant opposée au Président de la République : en effet, doté du pouvoir de détermination de la politique intérieure, du pouvoir réglementaire et de la mise en œuvre de la politique de la nation ; le seul organe pouvant faire face au premier ministre n'est autre que le conseil constitutionnel, garant de la constitution et des libertés fondamentales. Cependant, il existe des tempéraments à cette dominance. En effet, le Président de la République peut refuser de signer des décrets ou encore promulguer de nouvelles lois, comme le fit par deux fois Mitterrand avec des ordonnances de Jacques Chirac. [...]
[...] Classiquement, on considère que Michel Rocard et François Mitterrand ont eu une relation de ce type La cohabitation, un esprit de confiance et d'amitié réciproque selon Jacques Chirac. Selon le cinquième président de la République française, la cohabitation peut se reposer sur de bonnes bases & donner lieu à une politique correcte. En effet, de par cette citation, Jacques Chirac affirme ici qu'une cohabitation, si elle n'est pas le résultat d'un conflit entre deux personnes d'opinions différentes, peut être bénéfique sous la Vème République. [...]
[...] C'est dire le rôle du premier ministre lors d'une situation de fait majoritaire : c'est ici le premier ministre qui a un rôle de représentation, au même titre que le Président de la République lorsque l'on est en présence d'une cohabitation. Un Président de la République restreint lors d'une cohabitation À l'inverser, lorsque le Président de la République n'obtient pas à la suite d'élections législatives, la majorité à la Chambre : il se doit de nommer un premier ministre issu de cette majorité. [...]
[...] Dans le cas où le Chef de l'État possède la majorité à l'Assemblée, c'est véritablement l'Homme fort du Régime : doté d'une légitimité forte et d'un appui tant parlementaire que populaire, ce dernier peut alors se positionner comme prédominant au sein du couple du pouvoir exécutif établi par la constitution de 1958. En effet, bien que ce dernier, de par la constitution ai un domaine réserve dans ses compétences, afin de limiter sur le papier, les différences entre le premier ministre et le Président de la République ; dès la présidence de Valery Giscard d'Estaing, ce domaine réservé sauta dans la pratique. Aujourd'hui, en période de fait majoritaire, il ne fait aucun doute que le Président Sarkozy, nommé aussi communément l'hyper Président ait établi cette hiérarchie au sein de l'exécutif. [...]
[...] L'exécutif dyarchique : source d'une perpétuelle cohabitation ? Dans un entretien télévisé du 14 Juillet 1999, l'ancien Président de la République, Jacques Chirac admit que ( ) dans l'histoire constitutionnelle, tous les régimes ont été des régimes de cohabitation L'ancien Chef de l'État fait ici sans doute référence au flou constitutionnel sur le partage des compétences entre les deux têtes de l'exécutif, impliquant la plupart du temps une certaine concurrence entre eux Il faut cependant nuancer ses propos puisqu'une cohabitation n'est pas toujours source de conflits politiques pour ce dernier, et peut être positive pour la vie institutionnelle du pays De l'obscurité de la Constitution Bon nombre de présidents de la Vème République virent certains de leurs actes critiqués en ce qu'ils débordaient sur les compétences du premier ministre ; et bon nombre de premiers ministres, en période de cohabitation, se sont vus accusés de déborder sur les compétences du chef de l'État en accomplissant tels ou tels autres actes. [...]
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