En 1803, par l'arrêt Marbury vs. Madison, la Cour suprême des Etats Unis d'Amérique se déclare compétente pour connaître de la conformité d'un acte législatif à la Constitution… Le contrôle de constitutionnalité est né, et, avec lui, la justice constitutionnelle.
Pour autant, en conclure que la justice constitutionnelle est proprement américaine serait commettre une grave erreur. Certes, l'exemple outre-atlantique a fait des émules mais d'un genre divergent. Si la justice constitutionnelle est une idée qui se diffuse rapidement en Europe, forte d'un effet d'entraînement, celle-ci se révèle, dès les origines, comme proprement européenne, tant dans ses fondements théoriques, que dans ses applications pratiques. Et un modèle européen de s'ériger en face de la construction américaine. Si le modèle américain, alors unique, aujourd'hui peu diffusé, semble se définir très nettement, son confrère européen demeure moins aisé à saisir à cause du nombre important d'applications dont il a fait l'objet.
Le modèle de justice constitutionnelle américain est dit de judicial review. Il se présente comme suit.
La Cour suprême est le juge suprême de constitutionnalité des lois, toutefois, celui-ci s'effectue à tous les niveaux de l'ordre juridictionnel, tant fédérés que fédéral. Aussi, le contrôle est-il dit diffus. Le contrôle de constitutionnalité s'effectue à l'occasion d'un litige au cours duquel se pose une question de constitutionnalité. Celle-ci peut être soulevée par tout justiciable, la saisine du juge est donc ouverte. D'autre part, un tel contrôle s'effectue par voie d'exception, ce n'est théoriquement pas l'acte en lui-même qui est attaqué mais son applicabilité. De plus, le contrôle se rapportant à une application précise du dit acte, il est dit concret. Enfin, la décision rendue n'ayant d'effet qu'inter partes, les décisions de constitutionnalité ne jouissent que de l'autorité relative de la chose jugée. La loi inconstitutionnelle est alors simplement écartée du procès en cours sans être véritablement annulée. Ceci appelle une nuance étant donné l'autorité du précédent : la loi est ainsi systématiquement écartée toutefois, elle demeure en droit intégrée dans l'ordre juridique.
L'ensemble de ces éléments fonde donc un modèle de justice constitutionnelle spécifique propre au système américain qui se distingua ainsi nettement.
On lui oppose communément le modèle européen. Celui-ci se présente comme une contradiction du modèle américain en tant que le contrôle est concentré, généralement abstrait, s'effectuant la plupart du temps a priori après une saisine fermée…
Cela suffit-il pour autant à qualifier l'ensemble des systèmes de justice constitutionnelle européens de modèles ? En effet, peut-on parler d'unité, ce qu'implique intrinsèquement un modèle, lorsque la justice constitutionnelle s'applique selon quinze modalités, à n'évoquer que l'Union européenne ?
Pour ce faire, il convient de se pencher sur la notion même de justice constitutionnelle. Celle-ci revêt deux dimensions : fonctionnellement parlant, elle est l'opération par laquelle s'effectue le contrôle de constitutionnalité des lois, cependant, d'un point de vue organique, elle désigne l'organe chargé d'exercer ce contrôle. Au regard d'une telle définition, le modèle européen semble manquer de cohésion. En effet, il satisfait au critère organique, l'ensemble des systèmes européens étant concentré sur une Cour constitutionnelle, et pour cela, mérite la dénomination de modèle. Néanmoins, le critère fonctionnel révèle une véritable multiplicité de modalités de contrôle au sein du modèle.
Est-ce à dire qu'il n'existe pas de modèle à proprement parler ?
Il apparaît que les Cours constitutionnelles européennes forment un ensemble caractérisé par une certaine hétérogénéité (I) mais qui, historiquement et théoriquement, correspondent à une certaine vision européenne, elle-même fondatrice d'un modèle (II).
[...] Pour ce faire, il convient de se pencher sur la notion même de justice constitutionnelle. Celle-ci revêt deux dimensions : fonctionnellement parlant, elle est l'opération par laquelle s'effectue le contrôle de constitutionnalité des lois, cependant, d'un point de vue organique, elle désigne l'organe chargé d'exercer ce contrôle. Au regard d'une telle définition, le modèle européen semble manquer de cohésion. En effet, il satisfait au critère organique, l'ensemble des systèmes européens étant concentré sur une Cour constitutionnelle, et pour cela, mérite la dénomination de modèle. [...]
[...] En cas de non-application, le tribunal constitutionnel est saisi obligatoirement. Etc . Mais toutes ces transpositions se réclament du modèle kelsénien dont elle possède les principales composantes (juridiction unique, recours par voie d'action, saisine fermée . Une certaine conception de la justice constitutionnelle européenne L'appartenance à un même schéma originel imprime une certaine vision, sinon la révèle : le rôle du juge constitutionnel, le but de la justice constitutionnelle Autant d'éléments qui se situent en porte-à-faux avec le modèle américain et qui semblent suffire à caractériser une véritable théorie européenne, un modèle Ceci est tout à fait notable à deux niveaux : les effets de la décision et la question de la politisation L'effet de la décision. [...]
[...] L'existence d'un modèle européen relève davantage d'un schéma originel que d'une réalité pratique L'unicité de principe : le modèle de la Cour constitutionnelle L'expression modèle de justice européen renvoie donc davantage à un schéma d'organisation et de principe communs toute l'Europe. Ce schéma fait lui-même référence à une certaine conception de la justice constitutionnelle, porteuse de certaines évolutions. Ceci est partagé par l'ensemble des pays européens ce qui conduit à valider l'existence d'un modèle de justice constitutionnelle européenne. L'unité de fondement : le schéma kelsénien 1. [...]
[...] Le contrôle est lors déclenché par les responsables de l'Exécutif, les parlementaires ou les collectivités autonomes (Autonomias espagnoles, Länder allemands, régions italiennes Le contrôle s'il n'est pas un élément d'unification du modèle revêt une importance particulière quant à l'identification du modèle européen par rapport au modèle américain. Ceci est encore plus vrai au regard des principes qui le sous-tendent Les principes du contrôle. Le modèle européen s'oppose à tout point de vue au modèle américain en ce qui concerne le contentieux. - La nature constitutionnelle du contentieux. [...]
[...] Forte de toutes ces constatations, c'est la France qui apparaît la plus conforme au modèle européen tel qu'il est généralement dégagé. La forme du contrôle La forme du contrôle met, elle aussi, en évidence le manque d'unité du modèle européen. Ceci est particulièrement remarquable quant au moment du contrôle. Cependant, elle souligne une certaine cohésion quant à la compétence et au recours Les modalités du contrôle. Le contrôle peut s'exercer a priori ou a posteriori (en référence à l'entrée en vigueur de la norme mise en cause), par voie d'action ou d'exception (en référence à la place du contrôle dans le contentieux). [...]
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