Déjà en 1882, alors que l'Alsace et la Lorraine sont annexées par l'Allemagne suite à la défaite française de 1870, la question de la nation se pose, et aujourd'hui encore, elle fait débat autour de la notion d'identité nationale par exemple. A l'époque où Ernest Renan fait son discours, deux conceptions de la nation s'opposent, l'une se base sur des éléments objectifs et l'autre plutôt sur des éléments abstraits. Alors qu'est-ce qui lie les membres d'une nation ? Sur quoi se baser pour définir ce qu'est une nation ?
Bien vite, on se rend compte que la nation représente un enjeu public. En effet, la Constitution de 1958, par exemple, parle « d'emblème national », de « souveraineté nationale » et accorde le droit de vote à certains « nationaux ». Chercher à savoir ce qu'est la nation revient à se demander qui sont les personnes qui la composent. On s'aperçoit également que le concept de nation peut avoir des répercussions sur d'autres notions : par exemple, quel lien existe-t-il entre nation et citoyenneté ? A qui doit-on la donner ? La nationalité nous donne-t-elle des droits ? Plus généralement, quelles sont l'origine et les conséquences de l'existence d'une nation ?
Nous nous intéresserons d'abord à l'obtention de la nationalité, puis nous parlerons de la forme concrète que prend une nation pour enfin observer le lien que l'on peut établir entre nation et citoyenneté.
Ia) A l'époque où Ernest Renan prononce son discours, deux conceptions de la nation s'opposent : la conception française et la conception allemande. Cette dernière, défendue par de nombreux intellectuels tels que Fichte ou Herder, se base sur des éléments objectifs. Selon Fichte, « on ne choisit pas de maître, ni d'entendre pour premières paroles celles que l'allemand ou le français nous font écouter » : la nationalité n'est pas un choix, elle est déterminée par notre naissance. C'est la langue, le pays où l'on nait et grandit, la religion que l'on pratique et également la race qui déterminent la nation à laquelle on appartient. Cette conception ethnique et culturelle privilégie donc le droit du sang (droit d'un individu à la nationalité de ses parents, ou à défaut, de l'un deux). Fichte conclue son discours à la nation allemande de 1807 en disant « qu'il est donc illusoire de croire pouvoir changer de nationalité ». C'est une conception exclusive de la nation qui tend à isoler des groupes au lieu de rapprocher (...)
[...] Pourquoi la Hollande est-elle une nation, tandis que le Hanovre ou le grand-duché de Parme n'en sont pas une ? Comment la France persiste-t-elle à être une nation, quand le principe qui l'a créée a disparu ? Comment la Suisse, qui a trois langues, deux religions, trois ou quatre races, est-elle une nation, quand la Toscane, par exemple, qui est si homogène, n'en est pas une ? Pourquoi l'Autriche est-elle un État et non pas une nation ? En quoi le principe des nationalités diffère-t-il du principe des races ? [...]
[...] Il n'y eut pas de citoyens égyptiens, pas plus qu'il n'y a de citoyens chinois. L'antiquité classique eut des républiques et des royautés municipales, des confédérations de républiques locales, des empires ; elle n'eut guère la nation au sens où nous la comprenons. Athènes, Sparte, Sidon, Tyr sont de petits centres d'admirable patriotisme ; mais ce sont des cités avec un territoire relativement restreint. La Gaule, l'Espagne, l'Italie, avant leur absorption dans l'Empire romain, étaient des ensembles de peuplades, souvent liguées entre elles, mais sans institutions centrales, sans dynasties. [...]
[...] La communication politique repose elle aussi sur des rapports indirects, grâce au développement de la presse, de la radio et de la télévision. Le second ensemble de liaisons à distance qui structurent la communauté nationale, est «horizontal». La citoyenneté se définit par le principe d'égalité juridique de tous les citoyens. Quel que soit le milieu socioprofessionnel, le sexe, le lieu où l'on vit, nul n'est censé ignorer la loi. En conséquence, un État-nation doit se doter d'une administration suffisamment puissante pour que l'interdépendance de tous les membres de la communauté soumis à la même législation soit effective. [...]
[...] Or le type de ce qu'on appelle très improprement la race anglo-saxonne n'est ni le Breton du temps de César, ni l'Anglo-Saxon de Hengist, ni le Danois de Knut, ni le Normand de Guillaume le Conquérant ; c'est la résultante de tout cela. L'étude de la race est capitale pour le savant qui s'occupe de l'histoire de l'humanité. Elle n'a pas d'application en politique. La conscience instinctive qui a présidé à la confection de la carte d'Europe n'a tenu aucun compte de la race, et les premières nations de l'Europe sont des nations de sang essentiellement mélangé. Le fait de la race, capital à l'origine, va donc toujours perdant de son importance. [...]
[...] Alors va-t-on vers une nation européenne ? Ainsi, Ernest Renan donne une définition de la nation, subjective et sujette à interprétation. C'est un principe spirituel nous dit-il, l'expression de la volonté de personnes à vivre ensemble. La forme concrète d'une nation est l'Etat-Nation où les membres sont libres et égaux. La nationalité conditionne la citoyenneté, ainsi, être une nation c'est posséder les mêmes droits et avoir des devoirs envers les membres. Finalement, ce qui fait débat, ce n'est pas la nation, c'est le reste de la population. [...]
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