Grèves, blocage des universités, et manifestations sont autant d'éléments utilisés par les étudiants lorsqu'une action collective spontanée est mise en œuvre au sein des universités des pays occidentaux. Dès lors, les mouvements étudiants peuvent prendre une ampleur importante et même toucher l'ensemble du corps social, notamment lorsque l'opinion publique lui est favorable. Ainsi, les mouvements étudiants s'étendent parfois au niveau national et entraînent alors un véritable débat de société.
En réalité, les mouvements étudiants sont aussi vieux que l'université et datent donc du XVème siècle. Par exemple, la Sorbonne à Paris a connu neuf mois de grèves entre 1443 et 1445. En France, le mouvement le plus important par son ampleur est évidemment celui de Mai 1968, qui a débuté à l'université de Nanterre et entraîné des grèves générales de plusieurs semaines dans tout le pays. Dans le monde, les mouvements étudiants les plus célèbres sont les manifestations des étudiants aux Etats-Unis en 1967 contre la guerre au Viêt-Nam, les manifestations sur la place Tienanmen le 4 juin 1989 contre la corruption du pouvoir chinois, ou plus récemment le mouvement étudiant italien contre la privatisation des universités à l'automne 2005.
Nous allons ici nous intéresser aux mouvements étudiants qui ont eu lieu au Québec au printemps (session d'hiver) 2005 en réaction à la compression budgétaire de 103 millions de dollar décidée par le gouvernement provincial de Jean Charest, et en France au printemps 2006 en réaction au projet de loi du gouvernement de Dominique De Villepin sur l'égalité des chances instaurant notamment le Contrat Première Embauche (CPE) pour les jeunes de moins de 26 ans. L'enjeu de cette étude est de comprendre et de comparer la façon dont ont évolué et abouti ces deux mouvements étudiants. En effet, on suppose que les deux mouvements ne se sont pas développés de la même manière et ont présenté des modalités bien différentes. Il s'agira alors d'examiner comparativement l'ensemble de ces modalités afin d'en tirer des conclusions sur les modes d'action collective en France et au Québec.
Ces deux mouvements étudiants sont effectivement comparables car ils sont tous deux récents et ne sont séparés temporellement que par une année. Ils sont également tous deux nés au sein des universités par une volonté et une action spontanée de la part des étudiants. La suite est à étudier.
Ainsi, on peut se demander quelles sont les similitudes et les différences entre les deux mouvements étudiants québécois et français qui se sont déroulés respectivement à la session d'hiver 2005 et au printemps 2006. En quoi le développement, la structure, les modalités et l'aboutissement des deux mouvements révèlent bien la différence de culture politique entre la France et le Québec ? En fait, comment l'étude comparative de deux actions collectives spontanées va nous amener à définir deux cultures politiques réellement différentes ?
Pour répondre à ces questions, nous allons d'abord rapidement rappeler la chronologie des deux mouvements afin de mieux se situer au cours de l'analyse que nous allons en faire. Ensuite, nous aborderons les différents thèmes que nous avons choisis pour l'étude comparative des deux mouvements. Ces thèmes sont les suivants : la naissance et l'institutionnalisation des mouvements, le rôle des différents acteurs au sein des mouvements, l'impact sur le reste du corps social au sein des deux sociétés québécoise et française et le rôle de l'opinion publique, les moyens d'actions utilisés par ces acteurs au sein des deux mouvements, l'impact que ces actions ont eu sur les gouvernements des deux pays et enfin, l'issue du mouvement. Certains thèmes seront certainement évincés de l'analyse mais un choix thématique nous a paru essentiel pour l'efficacité d'une telle étude. En effet, son aspect comparatiste implique un cadre d'analyse bien défini.
De même, la méthode d'analyse semble importante à préciser dès l'introduction. D'abord, étant donné le caractère récent des deux événements étudiés, l'étude d'ouvrages sera sans doute difficile. Néanmoins, les articles de journaux, de périodiques et les statistiques seront évidemment très utiles. Par ailleurs, il nous semble essentiel d'interroger des individus qui ont pleinement vécu les mouvements : des étudiants, des professeurs, des journalistes et même des citoyens quelconques qui ont perçus les mouvements de l'extérieur. Ainsi, la méthode du questionnaire à questions ouvertes sera utilisée pour améliorer l'étude qualitative et comparative des deux mouvements.
[...] Cependant, les étudiants des universités et des lycées se sont très souvent revendiqués autonomes et indépendants de tout syndicat ou parti politique. Ainsi, même lorsque certains étudiants étaient membres de partis politiques ou de syndicats, ils n'affichaient pas nécessairement leur étiquette au sein du mouvement. Un article paru dans Le Monde révèle bien cette idée : La majorité des étudiants poitevins en grève sont non-syndiqués. Et les rares qui le sont font passer leur étiquette après l'intérêt général. Notre moteur, ce sont les relations amicales, pas les relations politiques explique Jules Aimé ans, en deuxième année de licence d'histoire et militant au Mouvement des jeunes socialistes (MJS). [...]
[...] On peut donc en conclure que la sympathie de la population pour les mouvements étudiants français et québécois a été une des principales forces du mouvement. Néanmoins, cet appui de la part de l'opinion publique n'aurait sans doute pas été possible sans la médiatisation autour des deux mouvements. Le rôle essentiel des médias Nous l'avons dit précédemment, les étudiants et le gouvernement ont intérêt à avoir l'opinion publique dans leur camp. Il en va de même pour les médias. Dans nos sociétés occidentales, il est désormais clair que les médias, à savoir surtout la télévision, la presse et la radio, jouent un rôle essentiel dans la démocratie. [...]
[...] Les syndicats étudiants dénombrent environ étudiants lors de cette journée. De même, à Québec, une manifestation a lieu devant l'Assemblée Nationale le 24 mars 2005. Après 6 semaines de grèves, les syndicats étudiants et le gouvernement parviennent à s'entendre lorsque Jean Charest accepte de réinvestir 482 millions de dollars de prêts en bourse pour les 5 prochaines années. Nous étudierons les modalités de cette entente de façon plus détaillée par la suite. Concernant le cas français, Dominique de Villepin, Premier Ministre français, annonce le 16 janvier 2006 la création de Contrat Première Embauche un contrat à durée indéterminée destiné aux jeunes de moins de 26 ans, dans le but d'enrayer le trop important taux de chômage des jeunes. [...]
[...] How television frames political issues. University of Chicago Press (Chicago). Laronche, Martine La Coordination nationale veut s'imposer comme interlocuteur Le Monde (Paris) 21 mars : 10. Lazarsfeld, Paul, Bernard Berelson et Hazel Gaudet The people's choice: how the voter makes up his mind in a predidential campaign. Columbia University Press (New York). Québec. Institut économique de Montréal Le haut taux de syndicalisation du Québec nuit à l'emploi et à l'investissement. En ligne : http://www.iedm.org/main/show_mediareleases_fr.php?mediareleases_id=85 Québec. [...]
[...] Enfin, ce sont ces deux syndicats étudiants qui privilégieront le dialogue avec le gouvernement Charest à l'issu du mouvement. Toutefois, ces deux syndicats étudiants faisaient partie des émeutes qui ont eu lieu devant le château Montebello où se tenait le caucus présessionnel des députés libéraux le 16 février 2005 (Le Devoir février 2005 : a3). Le lendemain, après que le nouveau Ministre de l'Education Jean-Marc Fournier ait déclaré Je ne pourrai pas faire mon travail de recherche de solutions avec [les fédérations étudiantes] si elles choisissent la voie de la violence le président de la FEUQ Pier-André Bouchard affirmait à son tour : Des actions violentes, il n'y en aura plus d'organisée par la FEUQ (Le Devoir février 2005 : a1). [...]
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