Mouvements indiens, Amazonie, natif écologique, U’Was, Embera-Katio, autochtones d’Amazonie
Longtemps considérés comme passifs, spectateurs de leur propre histoire, les peuples indiens d'Amérique Latine semblent aujourd'hui avoir pris une autre dimension aux yeux du monde. En effet, depuis les années 1990, on voit peu à peu se profiler un nouvel « acteur » sur la scène nationale de certains pays latino-américains, comme l'Equateur, la Colombie ou encore le Chili, souhaitant agir pour la reconnaissance de certains droits, notamment celui d'occuper un territoire revendiqué comme sien et ce, par les liens ancestraux qu'il prétend avoir avec.
De manière générale, les peuples autochtones des Etats latino-américains ont tendance à se définir comme « indiens » et à revendiquer, en ce nom, une reconnaissance de leur statut et un droit à une place en tant qu'indien dans la société.
Cependant, ces revendications se sont pendant longtemps heurtées et se heurtent sous certains aspects toujours à une politique « d'invisibilisation » de la part de l'Etat. Face à cette marginalisation des indiens, on a ainsi vu se former divers types de mouvements intra communautaires, ou entre communautés indiennes, qui, s'ils manifestent des différences dans l'organisation de leur mode de vie, se sont appliqués à mettre en exergue des points de convergence, revendiquant une identité indienne et autochtone, et se définissant un ennemi commun.
[...] L'Etat se privatise et privatise les entreprises nationales. D'un Etat corporatiste, aux perspectives paternalistes que dénoncent les communautés indiennes, on passe à un Etat subsidiaire, dit gendarme qui, s'il semble d'apparence répondre aux demandes d'autonomie des communautés indiennes, correspond en réalité à un abandon et une absence de réponse aux revendications indiennes. La politique de l'Etat s'avère d'autant plus ambigüe que ce dernier semble accorder, dans le même temps où il ignore les demandes d'aide des indiens, un intérêt nouveau pour ce qu'il nomme la culture indienne A travers les recensements et autres types d'actions menées par l'Etat, ce que l'on constate, c'est une volonté de connaitre la culture indienne afin d'intégrer les indiens au marché. [...]
[...] Si ces traits renvoient à une certaine réalité, puisqu'ils traduisent effectivement des pratiques adoptées par de nombreux peuples indiens, montrant que l'Indien n'est pas construit de toute part, les stigmates semblent néanmoins très présents, et en mènent certains à oublier que les indiens font aussi partie du monde moderne Les indiens sont enfermés dans ce que les Etats nomment le problème indien et sont enfermés dans le local, comme si leur réalité locale n'était pas imbriquée à une réalité multidimensionnelle et globale. Cette perception essentialiste considère que l'Autre, en tant qu'étranger, existe en soi, alors qu'il semblerait plus pertinent de parler de l'Indien en termes de relation, de rapport social. L'Autre n'existe que dans la mesure où il perçu par autrui comme un Autre. [...]
[...] Ce qui a donc permis le passage de l'Indien soumis à l'acteur indien, c'est la capacité qu'ont eu les populations autochtones à désingulariser leur cas. En effet, les études menées entre autre par Luc Boltanski17 ont démontré que pour qu'une requête apparaisse légitime et puisse espérer un retour, il faut que la requête paraisse légitime aux yeux de la personne ou l'institution à laquelle on s'adresse. Or, l'un des processus de légitimation consiste en la désingularisation de son cas, c'est-à-dire à montrer que son cas n'est pas isolé, mais que sa requête se fait au nom de tout un groupe de personne connaissant la même injustice. [...]
[...] Il s'agit de comprendre comment les indiens passent d'une identité de soi à une identité pour soi Ce qu'il semble se passer, c'est que certains indiens jouent à l'Indien, ils s'exotisent Ils se mettent une plume sur la tête pour s'approprier un territoire, ils jouent de leur catégorisation et de leur stigmatisation. Ils ne revendiquent plus des terres, mais des territoires. Il s'agit donc de comprendre comment les indiens parviennent par diverses stratégies à, d'une part acquérir une visibilité, mais aussi tourner cette image à leur avantage, par des processus de légitimation. [...]
[...] Cette capacité à dire le général est une compétence morale des individus. Cette volonté d'alliance avec les peuples autochtones de d'autres régions du monde a semblé émerger de l'expérience d'une souffrance commune tel qu'a pu l'exprimer Nancy Frazer dans sa théorie de la reconnaissance. Cette souffrance commune, c'est celle de l'invisibilité de ces minorités ou de ces peuples minorisés c'est aussi celle de la discrimination dont elles sont les victimes, et des décisions qu'on prend vis-à-vis d'elles sans 17 BOLTANSKI Luc, THEVENOT Laurent, De la justification. [...]
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