Les minorités et leur visibilité dans l’armée de métier

Résumé du document

A l'heure où les pays occidentaux se sont presque tous tournés vers un modèle d'armée de métier, professionnelle en abandonnant la traditionnelle conscription, l'armée doit faire face à de nombreux défis d'envergure. Alors qu'elle donne une importance toujours plus grande aux technologies de pointe pour protéger davantage le soldat et minimiser les pertes, devenues « inadmissibles » aux yeux de la société, les armées de métier des pays occidentaux se retrouvent ainsi confrontées à des ennemis aux contours flous et à la force de frappe difficile à estimer. Mais dans le même temps, ces armées professionnelles doivent faire face à des défis structurels. Certains ont ainsi stigmatisé la « crise de vocation » au sein de l'armée de terre française, qui peinerait à recruter des jeunes fervents de l'idéologie républicaine. L'armée est par ailleurs en première ligne des stratégies politiques d'intégration des « minorités visibles » dans la société française et connait en son sein une augmentation continue de leur présence. Si les soldats issus de l'immigration ne peuvent être appréhendés par des données chiffrées, on peut étudier en revanche les politiques de recrutement à l'égard de ces cibles, ou encore leur motivation lors de l'engagement volontaire.

Extraits

[...] Plus intéressant encore est celui-ci[4], où l'on voit clairement l'engagé Pascal tendre la main et aider un soldat de couleur. Pour conclure sur ces clips de recrutement de l'armée de terre, celui-ci[5] affiche clairement son orientation pro-minorités puisque l'on y voit à la fois une jeune femme, technicienne, qui prend des responsabilités et plus symbolique encore, un jeune homme de couleur qui devient cadre Au moment précis où la caméra zoome sur son visage, la voix off ajoute : et s'ouvrir aux autres avant de passer à un autre soldat de couleur secourant une civile avec une couverture. [...]

[...] Les différents corps des armées compteraient plus de 40,000 femmes servant dans leurs rangs, représentant 13,9% des militaires du rang. Alors que les quotas ont disparu en matière de recrutement depuis 1998, au 1er janvier des emplois de l'armée de l'air, de l'armée de terre et du service de santé des armées étaient ouverts aux femmes, et 91% des emplois dans la marine (les sous-marins constituant une contrainte matérielle non compatible à la vie d'une femme). Il est intéressant de noter à titre de comparaison que les Etats-Unis font figure de précurseurs en la matière, puisque si les femmes ne représentaient que des effectifs militaires en 1972, ce chiffre monte à 13% pour les militaires du rang en 1997 (et même 14% pour les officiers, fait assez rare pour être signalé). [...]

[...] La féminisation de l'armée de métier ? Depuis trente ans, les armées des pays occidentaux se sont ouvertes peu à peu aux femmes. Elles se sont féminisées à la fois de par l'augmentation de la proportion de femmes dans l'armée, mais aussi par l'extension de leur rôle ou par l'harmonisation des statuts du personnel d'un sexe ou de l'autre. Si la présence de femmes sur un champ de bataille reste un phénomène marginal, dans des contextes bien précis (exemple d'Israël où les femmes peuvent être combattantes), leur intégration en temps de paix, en dehors des champs de bataille est en pleine croissance. [...]

[...] En revanche la situation est différente pour les Bédouins, qui sont eux ciblés par l'armée israélienne, qui les encourage fréquemment à s'engager volontairement compris dans les unités combattantes) à travers des grandes campagnes de recrutement et d'information. En échange, l'armée leur garantit également une meilleure intégration dans la réalité sociale israélienne, avec notamment des avantages fiscaux pour les ménages considérés. Pour certains Bédouins confrontés à des conditions de vie toujours plus dures dans un environnement social et urbain qui tend à les marginaliser, l'armée représente parfois la seule alternative d'intégration. L'un des exemples notoires de réussite est celui d'Abdel Majid Hidr, bédouin et devenu plus tard le lieutenant colonel Amos Yarkoni. [...]

[...] Il parle de travail d'imposition et d'entretien de la frontière reprenant une analyse de Streiff-Fenart de 1995, qui met l'accent sur la logique du nous/eux dans l'armée. Par ailleurs, ces menaces d'atteinte à l'intégrité de la culture militaire s'accompagnent pour ceux qui les brandissent de données chiffrées héritées justement du rapport de 1990. Ce rapport mettait en avant la sur-proportionnalité des actes déviants chez ces populations, où les désertions sont notamment 3,5 fois plus élevées, le refus d'obéissance 6 fois plus, les outrages faits aux supérieurs 6 fois plus, et les insoumissions 8 fois plus. [...]