Actuellement, 192 Etats siègent à l'O.N.U. Ce chiffre, en constante progression depuis la création de l'organisation en 1945, témoigne de ce que l'on pourrait nommer une « mondialisation » du phénomène étatique. Cependant, si le modèle étatique, semble aujourd'hui s'imposer, il convient de rappeler que l'Etat n'est pas le cadre naturel de l'activité politique. En effet, l'Etat n'a pas toujours existé. D'une part, des travaux d'anthropologues comme ceux de Georges Balandier, ont démontré l'existence de sociétés sans Etat ; d'autre part, comme le souligne Jean-Louis Quermonne, « l'Histoire a connu d'autres supports du pouvoir politique » tels que la cité en Grèce antique ou encore l'Empire qui fut l'assise du pouvoir à Rome évidement, mais aussi celle du pouvoir napoléonien ou encore des puissances coloniales du XIXème siècle. Enfin, au Moyen-âge, le pouvoir politique avait pour socle la seigneurie, et c'est précisément cette dernière qui en Europe cédera sa place à l'Etat.
L'Etat dans son acception moderne est une institution que l'on peut historiquement et géographiquement située. Si le terme même « Etat » s'est imposé relativement tardivement, Jean Bodin ou Machiavel préférant encore au XVème siècle parler de « république » ou de « cité », l'objet d'étude est déjà bien l'Etat moderne qui commence à émerger à cette époque, les historiens occidentaux s'accordant, en effet, à en fixer la naissance à la fin du Moyen-âge. C'est l'Europe occidentale qui constitue le berceau de l'Etat moderne. Cependant, comme l'observe Joseph Strayer dans son ouvrage Les origines médiévales de l'Etat moderne, encore vers l'an Mille, rien ne laisser présager que l'Etat allait être inventé et souligne qu'à cette époque « on aurait eu du mal à découvrir sur tout le continent européen rien qui ne ressemblât à un Etat, excepté peut-être l'Empire byzantin ». C'est pourtant bien en France, en Angleterre, en Espagne, au Portugal puis ultérieurement en Prusse qu'a éclos ce nouveau type de support politique.
Aussi, comment l'Etat moderne a-t-il émergé en Occident ? Quelles ont été les conditions qui ont permis de passer d'une situation d'extrême morcellement de l'autorité à une situation d'extrême concentration du pouvoir ?
Afin de répondre à ces interrogations, il conviendra de voir que l'Etat moderne est le produit d'une construction sociale et culturelle, résultante d'un long et double processus de monopolisation (I) et d'institutionnalisation (II).
[...] Ensuite, on assiste à la mise en place du bicaméralisme avec, en 1332, la création de la Chambre des Lords et celle des Communes. Le Parlement ne cessera plus alors d'affirmer son pouvoir face à la Couronne, constituant ainsi un contre-pouvoir. Cependant, comme le souligne Monica Charlot, il convient de ne pas en conclure à une séparation absolue des pouvoirs législatif et exécutif en Angleterre, dans la mesure où s'il y a suprématie du Parlement c'est dans le cadre de la toute-puissance du gouvernement qui dispose d'une majorité stable à la Chambre des Communes[13]. [...]
[...] En effet, le souverain doit s'assurer le concours d'une administration de plus en plus compétente, régulière et spécialisée. Le philosophe Hegel voit, par exemple en l'administration prussienne, l'incarnation la plus achevée de la rationalité. Pour le sociologue Max Weber, l'Etat moderne naît avec la mise en place d'une bureaucratie. Celle-ci devient de plus en plus puissante. On s'accordera avec Philippe Braud à affirmer que la mise en place d'une administration moderne constitue le point d'aboutissement d'un long processus de rationalisation L'Etat moderne est donc la résultante non seulement d'un processus de monopolisation mais aussi d'institutionnalisation. [...]
[...] p Guerre de Trente ans (1619-1648) Jean-Louis Quermonne, Les régimes politiques occidentaux, op. cit., p une telle évolution conférera à l'Etat une grande continuité que les légistes de l'Ancien Régime avaient déjà su exprimer à travers l'adage : le Roi est mort, vive le Roi ! Jean-Louis Quermonne, Les régimes politiques occidentaux, ibid., p Phillipe Braud, Penser l'Etat, Editions du Seuil (première édition 1997), p Ibid, p Ibid., p Jean-Louis Quermonne, Les régimes politiques occidentaux, op. cit., p Phillipe Braud, Penser l'Etat, op. cit., p. 126. [...]
[...] Birbaum, Sociologie de l'Etat, Grasset p.16-108. Dominique Colas, Sociologie politique, Presses Universitaires de France pp. 471-527. Données du site officiel de l'Organisation des Nations Unies (O.N.U.), consultables sur Internet : http://www.un.org/french/aboutun/annees.shtml#00s Georges Balandier, Anthropologie politique, Paris, Presses Universitaires de France référence reprise in Jean-Louis Quermonne, Les régimes politiques occidentaux, Paris, Editions du Seuil, (2ème éd.) p Jean-Louis Quermonne, Les régimes politiques occidentaux, ibid. p Joseph Strayer, Les Origines médiévales de l'Etat moderne, référence reprise in Jean Baudouin, Introduction à la sociologie politique, Paris, Editions du Seuil p Norbert Elias, La dynamique de l'Occident, collection Agora, Pocket Jean Baudouin, Introduction à la sociologie politique, op. [...]
[...] Aussi, comment l'Etat moderne a-t-il émergé en Occident ? Quelles ont été les conditions qui ont permis de passer d'une situation d'extrême morcellement de l'autorité à une situation d'extrême concentration du pouvoir ? Afin de répondre à ces interrogations, il conviendra de voir que l'Etat moderne est le produit d'une construction sociale et culturelle, résultante d'un long et double processus de monopolisation et d'institutionnalisation (II). I. État moderne, résultante d'un processus de monopolisation La naissance de l'Etat moderne suppose l'émergence d'un centre assez fort pour imposer à l'ensemble de son territoire le double monopole dont il dispose : celui de l'édiction de la norme et celui de la violence légitime garantissant l'application du droit. [...]
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