« Où manque la force, le droit disparaît ; où apparaît la force le droit commence à rayonner ». Cette citation de Maurice Barrès explicite les liens ambigus qui peuvent exister entre le droit et la force. Le droit, et d'autant plus la démocratie, sont des notions qui reposent sur la morale. La force fait référence à la violence, la brutalité et n'est donc pas considérée comme une vertu. Ces notions semblent donc antithétiques et n'ayant aucun lien. Mais le droit et la démocratie, en temps qu'objectif suprême d'un Etat, sont des buts difficilement atteignables. La force peut alors se présenter comme un outil pour parvenir à cet idéal de justice.
Afin de répondre à la question « Peut on fonder le droit et la démocratie sur la force ? », il convient de voir s'il est possible matériellement d'y parvenir, mais il convient surtout de voir s'il est acceptable que l'origine du droit soit la force.
La démocratie au sens grec signifie le « pouvoir du peuple », c'est un système dans lequel les citoyens décident des lois et prennent des décisions au sein d'une Assemblée en votant à la majorité. Le sens moderne désigne un pouvoir constitutionnel, une séparation des pouvoir et un caractère représentatif. L'esprit de la démocratie est la volonté d'une justice pour tous et le respect de la liberté comme bien le plus précieux. Elle diffère donc du droit, ce qui est conforme à une règle, ce qui est légitime, ce qui permet la justice. Le droit positif, qui constitue l'ensemble des lois, des règles et des coutumes d'un Etat, n'a pas toujours comme objectif la recherche de l'égalité. Le droit nazi était en effet un droit discriminant. Une loi n'est donc pas toujours juste. Mais il faut distinguer le droit naturel qui trouve son assise dans la religion, la morale ou la philosophie. Il instaure la notion de bien et de mal. Ce sont par exemple les droits de l'Homme. Le droit doit donc avoir un référent afin qu'il soit reconnu.
Est-ce que la force peut être ce référent du droit ? Est-ce le seul ? Ce fondement est-il légitime et moral ? Il faut donc se demander si la force peut et doit être à l'origine du droit et de la démocratie.
Nous répondrons donc à cette question en trois temps. Nous verrons que historiquement le droit peut être fondé sur la force, mais que ce droit ne permet pas l'établissement d'un droit juste, donc d'une démocratie, et qu'ainsi, pour être légitime, le droit doit avoir d'autres fondements que la force.
[...] Il écrit La seule manière certaine de garder les cités conquises est la destruction. Ainsi, le Prince doit être un personnage amoral qui fait indifféremment le bien et le mal et qui doit fonder son droit sur la force si cela lui est bénéfique. Cette thèse machiavélique a été utilisée à de nombreuses reprises dans l'Histoire, par exemple Robespierre ou Lénine qui, une fois au pouvoir, ont mis entre parenthèse les principes même de leur engagement politique, pour grâce à la violence conserver le pouvoir. [...]
[...] Il écrit en effet: La force ne fait ni raison, ni droit mais il est peut être impossible de s'en passer pour faire respecter le droit et la raison Cela implique aussi, pas de droit sans la garantie d'un pouvoir politique fort et stable. Comme le dit Max Weber l'Etat a le monopole de la violence légitime Ainsi, pour toutes ses raisons, la force est à la base du droit. Or aucune société ne peut survivre sans droit. Mais que nous vivions dans un rapport de force veut-il dire que la force fait droit ? [...]
[...] Pour ces auteurs, le droit naturel préexiste le droit positif. Montesquieu écrit : "Avant qu'il y eut des lois faites il y avait des rapports de justice possibles. Dire qu'il n'y a rien de juste ni d'injuste que ce qu'ordonnent ou défendent les lois positives, c'est dire qu'avant qu'on eut tracé le cercle, tous les rayons n'étaient pas égaux." Ainsi, serait légitime tout droit positif qui respecterait ces grands principes et valeurs. Ce droit serait inhérent à la nature de l'homme et serait le vrai et véritable fondement du droit positif. [...]
[...] Étant donné qu'aucun fait ne contient en lui-même de légitimité, car ce n'est pas parce qu'une chose existe qu'elle est légitime ou juste, il est impossible de fonder le droit sur la force sans le vider de sa substance, de sa fonction normative, prescriptive. On peut ajouter avec Rousseau que " céder à la force est un acte de nécessité, non de volonté". Il faut distinguer l'autorité et la contrainte. Le droit fait autorité, la force ne fait que contrainte. [...]
[...] Il serait donc possible mais également nécessaire de fonder le droit sur la force. En effet, pour des auteurs comme Thomas Hobbes ou Marx, le droit est dépendant de la force. Hobbes énonce dans son ouvrage Léviathan que dans l'état de nature il n'y a pas de droit, pas de règles, pas de permis ni de défendu. Les limites sont celles de la force. "L'homme est un loup pour l'homme". Ils luttent ainsi les uns contre les autres dans une guerre sans merci et sans fin, c'est l'état de guerre permanente. [...]
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