Opinions individuelles et opinion publique

Résumé du document

L'expression d' "opinion publique" a différents sens au cours de l'histoire. Au XVIIIe siècle, période où on entend cette expression pour la première fois, l'opinion publique ne peut être formulée que par une élite savante. Pour Condorcet, l'opinion publique n'englobe pas le peuple, cette "multitude aveugle et bruyante".

Les philosophes, considérés comme les porteurs des opinions individuelles éclairées, découvrent la vérité qu'ils transmettent au public. Ce sont ces vérités individuelles, émanant de sages éclairés, que l'on appelle "l'opinion publique". Plus tard, cette opinion publique devient un tribunal où l'on juge les choses politiques. Aujourd'hui, on considère que l'opinion publique est émise par le peuple.

L'opinion, une fois revêtue de l'adjectif publique, représente le principe "légitimant" de gouvernement dans une société démocratique. La définition de l'opinion publique est qu'il s'agit d'une agrégation de l'ensemble des attitudes individuelles, des jugements et des convictions de la majorité de la population adulte d'une société donnée.

Extraits

[...] L'opinion publique existerait donc. Le sondage la recense mais son interprétation requiert d'en dégager le sens qui peut échapper à ses acteurs. Cette opinion est vue comme la façon dont un groupe social, un pays se représente le meilleur compromis entre le souhaitable et le possible. Ceci étant posé, les opinions individuelles résulteraient à leurs tours de parcours individuels, d'intérêts sociaux et des représentations collectives. L'individu a une opinion basée sur son parcours, ses intérêts et ses représentations. Il peut donc devenir le sujet de sondages qui aboutiront à la fabrication d'une opinion publique. [...]

[...] La négligence, l'exclusion des minorités auraient pour conséquence certaine de provoquer leur mécontentement qui pourrait se traduire par des actions revendicatives parfois violentes. Pour Pierre Bourdieu, le sondage est un instrument de mesure de l'opinion publique qui occulte totalement ceux qu'on range dans la catégorie des non-réponses (NSPP) alors que pour lui elle est la plus intéressante. Loïc Blondiaux dans La fabrique de l'opinion de 1998 énonce que les sondages, loin de mesurer ou même de refléter l'opinion publique, la réalisent en rendant réelle une chose qui n'existe pas. [...]

[...] Conclusion On le voit, l'opinion telle qu'elle est majoritairement perçue fait débat. La question d'une dictature de l'opinion est en jeu, particulièrement avec l'emploi généralisé des sondages. C'est la raison pour laquelle certains auteurs comme Bourdieu vont jusqu'à dire, dans un article célèbre paru dans la revue Les Temps Modernes, que l'opinion publique n'existe pas. En définitive, l'opinion publique apparaît comme insaisissable et abstraite. Véritable construction il y'aurait danger à vouloir pour les valeurs démocratiques à vouloir l'établir en juge. [...]

[...] Les plus grands utilisateurs de la recherche de l'opinion publique sont le commerce et le secteur privé. Les journaux, les revues, les diffuseurs et les partis politiques se servent aussi de sondages pour la collecte d'opinions. Dire qu'il existe une opinion publique représentant fidèlement l'avis d'une population, c'est présumer qu'il y aurait eu un consensus entre les individus ; or, les membres de la population ne se sont pas concertés et élever l'opinion d'une majorité au rang de volonté générale peut paraître dangereux. [...]

[...] Développons ici, l'idée de l'importance des médias sur les opinions individuelles. La tradition critique correspond à l'arrivée des médias de masse radio et cinéma, dans les années 30. La critique porte sur l'instrumentalisation faite par les régimes autoritaires. L'influence des médias correspond donc à la propagande politique. L'ouvrage pionnier en la matière est celui de Tchakotine dans Le viol des foules par la propagande politique publié en 1939 : il présente les techniques utilisées par Goebbels (grandes réunions de masse, radio, haut-parleurs dans la rue), considérées comme le modèle des seringues hypodermiques (on injecte au citoyen des idées, de manière continue, indolore, sans qu'il s'en rende compte). [...]