Né en 1947 de parents ouvriers à Fontana, petite ville industrielle dans la banlieue de Los Angeles, Mike Davis milite activement dans sa jeunesse dans des cercles radicaux de gauche, fréquente un temps le parti communiste américain, voyage en Angleterre où il s'introduit dans les cercles néo marxistes de la New Left Review dont il devient le rédacteur en chef de 1980 à 1986. De retour aux Etats-Unis, il devient chauffeur routier et sillonne l'Amérique avant de reprendre ses études à l'UCLA et de rédiger une thèse sur l'histoire politique et sociale de la classe ouvrière américaine. Son ouvrage City of Quartz paru en 1990 est une véritable somme critique et polémique sur l'histoire politique, sociale, culturelle et urbaine de Los Angeles, mégalopole monstrueuse perçue comme une vitrine avant gardiste des tendances lourdes du nouveau capitalisme urbain.
L'article « Planet of Slums » qui traite de la nouvelle phase d'urbanisation massive dans les pays dit du Sud mais aussi à l'œuvre dans les pays développés part d'un constat crucial : pour la première fois dans l'histoire de l'humanité, le nombre d'urbains dépasse le nombre de ruraux tandis que les taux de croissance urbaine les plus importants se font dans les territoires sous développées, sources de tensions tant sociales que politiques ou écologiques. Cet article intervient notamment à la suite de la publication en 2003 du rapport du programme pour l'habitat humain de l'ONU intitulé The challenge of Slums, source importante de données quantitatives pour l'auteur.
Avant d'envisager une lecture critique de cet article, il convient d'analyser les grandes thèses développées par l'auteur dans cet article.
[...] Selon lui, la marginalité de ces zones informelles s'évalue en terme économique et non d'exclusion : les habitants de ces zones ne forment pas une classe à part ; il existe des liens permanents d'échange entre le secteur informel et la partie moderne de la ville ; d'ailleurs les habitants de l'industrie habitent souvent dans les mêmes quartiers que les informels. Pour les migrants ruraux, qui peuvent être relativement éduqués et même riches, l'arrivée dans les slums peut être au cœur d'une stratégie de promotion sociale, l'espace informel n'étant qu'un sas où ils côtoient des citadins refoulés notamment des centres villes engorgés. Finalement, dans le cadre d'une analyse générale sur les logiques à l'œuvre dans les villes du Sud, l'article de M. [...]
[...] A travers son approche néo marxiste, Mike Davis s'inscrit parfaitement dans ce courant de lecture de la partition urbaine liée à la question économique et à l'internationalisation du capital. Cette géographie néo marxiste ou post moderne insiste particulièrement sur les effets de spatialisation du capitalisme avancé : la fragmentation serait le résultat spatialisé des effets de globalisations mais aussi des modes de gestion urbaine volontaires ou induits. A contrario, une autre approche radicalement différente met l'accent non sur le développement de la non ville mais sur ce que certains appellent la ville émergente (Yves Chalas, La ville émergente). [...]
[...] Davis présente l'intérêt d'une réflexion engagée, parfois extrême qui s'attache à mettre en lumière des processus globaux, notamment économiques, qui touchent l'ensemble des villes de la planète. En ce sens, l'analyse des villes du Sud par les Slums permet de réfléchir sur l'évolution de nos propres mégalopoles qui peuvent connaître des processus semblables, sans en atteindre l'ampleur. Autrement dit, un détour par les villes du Sud permet peut être de poser un autre regard sur nos propres destinées urbaines. [...]
[...] Si ces critères généraux sont pertinents, ils ne permettent pas une lecture fine des différents espaces informels qui peuvent varier fortement dans leur localisation dans la ville, dans leur fonctionnement économique et social, leur cadre bâti mais aussi dans leur insertion ou articulation à des espaces plus vastes. Pour Mike Davis, ces espaces sont à la fois interchangeables et uniques ce qui rend toute analyse différenciée difficile. Or, il paraît impossible de nier les différences historiques, nationales et culturelles dans l'analyse de ces slums : dans les villes du Maghreb par exemple, le concept de fragmentation trouve une limite importante dans le ciment social que constitue l'Islam ou même l'appartenance nationale qui continue de jouer un grand rôle. [...]
[...] Agier, L'invention de la ville : banlieues, townships, invasions et favelas. L'analyse de ces nouvelles formes d'habitat informel donne lieu ici à une approche radicalement différente. Le regard d'anthropologue s'attache à décrire et comprendre comment ces populations s'approprient un espace qu'ils n'ont certes pas forcément choisi mais qu'ils parviennent à faire leur par toute une série d'actions économiques, sociales, culturelles (un carnaval, un match de football), ou même symbolique (la transformation d'un lieu en temple sacré dans une favela de Bahia permet ainsi de souder toute une communauté religieuse). [...]
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