Parole antique, parole moderne, tournant machiavélien, action politique, Antiquité, humanisme, démocratie, libération de la parole, dialogue politique, logos, débat, universalité, citoyenneté, vérité effective, bien et mal
Repensant le rapport de l'universel et du particulier, Machiavel va tirer la parole du côté de l'événement, montrant que loin d'être un lieu d'abstraction, elle est ce qui permet au contraire d'épouser les variations du temps présent et de s'ancrer au coeur de l'action politique. Sa pensée est le fruit d'une fusion entre les savoirs antiques, l'histoire des grands hommes et l'expérience même du politique dont il est le spectateur privilégié en tant qu'ancien secrétaire de la seconde chancellerie de Florence.
[...] Or, en se focalisant sur l'action des hommes, c'est pourtant uniquement la singularité de la particularité que Machiavel prend comme objet, se détournant aussi radicalement de la pensée médiévale qui ne pouvait considérer que des universaux. La vérité effective (verità effettuale) L'œuvre du secrétaire florentin est à comprendre à partir de ce refus de l'universalité abstraite et, s'il ne cesse d'articuler la lezione et l 'experienza, c'est parce qu'il cherche toujours à se situer au plus près de l'événement. Faute de pouvoir être dans les lieux du pouvoir et faire agir par sa parole, Machiavel se contente dans sa retraite d'orienter une action future en la guidant par son expérience. [...]
[...] Évidemment dans les deux cas, nous serons surpris de voir à quel point ce qui doit être dit est l'inverse de ce qui doit être véritablement. Le bon prince se livre à un marchandage entre les mots et les actions. S'il y a marchandage symbolique entre le mot et la chose c'est que le prince doit, par exemple, être assez libéral pour qu'on le dise de lui, mais ne doit pas l'être trop pour provoquer sa ruine. Ce sont ces délicates transactions qui nous montrent à quel point la politique avant d'être un art de l'action est peut-être avant tout une gestion de la parole. [...]
[...] Ensuite, du point de vue de l'histoire des idées, il incarne une cassure qui annonce la modernité. Des sujets sur les effets de la parole ou plus classiques comme Peut-on parler pour ne rien dire ? trouvent avec Machiavel un auteur de choix pour reconnecter entre elles des traditions qui s'opposent. Cela est d'autant plus facile qu'au sein du Prince, les chapitres XV à XIX constituent presque un petit traité autonome sur la gestion du langage et les effets de la parole. [...]
[...] Machiavel souligne la nécessité de se détourner de l'illusion de toute forme d'abstraction et donc de s'attacher uniquement à l'intelligence du cas. Le chapitre XV montre bien que l'image d'un prince se résume à ce que l'on dit de lui. Être exposé au regard du peuple c'est être livré à sa parole or celle-ci fige la figure de son prince en le qualifiant de façon à constituer un personnage qu'il n'est que très rarement. Le prince le plus habile est donc celui qui anticipe, par son discours et ses actions ; cette image de façon à être loué. [...]
[...] Il s'agit désormais de débattre d'une fin qui dépasse le danger immédiat et permet l'instauration d'un nouvel ordre à travers l'émergence de notions en communs et donc d'une forme d'universalité. Cet échange est si fondamental que la nature confère à l'homme seul plus qu'une face, mais bien un visage, ce dernier étant une condition nécessaire pour pouvoir adresser une parole. Une communauté linguistique L'homme est un animal politique, car il est un animal doué de logos et vice versa. C'est le phénomène de la parole qui apparaît bien cependant comme une donnée première qui permet à ces deux virtualités de se développer. [...]
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