Selon Montesquieu, dans l'Esprit des lois, « les démocraties conviennent mieux aux petits États, les monarchies aux États de taille moyenne, et les régimes autoritaires aux États de grande taille ». Bien qu'il soit délicat d'introduire un tel déterminisme en politique, l'on conçoit aisément que la démocratie la plus aboutie ne saurait naître que dans un état de taille réduite, pour des raisons évidentes d'organisation.
Plus qu'un État, la Suisse est un état d'esprit. Le système politique de la Suisse peut être envié par son originalité fondée sur un pragmatisme poussé. Contrainte par Napoléon à adopter les institutions directoriales de la Constitution française de l'An III, c'est librement que la Suisse gardera ces institutions en 1848. Elles sont restées très stables, malgré quelques révisions, notamment celles d'avril 1999. Le pouvoir suisse se résume clairement en trois mots « fédéré, référé et cogéré » (O. Duhamel), ce qui en fait un système assez unique au monde. Et de ce fait, beaucoup voient dans le système politique suisse un véritable modèle.
Cependant, il existe de nombreuses imperfections et contradictions dans ce modèle. La Suisse est-elle vraiment un modèle applicable au reste des régimes politiques ? Ne serait-elle pas plutôt un exemple isolé ? Et au XXIe siècle, n'a-t-on pas devant nous un modèle plutôt en crise ?
[...] Par ailleurs, le modèle politique suisse semble inextricable du terreau politique dans lequel il est né. La Suisse est d'abord une démocratie de concordance, car c'est une société plurale sur les plans linguistique et religieux. Il y a quatre langues différentes, avec 22% de francophones (à l'ouest) de germanophones (à l'est) d'italophones (dans le Tessin), et de Romanches (dans les Grisons). Se côtoient également des religions très diverses ; 44% de catholiques de protestants, mais aussi de musulmans et d'orthodoxes. [...]
[...] Ainsi, les habitants de Zurich million d'habitants) sont représentés de la même manière que ceux du canton d'Uri (3600 habitants), ce système apparait donc largement perfectible. Par ailleurs, si le système des milices qui repose sur l'idée républicaine que tout citoyen qui en a les capacités doit assumer des charges publiques de manière extraprofessionnelle et bénévole, a l'avantage de créer un lien direct entre le peuple et les représentants politiques, on peut néanmoins lui reprocher de conduire au fait que la plupart des représentants ne soient pas des politiciens professionnels. En outre, les institutions politiques sont bancales. [...]
[...] Le modèle politique suisse est-il exportable ? Selon Montesquieu, dans l'Esprit des lois, les démocraties conviennent mieux aux petits États, les monarchies aux États de taille moyenne, et les régimes autoritaires aux États de grande taille Bien qu'il soit délicat d'introduire un tel déterminisme en politique, l'on conçoit aisément que la démocratie la plus aboutie ne saurait naître que dans un état de taille réduite, pour des raisons évidentes d'organisation. Plus qu'un État, la Suisse est un état d'esprit. Le système politique de la Suisse peut être envié par son originalité fondée sur un pragmatisme poussé. [...]
[...] Si son point de vue est bien évidemment très partial, il a au moins le mérite de souligner ici que le perpétuel compromis que la Suisse a choisi de respecter semble archaïque dans une société moderne vouée à des innovations constantes. Nombreuses sont en effet les carences du modèle suisse, et nombreux en sont les aspects qui pourraient aisément être facilement modifiés. Si ce modèle présente une originalité tout à fait intéressante et par bien des aspects attirants, il ne saurait donc véritablement constituer un modèle exportable. [...]
[...] Comme on a pu le constater en 1999, un tel système a pour inconvénient de rendre le choix des conseillers particulièrement difficile, chacun des nouveaux élus devant remplir cumulativement les critères nécessaires pour maintenir l'équilibre de la formule magique En outre, selon Blaise Lempen, La démocratie de concordance est une démocratie de l'étouffoir : puisqu'elle engendre une absence d'alternance, de débats et de partis aux programmes contraires. Cette absence d'alternance comme l'immobilisme politique qui peut s'en suivre fait depuis quelques années l'objet de contestations qui ont débordé sur une forte poussée de l'extrême droite lors des dernières élections législatives. Les Agrariens (UDC) se sont peu à peu tournés vers l'extrême droite avec à sa tête Christophe Blocher. L'évolution électorale atteste de cette poussée : l'UDC est passé de 22 à 29% des suffrages en 2007. [...]
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