Le nationalisme en Europe jusqu’en 1914, une idée moderne

Résumé du document

Selon l'historien tchèque M. Hroch la découverte et la formation de l'identité nationale suit trois phases. Une première où la culture nationale est découverte ou redécouverte, une seconde où l'agitation patriotique se développe et une troisième où ces sentiments deviennent des mouvements de masse. Le nationalisme, que l'on peut définir comme un amour (parfois excessif) du passé et du destin de sa nation, est clairement engagé dans la seconde phase à partir du printemps des peuples de 1848. L'idée de nationalisme existe et s'exprime donc dès la première moitié du XIXème siècle. Néanmoins, il est intéressant de se demander si par les évolutions qu'elle connait et par sa plus large diffusion l'idée de nationalisme se transforme assez pour parler d'un « nouveau nationalisme » à l'orée du XX siècle. Cela permettrait d'expliquer comment l'Europe est passée d'un mouvement de revendication libéral et national (1848) à des affrontements généralisés directement causés par des haines nationales (1914-1918).

Extraits

[...] Toutefois ce mouvement d'unification ne se fait pas sans une lutte contre les particularismes locaux. De même la diffusion des idées nationales peut créer au sein même d'une nation des volontés indépendantistes au nom de différences trop importantes. II) Le nationalisme unitaire s'oppose aux particularismes Comme nous l'avons montré dans la partie précédente, l'alphabétisation est devenue une affaire d'Etat. Il a été nécessaire pour cela de créer une école pour tous mais surtout d'unifier et d'enseigner une langue unique. Cette recherche d'une langue officielle est un des traits caractéristiques de l'évolution du nationalisme. [...]

[...] Les légitimités traditionnelles (Eglise, Noblesse) ayant été détruites l'administration se voit obligée de s'en créer une nouvelle pour s'assurer de la loyauté des citoyens. Ainsi, le pouvoir va être un des vecteurs de la diffusion du nationalisme profitant de ses rapports de plus en plus réguliers avec ses administrés. Ce nationalisme peut prendre diverses formes. Il est républicain et démocrate en France insistant sur la nation élue et terre de démocratie. Néanmoins, tous ces patriotismes d'Etat insistent sur la mise en perspective d'un passé commun ce qui a des conséquences non négligeables sur l'évolution du nationalisme. [...]

[...] Ces livres accentuent le sentiment d'appartenance à une communauté et développe une unification culturelle. Cette unification culturelle par l'écrit est rapide car elle rencontre peu d'opposition la culture de l'écrit n'étant que faiblement développée dans les classes populaires de l'Europe du XIXe siècle. Le second aspect développé par l'alphabétisation est la presse. La technique de l'abonnement et un prix unitaire relativement faible banalisent l'imprimé. La censure qui existe dans certains pays (en France sous le second Empire) encourage bien sûr à des prises d'opinions nationalistes. [...]

[...] Ainsi l'idée nationaliste se diffuse largement dans la deuxième moitié du XIXe siècle. Cela s'accompagne d'une purification de l'idée nationale, c'est-à-dire d'une unification de l'histoire, de la langue et des coutumes de la nation. Aidant à la création d'une conscience nationale ce mouvement a également deux conséquences importantes. D'une part il incite des mouvements de réactions face à la disparition de certaine culture locale ce qui entraine, principalement dans des pays récemment unifiés, des tensions et des risques d'explosions. De l'autre, l'identité nationale ainsi créée s'oppose à tout ce qui lui est extérieur et les dérives militaristes ou xénophobes sont directement issues de ce processus. [...]

[...] En France la cause est bien sur la défaite de 1870. Il est d'ailleurs intéressant de constater que cette défaite provoque un premier ressentiment national fort, partagé par tous les habitants et communiqué grâce aux moyens évoqués précédemment. Ensuite, le désir de revanche et de reconquête de l'Alsace-Lorraine soude le peuple autour d'un objectif commun. Plus généralement, des antagonismes existent entre les différentes nations. Ces mouvements de haine entre nations sont symptomatiques du nouveau nationalisme puisque dans un premier temps les nations déjà constituées se proposaient d'aider les autres à acquérir leurs indépendances (cf. [...]