Les mouvements pro-européens de l’entre-deux-guerres

Résumé du document

Tout comme l'idée d'une société de concertation internationale ne date pas de 1945 et la création de l'ONU, ce qu'on appelle « l'idée européenne » a une histoire bien plus ancienne que la construction européenne proprement dite, dont on peut dater le commencement au 9 mai 1950. La conception d'une Europe unie est multiséculaire, mais ce que l'on souligne rarement, ce sont les développements qu'elle a connus dans la période agitée que fut l'entre-deux-guerres, au début du XXème siècle.
Deux idées semblent s'imposer : il faut comprendre tout d'abord que l'idée européenne renaît après la Grande Guerre sous la forme d'un concept double, qui va connaître un succès important dans les milieux intellectuels mais ne touchera que peu, nous le verrons, les consciences collectives. Nous constaterons ensuite combien le succès de ce concept accoucha de nombreuses propositions concrètes et comment le climat contemporain empêcha finalement toute réalisation d'un vrai rapprochement.

Extraits

[...] Certains comme Pierre Gerbet pensent que Briand aurait dû agir plus tôt ; il semble que ce qui est important à souligner est que lorsqu'on parle des mouvements pro-européens de l'entre-deux-guerres, il est plus juste de parler de mouvements pro-européens de l' entre-deux-crises (1918-1930). Pour terminer je vais rapidement évoquer un mouvement qui naît entre les deux guerres et va marquer les esprits, et notamment ceux des constructeurs européens d'après-guerre : le Personnalisme fédéraliste. Marqué par l'esprit chrétien, ce mouvement est composé de personnalités diverses, dont Jacques Maritain, et prône un nouvel humanisme, et un nouveau fédéralisme dépassant l'Etat-nation, fondé sur l'autonomie totale des collectivités locales. [...]

[...] Quelle Europe appelaient-ils ? Il est intéressant de constater que la forme fédérale était, au moins dans le premier XIXe siècle, celle que l'on espérait ; mais la seconde moitié du siècle va voir l'idée européenne décliner et perdre de l'ambition, puisque l'on n'appelait plus désormais qu'à la création d'une confédération, et en est témoin la perte de popularité du terme d' Etats-Unis d'Europe En définitive, plus on se rapproche de 1914, plus il existe une Europe économique et intellectuelle, mais plus elle est divisée politiquement ; la très forte intégration économique, la similitude des régimes et des administrations, la proximité des élites n'a pas empêché le choc des impérialismes et les divergences nationalistes. [...]

[...] L'accueil fut mitigé (le discours fut tout de même ovationné par l'AG de la SDN); même Gustav Stresemann, qui avait collaboré avec lui pour le rapprochement franco-allemand, n'est que peu enthousiaste (il soutient la collaboration économique mais craint un conflit avec d'autres continents et notamment avec les Etats-Unis). Les Anglais sont encore plus réservés, l'URSS y voit un cordon sanitaire et les Etats- Unis craignent la formation d'un bloc hostile. La France fut chargée de rédiger un mémorandum pour préciser son projet ; il fut présenté le 1er mai 1930, mais il était bien plus timide ; il reçut quelques soutiens, aboutit à la création d'une Commission d'études pour l'Union européenne, qui restera le seul organe politique européen de l'entre-deux-guerres. [...]

[...] Il ne croyait pas à la soumission des nationalités et ne proposa donc pas d'union fédérale. -les institutions qu'il propose sont un Conseil de délégués des Etats, une Assemblée de délégués des Parlements et une Cour de Justice, ce qui sera repris plus tard. -Enfin, cette Pan-Europe serait une organisation régionale attachée à la SDN ; cette dernière aurait le rôle d'arbitrer les conflits entre les grands ensembles régionaux (Pan-Europe, Amérique du Nord, Amérique du Sud, Commonwealth, Union soviétique, Extrême-Orient). [...]

[...] Période d'incertitude par excellence, ces deux décennies ont vu le monde, et avant tout l'Europe, douter et espérer, tenter de se reconstruire et se redéchirer. De quelle nature et de quelle importance furent les mouvements pro-européens de l'entre-deux-guerres ? En quoi ont-ils fait avancer l'idée européenne, et comment ont-ils influé sur les données de la construction future ? C'est ce que nous allons tenter de comprendre aujourd'hui, et j'essaierai de décrire les dynamiques qui ont déterminé l'évolution de l'idée européenne à cette époque. [...]