Les partis politiques et la loi d’airain de l’oligarchie – analyse de la thèse de Roberto Michels

Résumé du document

« Le parti, en tant que formation extérieure, mécanisme, machine, ne s'identifie pas nécessairement avec l'ensemble des membres inscrits, et encore moins avec la classe. Devenant une fin en soi, se donnant des buts et des intérêts propres, il se sépare peu à peu de la classe qu'il représente ». C'est ainsi que Robert Michels jette les bases de sa théorie dans son livre « Les partis politiques, essais sur les tendances oligarchiques dans les démocraties ».

Extraits

[...] De même, l'auteur montre bien que les chefs qui détiennent le pouvoir au sein d'un parti ne dissimulent pas leur velléité de restreindre, autant que possible, la liberté de parole avec ceux de leurs collègues qui ne sont pas d'accord avec eux. Une telle description est un euphémisme quand on songe au paroxysme de la terreur qu'a connu, entre autres, le P.C.U.S de l'époque des grandes purges. Le corollaire de cette restriction de la liberté de parole est la centralisation de la décision, qui conduit les fonctionnaires publics à être tenus dans la dépendance la plus stricte à l'égard de l'autorité centrale. [...]

[...] Un parti n'est vraiment un parti que s'il a routinisé ses règles de fonctionnement et de succession, que s'il fait tradition sur une longue période. Deuxième critère : il faut une organisation complète, de l'échelon local à l'échelon national et des relations régulières entre ces niveaux. Un parti politique est donc une structure qui couvre l'ensemble du territoire, régulée selon l'idéal bureaucratique. Ce critère permet de distinguer un véritable parti d'un simple groupe parlementaire qui n'a pas de relais organisés dans l'ensemble de la société. Troisième critère : l'objectif d'un parti doit être la conquête du pouvoir, aussi bien au niveau national que local. [...]

[...] Par cette étude, Michels dénonce les partis socialistes et communistes qui vouent une confiance trop aveugle en l'avenir. Pourtant, les tentatives d'explication de ce processus majeur tournent court selon Pierre Cours-Salies et Jean-Marie Vincent, dans les écrits de Robert Michels qui s'avère incapable de fournir une véritable théorie de l'« oligarchie Selon eux, son principal recours demeure une psychologie sociale dont Gustave Le Bon avait jeté les bases Une analyse encore d'actualité L'auteur formule dans cet ouvrage des intuitions particulièrement pertinentes pour les partis communistes. [...]

[...] En effet, ceux-ci vont s'attacher à complexifier les tâches politiques qui leurs sont assignées, ou tout simplement à rendre toujours plus inaccessible aux militants le langage qui permet de rendre compte des affaires politiques. Ainsi, ils se coupent encore d'avantage de la masse, et conservent leur position dominante en faisant de leur domaine d'intervention un pré carré bien gardé. La division fonctionnelle du travail fait place à la division sociale du travail politique ; L'autonomie des dirigeants : la mystification de la souveraineté populaire, condition de la démocratie L'un des points les plus intéressants et stimulants de ce livre est la dimension de démythification franche du discours officiel et des idées préconçues sur les partis politiques, le plus souvent présentés par leurs dirigeants comme lieux d'expression de la démocratie par excellence. [...]

[...] La caractéristique d' airain de la loi n'est donc pas attribuée suite à une analyse scrupuleuse de l'ensemble des partis, mais du présupposé qui veut que si les socialistes sont eux-mêmes soumis à cette dérive alors qu'ils sont la meilleure incarnation d'un fonctionnement démocratique, alors tous les partis, forcément en deçà, le sont aussi Par ailleurs, à cette limitation politique s'ajoute une limitation géographique nette : les exemples choisis par l'auteur s'inscrivent dans un espace territorial exigu, incluant l'Allemagne, la Grande-Bretagne, la France, les Pays-Bas, accessoirement l'Italie ; ainsi retrouve-t-on très fréquemment les mêmes noms en particulier Lassalle ou Bernstein. Les autres exemples ne sont mentionnés que de manière anecdotique. [...]