La naissance de l'espace public : la notion d'opinion publique est-elle la même au XVIIIème et de nos jours ?

Résumé du document

S'interroger sur les notions d'espace public et d'opinion publique, c'est faire référence d'une manière plus générale à un débat autour de la démocratie et la légitimité politique de la parole du peuple.
Cependant, on verra qu'avant de devenir un enjeu politique, la notion d'opinion publique était considérée de manière péjorative et suscitait une grande méfiance. C'est seulement à partir de la moitié du XVIIIème siècle que le terme est considéré véritablement comme un corollaire des affaires publiques.
Dans ce travail sur l'évolution du concept d'opinion publique entre le XVIIIème et le XXème siècle, on sera donc amené à s'interroger préalablement sur les catégories de pensée qui ont produit cette notion, puis nous nous intéresserons à la nature et la réalité qu'elle recouvrait. Nous verrons ensuite comment, à la suite d'un processus complexe, des mutations structurelles ont rendu possible la naissance de l'opinion publique telle qu'on la définit aujourd'hui...

Extraits

[...] L'étude que fait Habermas rend compte d'une véritable mutation idéologique, qui on l'a vu, s'est traduite par une transformation de la sphère familiale bourgeoise. Nous allons nous attarder maintenant sur la façon dont celle-ci va parvenir à faire usage de la raison et accéder au pouvoir politique. La "publicité" comme moyen d'émancipation de la sphère publique bourgeoise. Habermas montre ainsi que c'est par l'usage public du raisonnement faisant abstraction de toute représentation sociale ou politique que la bourgeoisie est parvenue au pouvoir. [...]

[...] L'unité de la volonté générale n'est réalisable que par une sorte de tour de "passe-passe", grâce auquel les opinions individuelles se voient agrégées et formulées en une volonté universelle. Les premiers pas de l'opinion publique en tant que réalité politique. Après avoir étudié les différentes notions conceptuelles qui fleurissent à la Révolution française, on peut se demander ce qu'il en est dans la réalité. Ainsi Arlette Farge (Dire et Mal dire) montre l'émergence d'une critique populaire du gouvernement royal à travers les archives de police et la presse clandestine. De même, Keith M. [...]

[...] L'Evidence de la raison Comment dès lors, cette opinion publique qui fait l'objet d'un appropriation de la part des sphères éclairées de la société, parvient à être considérée comme l'opinion du plus grand nombre. Pour sortir de cette impasse, Habermas invoque l'argument utilisé par les physiocrates: pour que l'opinion publique fonde son apparente infaillibilité qui s'incarne dans l'assentiment de chacun, elle se présente comme l'Evidence qui émane de la Raison. On voit donc que d'une manière générale, les conceptions de l'Ancien Régime excluent unanimement le peuple de la notion d'opinion publique, exprimant la primauté de la raison sur le nombre. [...]

[...] Cette rencontre entre le domaine public (considéré ici comme ce qui relève des affaires de l'Etat) et la sphère privée (domaine des personnes privées) donne naissance à une sphère publique. On voit donc que la transformation des structures de l'économie entraine un bouleversement des rapports sociaux. Et c'est conjointement à ce phénomène que se développent aussi au milieu du XVIIIème siècle les premiers journaux. Cette presse nouvelle qui parait quotidiennement contient au début des informations commerciales sans véritable importance, le pouvoir politique gardant sur celle-ci un pouvoir d'influence important. [...]

[...] La naissance de l'espace public : la notion d'opinion publique est-elle la même au XVIIIème et de nos jours ? Introduction: S'interroger sur les notions d'espace public et d'opinion publique, c'est faire référence d'une manière plus générale à un débat autour de la démocratie et la légitimité politique de la parole du peuple. Cependant, on verra qu'avant de devenir un enjeu politique, la notion d'opinion publique était considérée de manière péjorative et suscitait une grande méfiance. C'est seulement à partir de la moitié du XVIIIème siècle que le terme est considéré véritablement comme un corollaire des affaires publiques. [...]