"La représentation proportionnelle est un système évidemment raisonnable et évidemment juste ; seulement, partout où on l'a essayée, elle a produit des effets imprévus et tout à fait funestes, par la formation d'une poussière de partis, dont chacun est sans force pour gouverner, mais très puissant pour empêcher. C'est ainsi que la politique devint un jeu des politiques". C'est en ces mots que le célèbre philosophe et politologue Alain met en lumière l'un des enjeux principaux du choix du mode de scrutin pour l'élection d'une assemblée. Un mode de scrutin peut-il et doit-il avoir la justice pour vertu première ?
La représentation est en effet l'un des piliers principaux de notre démocratie. Or le mode de scrutin, qui permet de traduire la volonté populaire en siège au parlement, est le mécanisme central, la pierre angulaire de ce système de représentation.
Il existe principalement deux modes de scrutin : le scrutin majoritaire, selon lequel le ou les candidats (ou la liste) élus sont ceux qui remportent la majorité des voix, et le scrutin proportionnel, qui est plus une « photographie du paysage politique », car les sièges à pourvoir y sont répartis de façon proportionnelle au nombre de voix obtenues par chaque parti.
Le scrutin majoritaire, s'il est bien le plus simple et le plus pragmatique en terme d'efficacité gouvernementale, ne semble pas avoir pour vertu première la justice, lorsque l'on entend par justice un mode de scrutin qui offre une juste représentation à l'assemblée de la volonté exprimée par les suffrages du peuple(I). Le scrutin proportionnel en revanche fait preuve d'une plus grande justice électorale, ce qui peut avoir pour contrepartie un déficit d'efficacité vis à vis du scrutin majoritaire, cela ne signifie pourtant pas nécessairement que ce mode de scrutin puisse réellement faire primer la justice sur l'efficacité.
[...] Le mode de scrutin majoritaire sera d'ailleurs rétabli par la suite avec la Ve république. L'efficacité semble donc bien être pénalisée par la plus grande justice de la représentation proportionnelle. Moindre efficacité ne signifie cependant pas inefficacité, aussi même si ce la justice plus présente dans ce mode de scrutin semble nuire à son efficacité, on ne saurait affirmer que l'objectif premier de tout mode de scrutin ne soit pas l'efficacité. Il est vrai que le scrutin proportionnel peut se révéler moins favorable à l'efficacité que le scrutin majoritaire, mais il n'est pas inefficace. [...]
[...] De la sorte, contrairement au scrutin majoritaire, ce scrutin accorde la même valeur à chaque suffrage. De plus, ce mode de scrutin apparaît plus juste car il rend impossible la prédominance à l'assemblée d'une formation politique qui n'aurait pas le soutien d'une majorité dans le pays, tout en favorisant la présence des petits partis à l'assemblée. Néanmoins, ce système amène parfois à une moindre efficacité gouvernementale. Ceci pourrait alors conduire à penser que le scrutin proportionnel a pour vertu première la justice, en affirmant qu'il fait primer cette vertu sur celle que constitue l'efficacité. [...]
[...] II- Le scrutin proportionnel, plus de justice comme vertu nécessaire, mais non comme vertu première, malgré une efficacité moindre Le scrutin proportionnel permet une représentation nationale plus juste qu'avec l'utilisation du scrutin majoritaire(A). Cela a néanmoins pour conséquence d'augmenter le risque de baisse de l'efficacité gouvernementale. Ceci ne signifie cependant pas que ce mode de scrutin fasse primer la justice sur l'efficacité. En effet, bien que le scrutin proportionnel soit plus juste, il semble difficile d'affirmer qu'un mode de scrutin, même celui-ci, puisse avoir pour vertu principale la justice, l'efficacité devant être la visée première de tout mode de scrutin. [...]
[...] De même en 1993, la droite, avec 40% au premier tour, en a obtenu 82%. C'est donc bien l'efficacité gouvernementale qui prime dans ce mode de scrutin puisqu'en formant une large majorité stable à l'assemblée, il favorise la rapidité des prises de décision, et les grandes réformes en évitant les blocages dus à la confrontation entre deux camps opposés ou au manque de stabilité de la majorité. Cependant, le prix de cette efficacité est une déformation plus ou moins importante de la représentation nationale qui rend ce mode de scrutin assez injuste, dans le sens où`il ne permet pas de restituer à l'assemblée la juste représentation du paysage politique du pays. [...]
[...] Un mode de scrutin a-t-il pour première vertu la justice ? "La représentation proportionnelle est un système évidemment raisonnable et évidemment juste ; seulement, partout où on l'a essayée, elle a produit des effets imprévus et tout à fait funestes, par la formation d'une poussière de partis, dont chacun est sans force pour gouverner, mais très puissant pour empêcher. C'est ainsi que la politique devint un jeu des politiques". C'est en ces mots que le célèbre philosophe et politologue Alain met en lumière l'un des enjeux principaux du choix du mode de scrutin pour l'élection d'une assemblée. [...]
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