Au début du XVIIe siècle, le "Roi est le grand debteur de Justice", toute justice doit émaner de lui. Mais il ne peut rendre la justice tout seul, c'est pourquoi il met en place une justice déléguée (par rapport à la justice retenue qu'il conserve) avec un ordre hiérarchique entre différents niveaux de juridictions qui lui sont inférieures. La conception de la Justice est cependant très large: les arrêts du Parlement ne font pas que trancher des litiges, ils fixent également des règles. Mais cette cour souveraine a également pour ambition de veiller au respect des Lois Fondamentales du Royaume, et donc de garantir une forme de constitutionnalité des lois du Roi. Dans le prolongement de cette idée, le Parlement va entrer une première fois en conflit avec le Roi, pour tenter de lui imposer des limites, ainsi qu'à l'absolutisme. C'est ce qu'on a appelé la Fronde. Mais c'est un échec.
C'est donc dans ce contexte d'après fronde, à l'heure où le pouvoir du Parlement (si pouvoir il y a) est plus que jamais flou et mouvant, qu'il faut analyser ces deux arrêts de règlement portés à notre étude: ceux du 10 Juillet 1665, sous Louis XIV et du 31 Janvier 1749, sous Louis XV. Ainsi, l'ensemble de la période ne peut être comprise qu'à l'aune de cette opposition croissante entre le Parlement et le Roi, dans une Monarchie absolue qui se transforme et mêle administration et Etat de police et de finances. Il ne faut pas négliger non plus l'émergence des Lumières à la fin de notre période même si cela fera l'objet d'une autre réflexion.
Finalement, il s'agit de savoir dans quelle mesure ces arrêts de règlement du Parlement de Paris permettent de comprendre la transformation d'un Etat de justice en Etat de police, de finances où se développe l'administration. Comment ces arrêts reflètent-ils le contexte d'une époque et l'opposition d'un Parlement à la monarchie absolue? En quoi sont-ils des exemples des bouleversements de leur époque?
Dans un premier temps, j'étudierai le rôle traditionnel du Parlement, ainsi que sa position au sein d'un ordre administratif judiciaire. Puis dans un second temps, je me pencherai sur la volonté du Parlement de Paris de se constituer comme un contre-pouvoir au Roi, mais un contre-pouvoir représentatif.
[...] Le Rôle traditionnel du Parlement Le Parlement avait principalement deux fonctions : législative et judiciaire A. Le rôle législatif du Parlement Le Parlement a un rôle législatif, même si l'on peut le considérer comme résiduel par rapport à celui du Roi. Lorsque le roi édictait des lois, celles-ci étaient transmises aux Parlements, qui devaient les enregistrer pour les rendre exécutoires. Si les Parlements s'opposaient aux lois, c'est-à-dire au souverain, ils lui adressaient des “remontrances”. Le roi pouvait passer outre en envoyant des “lettres de jussion” mais si celles-ci demeuraient sans effet, il se rendait lui-même au Parlement, où il s'asseyait sur un de justice” et rendait obligatoire l'enregistrement. [...]
[...] Dès lors, il n'y a plus que le Roi qui puisse briser ces arrêts, en cassation en quelque sorte. Or justement, toute la portée de cet arrêt de 1665 se trouve dans le rappel de l'ordre hiérarchique établi dans les siècles précédents, ou encore dans le Code Michau de Michel de Marillac de 1629. Tout en haut de cet ordre hiérarchique, nous trouvons le Roi, évidemment, puis les Parlements (et celui de Paris en tête du fait de son ancienneté et son importance), puis les Sénéchaussées (traditionnellement au Sud) et les Bailliages (globalement au Nord) qui sont donc des circonscriptions en quelque sorte, eux-m divisés en vicomtés (dirigé par un vicomte, fonctionnaire public) et en prévôtés (avec à leur tête un prévôt nommé et payé par le bailli). [...]
[...] Même si cette lutte préfigure la Révolution Française, celle-ci commence par la convocation des Etats Généraux, et non pas du Parlement de Paris, et la suppression de ces juridictions d'Ancien Régime. La question qui se sera posé aux Monarques tout au long de cette opposition était de savoir s'il fallait inclure le Parlement dans le processus décisionnel pour éviter les troubles et remontrances, ou bien passer outre ses recommandations et ne pas reconnaître son contrôle de constitutionnalité. Si c'est plutôt la deuxième approche qui a été retenue, cet épisode va renforcer le mythe du Gouvernement des Juges, en jetant un discrédit durable d'une part sur la Justice, dont doit se méfier le Politique, ainsi que d'autre part sur le contrôle administratif, sujet qui pose toujours autant de problème de nos jours . [...]
[...] Finalement, il s'agit de savoir dans quelle mesure ces arrêts de règlement du Parlement de Paris permettent de comprendre la transformation d'un Etat de justice en Etat de police, de finances où se développe l'administration. Comment ces arrêts reflètent-ils le contexte d'une époque et l'opposition d'un Parlement à la monarchie absolue? En quoi sont-ils des exemples des bouleversements de leur époque? Dans un premier temps, j'étudierai le rôle traditionnel du Parlement, ainsi que sa position au sein d'un ordre administratif judiciaire. [...]
[...] Les Parlements précisent ainsi par leurs arrêts les procédures judiciaires ou policières. Nous aboutissons donc à ce que l'on appelle un Etat de police, avec un pouvoir réglementaire, et un Parlement qui intervient dans des domaines aussi variés que ceux touchant à l'ordre public (comme c'est le cas ici), à l'organisation des hôpitaux, des cimetières, ou encore au fonctionnement des universités. Or, on remarque que cette opposition au Roi se fait particulièrement sentir dans un contexte où le peuple ne se sent plus représenté, il s'est éloigné de la Monarchie et les Etats Généraux n'ont plus été convoqués depuis 1614. [...]
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