La notion de pouvoir technocrate a-t-elle encore un sens ?

Résumé du document

La notion de technocrate n'est pas très employée actuellement dans notre vie quotidienne. Mise à part quelques brèves apparitions de ce terme lors de débats politiques télévisés ou dans des articles de journaux spécialisés, il reste occulte pour de nombreux citoyens. Cependant, il existe toujours des technocrates mais ne vont-ils pas tomber dans l'oubli au même titre que le terme qui les désigne ?
M. Luc ROUBAN explique : « La définition du technocrate n'existe pas puisqu'elle reste étroitement conditionnée par l'image ou la fonction qu'on veut lui attribuer » citation de dans son ouvrage « La fin des technocrates. D'où la difficulté de définir la notion très subjective de la technocratie.
Au sens étymologique ce terme définit une forme de pouvoir qui mêle la connaissance technique et son usage dans la résolution des problèmes politiques. Le terme est également beaucoup utilisé par les journalistes pour désigner les membres et les pratiques d'une élite politico-administrative, généralement les hauts fonctionnaires, dont la principale caractéristique serait la faible affiliation partisane ou idéologique et la détention d'une compétence technique, le plus souvent administrative ou économique.
C'est l'utilisation la plus fréquente du terme « technocratie », mais il y a plusieurs types de technocratie selon le contexte historique ; la constante est que les technocrates veulent rationaliser l'organisation politique, économique et sociale, qu'ils prônent la modernisation et l'efficacité de la technique et qu'ils sont méfiants à l'égard des partis politiques et des passions. Mais ils peuvent avoir des compétences aussi variées que le sont leurs origines professionnelles ou leurs formations. La notion de technocratie aussi complexe qu'elle soit peut nous amener à nous interroger ; sa notion a-t-elle encore un sens ?
Pour cela il est nécessaire de présenter dans une première partie l'origine et l'évolution de la technocratie ainsi que les conséquences de son existence sur le politique (I), puis dans une seconde partie, nous analyserons en quoi le mythe technocratique peut s'avérer utile (II).

Extraits

[...] On pourrait croire à une certaine opposition de ces deux idées puisque la technocratie dont il avance la fin, c'est la technocratie comme un pouvoir des hauts fonctionnaires politisés qui primerait sur le pouvoir politique légitime. Mais si la technocratie ainsi définie est largement un mythe, on ne peut qu'observer une technicisation croissante du pouvoir et des compétences de ses représentants. Le pouvoir appartient à ceux qui savent : tout le monde en a pris acte et beaucoup le jugent nécessaire, à part peut- être les Américains notamment avec l'élection de M. [...]

[...] En effet, sous l'idée d'Énarchie», on constate en 1950 le passage d'un modèle généraliste à un modèle spécialiste à partir de 1960. Au départ les matières visaient à cultiver et à instruire l'élite administrative selon un modèle d'excellence dans des domaines à caractère historique et philosophique. Mais première rupture de ce modèle dans les années 60, le concours de l'ENA (l'École Nationale d'Administration) tend à se spécialiser et donc lentement à se technocratiser. Alors, les matières deviennent de plus en plus étroites et donc de plus en plus scientifiques et économique. [...]

[...] On peut donc se demander si le pouvoir des technocrates n'est pas en réalité un mythe monté de toutes pièces dans un but précis. B Une technocratie fictive, mais pas inutile La naissance et la pérennité d'un culte technocratique peuvent être un exutoire à une crainte d'une perte de pouvoir mais il peut aussi être utilisé comme stratégie politique Une fiction cultivée contre la peur d'une éventuelle dépossession du pouvoir L'apparition et la diffusion du mythe se sont avérées efficaces contre la crainte d'une éventuelle dépossession du pouvoir, c'est-à-dire justifier l'utilité d'une classe technocrate, mais pas seulement. [...]

[...] La notion de pouvoir technocrate a-t-elle encore un sens ? Sommaire I La technocratie : théorie utopique qui a ses limites A Apparition et évolution de la technocratie 1 Les précurseurs de la technocratie et son origine 2 pérennité de la technocratie à travers l'ENA B Une réalité technocratique source de problèmes 1 Les principaux mouvements influant son apparition en France 2 Une technocratie source de problèmes II La notion mythique de technocratie qui a encore une utilité A Un pouvoir des technocrates aujourd'hui contesté 1 Des hommes politiques techniciens 2 Pluralité des acteurs politiques : technocrates et militants B Une technocratie fictive, mais pas inutile 1 Une fiction cultivée contre la peur d'une éventuelle dépossession du pouvoir 2 Un mythe comme stratège politique : concurrence idéologues et technocrates La notion de technocrate n'est pas très employée actuellement dans notre vie quotidienne. [...]

[...] Ces problèmes fondamentaux que pose l'existence d'un pouvoir technocratique doivent être largement atténués par le fait qu'aujourd'hui, la réalité technocratique est largement discutable. Le courant technocratique tirant son origine de mouvement d'après-guerre et pourtant toujours d'actualité peut pourtant être source de problème Mais cette technocratie affiliée à un pouvoir mythique contesté n'est pas en voie d'extinction (II). II La notion mythique de technocratie qui a encore une utilité La confiscation du pouvoir par les technocrates est aujourd'hui fortement contestée en revanche elle pourrait bien s'avérer une fiction stratégique A Un pouvoir des technocrates aujourd'hui contesté Le pouvoir des technocrates est contesté, car la notion de technocratie ne peut pas être appliquée à une certaine technicité des hommes politiques et même si les technocrates se politisent, apparait une augmentation des militants au sein des institutions Des hommes politiques techniciens La complexification des affaires publiques, la technocratisation de l'administration française et la primauté du domaine économique dans les enjeux politiques ont amené les hommes politiques à se techniciser, mais ceci n'est en rien une technocratisation de la classe politique. [...]